Recherche
S'abonner à la newsletter S'abonner au magazine

Le contrat a durée déterminée : un contrat d'exception

Publié par le - mis à jour à
Le contrat a durée déterminée : un contrat d'exception
© ASDF - stock.adobe.com

Un contrat à durée déterminée (CDD), quel que soit son motif, ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement à un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise.

Je m'abonne
  • Imprimer

Fin juin, la ministre du Travail Elisabeth Borne a annoncé qu'elle observera pendant un an (jusqu'au 30 juin 2022) 21 000 entreprises, de plus de 11 salariés : en cas d'abus de recours aux contrats courts, elle les sanctionnera au titre du " bonus-malus ". Échapperont à ce contrôle, les entreprises très impactées par la pandémie, comme par exemple les hôtels et restaurants.

A cette occasion, le ministère rappelle que le " mode normal de l'emploi, c'est le CDI ", règle qui figure depuis 1982 dans le Code du travail et reprise par les réformes postérieures, notamment par la Loi du 12 juillet 1990 " favorisant la stabilité de l'emploi par l'adaptation des contrats précaires ". Ainsi, la conclusion et la rupture d'un CDD ne sont possibles que dans certains cas limitativement énumérés par les textes(1).

Des cas de recours limitativement énumérés...

Le Code du travail prévoit les cas de recours limitativement énumérés(2): le remplacement d'un salarié absent, l'accroissement temporaire de l'activité de l'entreprise, les emplois à caractère saisonnier, le remplacement d'un chef d'entreprise ou de son conjoint participant effectivement à l'activité de l'entreprise à titre professionnel et habituel, le recrutement d'ingénieurs et de cadres au sens des conventions collectives en vue de la réalisation d'un objet défini (CDD à objet défini).

D'autres cas de recours sont prévus globalement liés à la politique de l'emploi(3).

Par ailleurs, certains cas de recours sont interdits, notamment le remplacement d'un salarié gréviste ou encore en cas de licenciement économique (pas de CDD, y compris pour l'exécution d'une tâche occasionnelle, dans les 6 mois qui suivent, l'interdiction portant sur les postes concernés par le licenciement économique(4)).

Pour une durée limitée ...

Le motif du recours au CDD étant par nature temporaire, la durée du CDD est corrélativement limitée : 18 mois maximum renouvellement compris, sachant que le CDD ne peut être renouvelé que 2 fois.

Mais certains CDD ont des durées maximales (renouvellement compris) moins longues de 9 mois, ou plus longues de 24 mois.(5)

Les CDD d'usage et saisonniers échappent à la règle de limitation de durée, mais une durée trop longue pourrait supposer que le CDD est utilisé pour pourvoi un emploi durable, ce qui est contraire à la législation.

Pour certains cas de recours, limitativement énumérés, il est possible de conclure un CDD sans terme précis et ainsi dépasser la limite de 18 mois(6), notamment en cas de remplacement d'un salarié absent. Ce type de CDD doit comporter une durée minimale, dont la durée est fixée par les parties.

Une période d'essai courte

La période d'essai est fonction de la durée du CDD :

- un jour par semaine dans la limite de 2 semaines lorsque la durée initiale du CDD est de 6 mois

- un mois pour les CDD dont la durée initiale est de plus de 6 mois.

Pour les CDD sans terme précis, la période d'essai est calculée par rapport à la durée minimale du contrat.

Un formalisme important qu'il vaut mieux respecter

Le CDD est un contrat écrit comportant des mentions obligatoires(7) ; certaines sont essentielles et déterminantes du caractère temporaire du contrat et entrainent la requalification du CDD en CDI (motif du recours, durée minimale du contrat), d'autres sont informatives (nom et adresse de la caisse de retraite).

En cas de remplacement de salarié absent, le contrat mentionne le nom et la qualification professionnelle du salarié remplacé. La Cour de cassation précise que la seule mention de la catégorie professionnelle du salarié remplacé ne suffit pas lorsqu'elle comporte plusieurs qualifications(8).

Pour l'administration, le contrat ne doit pas se contenter de mentionner le cas de recours lui-même mais il doit indiquer toutes les précisions qui permettent d'apprécier la réalité du motif.

Le CDD doit être transmis au salarié dans les deux jours au plus tard qui suivent le début du contrat. A défaut, l'employeur s'expose à verser au salarié une indemnité pouvant aller jusqu'à un mois de salaire ainsi qu'à une sanction pénale(9).

