Directive européenne sur la transparence salariale : un électrochoc pour les PME françaises

La nouvelle directive européenne imposant la transparence des rémunérations au sein des entreprises pourrait bien représenter un tournant décisif pour les PME françaises, entre risques de tensions internes, fuite des talents et concurrence exacerbée au niveau national et international.
Je m'abonneL'entrée en vigueur de la directive européenne sur la transparence salariale, prévue pour le 7 juin 2026, va profondément bouleverser le paysage du recrutement et la manière dont les entreprises communiquent leurs offres d'emploi. L'objectif est clair : éradiquer les discriminations salariales et l'écart de rémunération entre les femmes et les hommes. Pour y parvenir, les entreprises devront désormais afficher explicitement les fourchettes salariales dès l'annonce des postes à pourvoir et bannir toute question relative à l'historique salarial des candidats lors des entretiens d'embauche. Une avancée décisive vers l'équité professionnelle et la transparence des parcours de carrière.
Cette directive devra être transposée par tous les États membres de l'Union Européenne d'ici juin 2026. Le compte à rebours est donc lancé pour les PME françaises. Il est impératif que celles-ci se saisissent dès maintenant de ce changement majeur. Si la directive s'applique principalement aux entreprises de plus de 100 salariés, ses mesures clés (affichage systématique des salaires, interdiction des questions sur l'historique salarial, critères transparents de rémunération) auront également un impact sur les structures de plus petites tailles, souvent moins préparées à ce type de transformations.
Car les conséquences à prévoir ne sont pas à prendre à la légère, entre tensions internes accrues, fuite des meilleurs profils vers le plus offrant, voire perte d'attractivité sur le marché de l'emploi. Sans anticipation, les PME françaises risquent de voir leurs talents stratégiques partir chez des grands groupes capables d'offrir une meilleure rémunération.
Fidéliser ses collaborateurs : l'équation impossible ?
Pour les PME françaises, réussir cette transition reposera sur leur capacité à mobiliser efficacement leurs ressources internes et externes. Contrairement aux grands groupes disposant de ressources financières plus importantes, les petites entreprises devront rivaliser d'ingéniosité pour éviter l'exode massif de leurs meilleurs éléments. L'obligation de transparence des salaires risque en effet de pousser leurs salariés à se tourner vers des concurrents proposant des rémunérations plus élevées.
Cette concurrence asymétrique pourrait sérieusement affecter la productivité et le fonctionnement quotidien des PME. Pour y faire face, elles devront miser sur des avantages non financiers capables de retenir et d'attirer les meilleurs collaborateurs.
Capitaliser sur l'intangible
Selon nos récentes études, les PME françaises ont tout intérêt à valoriser leurs atouts distinctifs tels que la flexibilité des horaires, la possibilité de télétravail généralisé, l'autonomie accordée aux collaborateurs, la reconnaissance au travail ou encore l'équilibre entre vie professionnelle et personnelle. Autant de leviers permettant de compenser une moindre capacité financière face aux grandes entreprises.
De plus, le développement du télétravail constitue pour ces PME françaises une opportunité unique d'aller chercher des talents à l'étranger, ouvrant ainsi l'accès à une diversité de profils jusqu'ici inexploitée. Cette possibilité de recrutement international représente une chance inédite d'enrichir les équipes françaises avec des expertises nouvelles et variées. Par ailleurs,
la directive s'appliquera également aux collaborateurs travaillant en dehors de l'UE pour des entreprises françaises implantées en Europe, par exemple aux États-Unis ou au Royaume-Uni. Transparence salariale : contrainte réglementaire ou levier stratégique ?
La directive européenne sur la transparence salariale vise un objectif crucial et légitime, celui d'instaurer enfin une réelle égalité salariale entre les femmes et les hommes, et éliminer les inégalités persistantes. Mais au-delà de cet objectif louable, sa mise en oeuvre représentera un véritable défi pour les entreprises françaises, indépendamment de leur taille.
Les PME ont tout intérêt à transformer cette contrainte en opportunité stratégique, en repensant leurs pratiques RH, leur culture d'entreprise et en renforçant leur attractivité auprès des talents. C'est à cette seule condition qu'elles réussiront à tirer avantage d'une réglementation qui pourrait, sinon, se révéler très contraignante.
Marguerite Monrose est responsable marketing senior pour la France et le Benelux chez Remote. Elle a bâti son expertise dans le marketing et le développement commercial à l'échelle internationale, avec des missions variées, du recrutement de consultants SAP dans le monde entier à la mise en place de stratégies Sales & Marketing pour des éditeurs SaaS. Elle a aussi exercé comme consultante, à son compte, dans plusieurs pays européens et au Moyen-Orient. Son parcours à l'échelle internationale nourrit sa passion pour l'impact de la technologie sur le quotidien des gens, partout dans le monde
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