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Emploi : et si vous recrutiez autrement ?

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Tensions sur le marché de l'emploi, pénurie de talents, turn-over... certains dirigeants de PME, confiants dans le développement de leur business, innovent pour dénicher les perles rares. Au lieu de ne cibler que les profils que toutes les entreprises s'arrachent - jeunes diplômés expérimentés -, ces employeurs malins se tournent vers d'autres candidats à potentiel, qu'ils sélectionnent hors CV. Un pari gagnant...

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Ouvrir les vannes... Les entreprises qui réussissent aujourd'hui à séduire les candidats jouent cartes sur table. Elles développent leur marque employeur, soignent l'expérience collaborateur, adoptent un management horizontal, misent sur la flexibilité, forment les nouvelles recrues et les accompagnent dans leur projet de vie sans ciller et le font savoir... Bref, elles répondent aux nouvelles attentes des salariés.

Plus de la moitié (51 %) des dirigeants chercheraient actuellement à recruter, or 94 % rencontreraient des difficultés à dénicher le bon profil selon la dernière enquête de conjoncture de la Confédération des PME publiée au mois de juillet. En cause ? Le rapport au travail qui semble changer de paradigme. La tendance est quasi générale. Ainsi, une étude menée pour Yooz-DFCG- Mazars révèle que 66 % des décideurs financiers craignent une pénurie de talents. Dans le secteur du digital, l'enquête emploi de la CCI Paris Ile-de-France indique que 39 % des entreprises ont cherché à recruter depuis un an et que 79 % ont rencontré des difficultés. Des pourcentages qui bondissent dans le CHR (café-hôtel-restaurant) pour s'établir respectivement à 64 % et 93 %. « Le marché de l'emploi est en tension depuis longtemps, les PME et les start-up en souffrent mais, fait nouveau, depuis deux ou trois ans, les grandes entreprises y sont également confrontées, d'autant que le rapport au travail évolue, tout comme la notion d'engagement. Certains modèles d'organisation du travail ne conviennent plus » résume Antoine Pennaforte, maître de conférences en gestion des ressources humaines au Cnam. Les règles du jeu se modifient.

Professionnaliser les process

« Une des réponses à l'attractivité et à la fidélisation des futurs collaborateurs est d'employer une personne formée aux fondamentaux de la gestion des ressources humaines (GRH). Moins un recrutement n'est professionnel, plus l'entreprise envoie des signaux délétères et moins les candidats solides se positionneront. Or, la GRH nécessite de maîtriser le recrutement, l'évaluation des performances et le développement des compétences », explique Antoine Pennaforte. Une autre solution consiste à faire appel à un spécialiste. « Un cabinet de recrutement connaît les profils, sait quelle orientation un candidat veut donner à sa carrière et peut donc lui proposer des offres, mais la clé de l'accompagnement des talents représente un travail de longue haleine », note Thierry Grosso, président de Phenicia Conseil, cabinet de recrutement international. Chez Axtom (135 collaborateurs, 22 associés), opérateur immobilier spécialiste dans l'aide à l'implantation des entreprises, actuellement en forte croissance, Jérémie Benmoussa, porte-parole témoigne : « Nous avons structuré une équipe RH, internalisé un responsable recrutement, élargi notre réseau de cabinets de chasse afin d'accélérer, car nous subissons moins une pénurie de talents qu'une hausse des réponses négatives, les candidats sont tellement sollicités qu'il faut aller de plus en plus vite dans le process de recrutement ». Pour pourvoir certains postes, le recours au travail temporaire apparaît comme un moyen d'identifier les candidats. Mais là encore, ces derniers sont moins proactifs. « Nous observons des changements dans les comportements de la part des candidats qui attendent les offres, c'est pourquoi nous avons lancé l'opération Job Truck, qui nous permet d'aller vers eux, dans des villes moyennes et zones périurbaines », confie Florian Cuminal, responsable marketing et communication de Samsic Emploi.

Disrupter les recrutements

Exit le CV, un recrutement réussi utilise d'autres marqueurs. « L'expérience est une lanterne qui n'éclaire que le chemin parcouru, disait Confucius, or il faut embaucher un candidat pour son potentiel, d'autant que les métiers de demain n'existent pas encore » déclare Philbert Corbrejaud, coach et conférencier. « Les dirigeants qui changent leur approche, ne recrutent plus sur CV mais évaluent les candidats sur leur potentiel, ne sont plus confrontés à une pénurie de talents. Le pool de candidats existe, c'est la vision des employeurs qui est trop restreinte », confirme David Bernard, CEO d'AccessFirst. Cette start-up a développé une plateforme de recrutement prédictif basée sur l'analyse de trois grands critères : la capacité d'apprentissage, les motivations des candidats et leur personnalité. La preuve par l'exemple : « Chez AccessFirst, notre meilleure commerciale était danseuse au Lido et notre data analyste était styliste », glisse-t-il. Il s'agit de bousculer le mode opératoire. Inutile de rechercher le candidat sorti diplômé d'une grande école et affichant trois ans d'expérience sur son CV, il n'est pas disponible !

