Et si vous laissiez vos commerciaux fixer eux-mêmes leurs objectifs ?
Entre la fin et le début d'année marque traditionnellement pour les forces de vente l'assignation de nouveaux objectifs. Vous êtes tentés de les faire définir par vos commerciaux eux-mêmes ? Bonne idée ! Voici les clés pour ne pas se tromper, et retirer tous les bénéfices de cette pratique.
Je m'abonneLe commercial ne fait pas tout...
Laisser la main à son commercial dans la définition de ses objectifs ne signifie pas lui donner carte blanche à 100%. Il s'agit plutôt d'une co-construction, où vous, manager, allez étudier au préalable quel objectif vous souhaiteriez assigner à votre commercial. Vous arrivez ainsi à l'entretien annuel avec un chiffre en tête. De son côté, le commercial est sollicité pour effectuer le même travail. L'idée n'est pas d'organiser une confrontation, mais, dans un premier temps, de laisser votre commercial prendre la parole sur ses objectifs annuels lors de l'entretien de fin d'année. Vous allez ensuite challenger le commercial sur sa suggestion, plus ou moins suivant l'objectif que vous aviez en tête pour lui. Une fois l'accord trouvé, vous signez communément ces objectifs, et c'est un contrat d'engagement respectif entre vous et le commercial qui est lancé.
Comment s'y prendre ?
Pour permettre à votre commercial d'être le plus juste possible dans sa proposition d'objectif, vous devez lui fournir suffisamment d'éléments tangibles. Mettez à sa disposition des données internes à votre entreprise : stratégie commerciale envisagée, résultats commerciaux de l'année passée, conditions de finance, plans de formation, état du service client... Ces informations seront complétées par des données externes et macroéconomiques, comme l'état du marché, et le niveau de la concurrence. Ne négligez pas ce travail, sans lequel vos commerciaux ne pourront construire un objectif atteignable, réalisable et en ligne avec les vôtres.
Par ailleurs, durant l'entretien, demandez à votre vendeur quelle est, selon lui, sa capacité à s'adapter, ses chances de perdre ou de gagner des clients ? Ainsi, vous comprendrez mieux le cheminement qui l'a amené à suggérer ce niveau d'objectif plutôt qu'un autre, et pourrez corriger le tir si besoin.
Responsabiliser
On peut penser de prime abord que c'est un cadeau pour le commercial que de le laisser participer à la conception de ses objectifs. C'est en partie le cas, puisque celui-ci gagne en autonomie et en liberté. Mais il y a un prix à payer. Car la fixation d'objectif par le commercial lui-même requiert que ce dernier effectue un réel travail d'analyse, de son secteur mais aussi de ses propres capacités, et surtout qu'il se responsabilise sur l'animation de son portefeuille clients en priorisant leurs actions. En demandant à vos commerciaux de réfléchir eux-mêmes sur les objectifs à poursuivre, vous les positionnez dans un rôle d'entrepreneur auquel ils n'avaient pas nécessairement aspiré.
Quel risque de se voir suggérer un objectif délirant ?
Généralement, dans les faits, si le commercial et son manager sont de bonne foi, il n'y aura pas de gros écart entre l'objectif suggéré par l'un et l'autre. S'il persiste quelques petits écarts entre l'objectif proposé par votre commercial et celui que vous vous étiez mis en tête, il s'agira de trouver un accord ou un consensus. Si vous acceptez de signer en faveur de la suggestion de votre vendeur, n'hésitez pas à lui souligner que vous lui avez fait une concession, ce qui le responsabilisera encore davantage. Malgré ces recommandations, si vraiment l'objectif suggéré par votre commercial sort de toute rationalité, il revient à vous, manager, de le recadrer en dernier ressort, et de lui assigner un objectif vous-même. Mais il ne s'agit pas d'imposer, car si le commercial ne l'accepte pas, c'est qu'il n'a plus sa place au sein de la force de vente.
Quels bénéfices ?
En premier lieu, cette pratique permet une meilleure adhésion et appropriation des objectifs par les commerciaux. Par ailleurs, l'implication du commercial assure des objectifs intégrant une vision prospective et de terrain que seule peut apporter la force de vente. C'est particulièrement le cas des Key Account Managers, qui connaissent souvent mieux que leurs n+1 leur client, et sont plus à même de déterminer la faisabilité des objectifs. Il serait donc dommage de s'en passer !
Les deux experts:
Marc Rousselle, partenaire associé de Keyrus Management, cabinet de conseil en management, stratégies commerciales et marketing
Bert Paesbrugghe, enseignant à l'Ieseg, spécialisé en Commerce, Négociation et Marketing
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