[Mentor] Jean-François Tual : le froid au service du stress
Jean-François Tual est devenu un expert de la thérapie Wim Hof. Du nom d'un Néerlandais recordman du monde de résistance au froid, cette technique mêle exercices de respiration et baignades en eaux glacées. Jean-François Tual y voit la clé d'une bonne préparation.
Je m'abonneDes bains glacés et une respiration ventrale pour le renfort du système immunitaire... C'est la réponse de Jean-François Tual à sa crise de la quarantaine. Avec son entreprise Icemind, il propose des formations destinées aux entrepreneurs et managers au cours desquelles il vante les bénéfices du froid pour décupler ses forces mentales. Un programme étonnant, impulsé par cet athlète au parcours sinueux.
En effet, après l'obtention d'un diplôme de l'Essec qu'il finance en étant gogo danseur et strip-teaseur dans des boîtes de nuit parisiennes, Jean-François Tual veut découvrir de nouveaux horizons. GO au Club Med, il crapahute ensuite à travers le globe et réalise des publireportages. Un temps, il devient espion industriel et même chercheur d'or en Sierra Leone. Plus récemment, il accède à divers postes de management et de consulting, avant de se lancer dans la formation qui l'emmènera à participer à l'émission télévisée " Les pouvoirs extraordinaires du corps humain ", sur France 2.
Saturation
Lui, très nerveux d'origine, a été sauvé par le froid, comme on peut le lire en couverture de son livre, "Le Froid m'a changé", publié en 2019. Tout a commencé lors d'une soirée arrosée de la Saint-Sylvestre début 2017 avec dix résolutions et un an pour les réaliser. La plus riche à ses yeux : s'immerger une minute dans de l'eau glacée à 0°C. Un défi qui le transformera...
Depuis, il a escaladé des montagnes en short, s'est plongé 20 minutes dans la glace et a appris à gérer son stress et sa nervosité. Aujourd'hui âgé de 45 ans, il définit très simplement son métier : " Cela consiste à immerger les gens dans la glace ou à faire des randonnées en slip ". Le froid n'est donc pas simplement une sensation associée aux températures basses... " Je le considère comme un outil de coaching visant à comprendre des choses de la vie, à l'image du stress. "
C'est d'ailleurs l'un des piliers de la technique de bien-être Wim Hof, le Hollandais surnommé Iceman. Jean-François Tual s'y est initié lors d'un stage au sein des montagnes polonaises. " Cette méthode consiste à utiliser le froid et la respiration afin de booster l'adaptation humaine ", affirme-t-il. Autrement dit, la respiration ventrale sature les globules rouges d'oxygène afin de réduire l'aptitude des cellules sanguines à délivrer l'oxygène aux muscles et organes. Le processus encourage alors la libération d'hormones comme la dopamine, l'adrénaline ou la sérotonine. Plus concrètement, cela agit en démultiplicateur d'émotions pour décupler ses capacités.
Wim Hof
Cette méthode de santé alternative aurait permis à Iceman de gravir l'Everest en short et d'établir 27 records du monde. C'est pourquoi, à la suite de stages, Jean-François Tual est devenu, en 2018, instructeur certifié Wim Hof avec sa société Icemind en constatant : " Notre vie de citoyen a besoin d'un coup de pied aux fesses pour réveiller nos mécanismes adaptatifs que nous atrophions à force de sous-stimulation. " Selon lui, les stages peuvent améliorer la circulation sanguine des participants. " Le froid provoquera un pic de stress, impulsant une redistribution des budgets énergétiques du corps. Et pour une personne qui y est exposée en continu, notamment avec ses mails et les réseaux sociaux, cela remettra l'organisme à zéro et donc le rééquilibrera. " Une manière de soigner le stress par le stress. " Il faut comprendre que le froid fait mal, peur et devient addictif, relate l'expert. S'y exposer ressemble à des situations de stress extrême et provoque donc de l'anxiété. " Deux réactions seront alors observées : celle de serrer les dents ou celle de se battre. Cependant, aucune des deux ne sera bénéfique. Le plus important réside dans la prise de contrôle du système nerveux. " Alors que le sujet ne raisonnera plus de manière rationnelle, la respiration deviendra une porte de sortie ", martèle Jean-François Tual.
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Stress
En entreprise, les équipes sont régulièrement plongées dans des situations de crise, un phénomène qui a bien sûr pris encore plus d'ampleur pendant la pandémie. " Durant ce genre de période, un chef d'entreprise passera des semaines à douter sans avoir de douleurs physiques. Il dérive donc sans trouver de solution. Or, le froid pourra l'obliger à réagir, explique Jean-François Tual. Il fonctionnera comme un terrain d'entraînement pour développer de nouveaux réflexes. "
En répétant des situations de stress, comme peuvent l'être les douches froides, un entrepreneur développera d'autres pistes de réponses afin de pouvoir dompter ses réactions psychologiques sous tension. Pour le formateur, cela constitue le " premier étage de la fusée ". Notons que l'idée de Jean-François Tual n'est pas de faire prendre des douches froides aux collaborateurs, mais davantage que chacun dispose de tous ses moyens en période de crise. C'est-à-dire qu'il s'agit de reconnaître les mécanismes du stress aux prémices d'une situation hors du commun. Le but ? Donner une réponse structurelle et non conjoncturelle.
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Addictif
Le quadragénaire remarque la quête de performance constante des entrepreneurs, même dans le froid, lors des formations qu'il dispense. Selon lui, cette quête est liée au côté addictif. " Cet objectif de résistance au froid les font retomber dans la douleur. Cette expérience est nécessaire pour comprendre que la surperformance n'a pas sa place dans la réalité : une approche saine est nécessaire. "
Ce souhait de reconnexion au réel prend de plus en plus de place au sein de la société. Il prend forme notamment avec le succès de la méditation qui, elle aussi, se base sur un mécanisme de répétition. " Alors, en entrepreneuriat comme ailleurs, il faut se méfier de la quête du leadership ", préconise le formateur. À ses yeux, la recherche perpétuelle de surperformance peut s'apparenter à de la fainéantise pouvant mettre à mal la santé de tous. " Il faut se marrer et ne pas sacraliser tout ce que l'on essaye d'enseigner, conclut-il en évoquant sa propre transmission d'expérience. C'est une manière de continuer à le faire simplement. Il s'agit avant tout de s'amuser. À la fraîche ! "
Après dix années dans la formation, Jean-François Tual s'attelle à toujours montrer le lien entre une pratique qu'il accepte de définir comme étrange et un changement dans la façon d'appréhender sa vie, sa profession et ses émotions.