Une succession de CDD limitée

Les conditions de succession sont précisément prévues par le Code du travail.(10)

- Les CDD se succèdent-ils avec le même salarié ?

Dans l'affirmative, il faut examiner si le motif du recours entre dans les cas prévus par les textes et respecter un délai d'attente non fixé par la loi.

- Les CDD se succèdent-ils sur le même poste ?

Dans l'affirmative, il faut alors respecter un délai de carence entre les CDD calculé en fonction de la durée du contrat :

o 1/3 de la durée du contrat venu à expiration si la durée du contrat initial (renouvellement inclus) est de 14 jours ou plus

o 1/2 de la durée du contrat venu à expiration si la durée du contrat (renouvellement inclus) est inférieure à 14 jours.

Le délai de carence n'est pas applicable dans certains cas de recours(11).

Globalement, la succession est admise, avec le même salarié, sans respect d'un délai de carence, en cas de remplacement de salariés absents.

Toutefois, la conclusion de plusieurs CDD avec un même salarié sur une longue période peut caractériser un besoin structurel de main d'oeuvre que le recours au CDD ne peut pas pallier.

Cela étant, une entreprise dont l'effectif est important peut faire face de manière régulière à des absences de salariés sans pour autant qu'il y ait un détournement des règles relatives à la conclusion du CDD.

La loi Avenir du 5 septembre 2018 prévoit qu'à titre expérimental (jusqu'au 1er janvier 2023) un seul CDD puisse être conclu pour remplacer plusieurs salariés dans les secteurs définis par décret.

Le décret du 18 décembre 2019 liste lesdits secteurs : sanitaire, social et médico-social, propreté et nettoyage, économie sociale et solidaire au sens de la loi du 31 juillet 2014, tourisme en zone de montagne, commerce de détail et de gros à prédominance alimentaire, plasturgie, restauration collective, sport et équipement de loisirs, transport routier et activités auxiliaires, industrie alimentaire, services à la personne.

Mais attention, la loi précise que " l'expérimentation ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise ".

Une rupture du contrat interdite avant l'échéance prévue

Au-delà de la période d'essai, le CDD ne peut pas être rompu avant l'échéance prévue (le terme du contrat pour les CDD à terme précis et la réalisation de l'objet pour lequel il a été conclu pour les CDD à terme imprécis).

La rupture anticipée est l'exception : accord des parties, faute grave, force majeure, inaptitude, conclusion par le salarié d'un CDI avec respect d'un préavis.

La sanction est lourde pour l'employeur qui violerait ces règles : le paiement de tous les salaires dûs jusqu'à la fin théorique du CDD, outre d'éventuels dommages et intérêts pour préjudice subi.

Une égalité entre les CDD et les CDI

S'il y a un angle sous lequel le CDD ne fait pas figure d'exception, c'est celui de l'exécution du contrat. Le salarié sous CDD bénéficie des mêmes droits que le salarié sous CDI que ces droits soient issus de la loi, de la convention collective ou des usages, à l'exception de la rupture du contrat(12).

Sa rémunération est identique à celle d'un CDI "de qualification professionnelle équivalente et occupant les mêmes fonctions. "(13).

Enfin, l'employeur doit porter à la connaissance du salarié sous CDD la liste des postes à pourvoir en CDI. Toutefois, le texte ne prévoit pas de priorité d'embauche(14).

Le CDD est bien un contrat d'exception pour lequel il vaut mieux connaitre le régime avant de le conclure.

Pour en savoir plus

Martine Riou, avocat associé, Coblence avocats



1 A noter que les accords collectifs d'entreprise ou de branche, peuvent déroger à certaines règles législatives)

2 Article L.1242-2

3 Article L.1242-3

4 Articles L.1242-5 et L.1242-6

5 Article L 1242-8-1

6 Article L.1242-7

7 Article L.1242-12

8 Cass. soc. 20 janvier 2021 n° 19-21.535

9 Article L.1248-1

10 Articles L.1244-1 à L.1244-4-1

11 Article L.1244-4-1

12 Article L.1242-14

13 Article L.1242-15

14 Article L.1242-17


 
Je m'abonne

NEWSLETTER | Abonnez-vous pour recevoir nos meilleurs articles

Chef d'Entreprise Newsletter

Artisans Newsletter

Commerce Newsletter

Event

Event

Event

Les Podcasts de Chef d'Entreprise

Lifestyle Chef d'Entreprise

Artisans Offres Commerciales

Chef d'Entreprise Offres Commerciales

Commerce Offres Commerciales

Good News by Netmedia Group

La rédaction vous recommande

Retour haut de page