Miser sur les soft skills

« L'environnement professionnel évolue rapidement, se complexifie, les compétences deviennent rapidement obsolètes, mieux vaut recruter un profil ayant soif d'apprendre », recommande David Bernard. Élargir le spectre pour identifier le candidat puis le former. « Les hard skills ne m'intéressent pas en phase de recrutement car elles s'apprennent ; en revanche, en tant que dirigeante d'une start-up, j'ai besoin de créateurs, je ne regarde donc pas les CV, je préfère proposer des tests de personnalité, de motivation et de logique aux candidats, chaque poste nécessitant une qualité spécifique », affirme Élisabeth Felixine, CEO de Bizco, application Saas de scan 3D et chiffrage des travaux qui cible les professionnels de l'immobilier.

Améliorer sa marque employeur

Pour soigner leur attractivité, « les entreprises doivent occuper le terrain de la marque employeur, fréquenter les forums, communiquer sur leurs activités, échanger sur LinkedIn, expliquer leur projet », conseille Thierry Grosso. Ce qu'a entrepris, avec succès, Agriconomie, site e-commerce de vente d'engrais, semences et de matériel agricole. Ce distributeur qui emploie 80 salariés ouvre 60 postes, à pourvoir d'ici juin 2023, sur une vingtaine de métiers. « À l'extérieur, nous essayons d'être présents auprès des écoles d'ingénieurs agronomes et des écoles de commerce, nous communiquons sur notre culture d'entreprise, sur notre croissance, le programme French Tech 120 nous procure également une belle visibilité, et en interne, nous avons mis en place Agrico Academy afin d'accompagner les collaborateurs », récapitule Jim Ramos, DRH. Car dans cette scale-up, les fils d'agriculteurs sont nombreux. « Nous savons qu'ils partiront pour reprendre l'exploitation familiale, autant les préparer à ce défi par un programme de mentorat » , assure-t-il. Résultat, l'entreprise ne subit qu'un turn-over prévu. La localisation des emplois renforce leur attractivité. Après avoir démarré en Ile-de-France, Agriconomie a ouvert des agences à Angers, Reims et Munich. L'international séduit. « C'est un argument pour attirer les talents », reconnaît Jim Ramos. L'activité à l'étranger doit néanmoins être savamment orchestrée. Pas question de laisser les nouvelles recrues livrées à elles-mêmes. « Attention à organiser plusieurs entretiens afin de valider la fiabilité du projet du candidat, son adéquation avec sa vie personnelle, la majorité des collaborateurs partent en expatriation avec leur famille, mais 80 % des difficultés pendant le séjour sont liées au conjoint », précise Thierry Grosso.

Booster l'expérience collaborateur

Avec une quarantaine de recrutements prévus en 2022 et une soixantaine en 2023, le groupe Axtom fait état de besoins significatifs. « Nous avons entamé une réflexion sur le management, les tâches à valeur ajoutée, l'autonomie et la confiance, mais pour attirer les meilleurs profils, le groupe doit encore grossir, déployer sa nouvelle identité de marque (prévue fin 2022) et mettre l'accent sur le collectif d'entrepreneurs que nous formons, attachés à des valeurs environnementales et sociétales fortes » raconte Jérémie Benmoussa. Car au final, poursuit-il, « lorsque l'on interroge les candidats sur les critères qui orientent leurs choix, ils répondent : qualité du challenge offert par le poste, perception du bien-être au travail et de la valorisation procurée par le management, opportunités internationales ». Ils souhaitent s'épanouir. « 21 % des collaborateurs seraient réellement engagés dans le monde, et seulement 6 % en France selon l'étude du cabinet Gallup. Cela ne traduit pas des incompétences mais une insatisfaction face aux perspectives de carrière et à l'exploitation des potentiels », pointe Philbert Corbrejaud. Pour cet expert, auteur de l'ouvrage "Libérez vos talents" publié aux Éditons Eyrolles, « le rôle du manager est de veiller à ce que le projet individuel du salarié soit aligné avec celui de l'entreprise » .

Faire sauter les tabous

Enfin, les candidats étudient avec attention le niveau des rémunérations. « En France, l'argent demeure tabou, c'est idiot, les gens ont besoin de connaître le montant du salaire proposé, publier une fourchette ne suffit pas, car si le salaire ne convient pas, les deux parties gagnent du temps en mettant rapidement fin aux tractations » , estime Michel Khoury, CEO de MCK Business à Montpellier, gérant d'un pressing et influenceur. Ce chef d'entreprise, lui-même employeur d'une dizaine de collaborateurs, incite à engager la conversation. « Il suffit de poster une vidéo sur les réseaux sociaux montrant la vie dans l'entreprise, avec des témoignages, divulguant des informations précises pour permettre en un clin d'oeil au candidat de savoir où il met les pieds. » Autre point d'achoppement, le CDI que d'aucuns rejettent aujourd'hui. « Le CDI ne devrait plus être considéré comme le Graal », suggère Antoine Pennaforte. Pourquoi ne pas proposer des CDD et accepter un certain niveau de turn-over, si les process du recrutement et la transmission des compétences sont bien huilés ? Et bâtir un nouveau modèle.

 
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