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L'association, un mariage de raison ?

Publié par Pierre Lelièvre le | Mis à jour le
L'association, un mariage de raison ?

Entreprendre à plusieurs comporte des avantages. Pourtant, la réussite des relations entre associés ne se décrète pas. Témoignages de patrons en pleine idylle entrepreneuriale.

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"Sept ans après avoir monté son entreprise et l'avoir portée seule, on se rend compte que ce n'est pas forcément la meilleure idée." Le constat est empli de franchise, lucide. En 2010, Arbia Smiti fonde Carnet de Mode, une place de marché de vêtements et d'accessoires de mode. Malgré le succès, l'entrepreneure constate que l'aventure dans laquelle elle s'est investie aurait dû être réalisée avec un associé. "Mon concept était fait pour l'association, explique-t-elle. J'ai rapidement vu les limites. Il était impossible de se challenger, de partager les bons comme les mauvais moments, de pouvoir compter sur quelqu'un, de confronter les idées..."

Aujourd'hui, la jeune femme n'a qu'un but : s'associer pour lancer sa seconde start-up. Une démarche qui répond à plusieurs besoins d'après Benoît Galy, dirigeant de Green-Acres et auteur de Bien ­s'associer pour mieux entreprendre (Éditions Leduc, 2013). "L'aventure entrepreneuriale est anxiogène, estime-t-il. L'association permet de limiter les difficultés inhérentes au monde de l'entreprise." Parce que si l'association vise à assurer et conforter le développement de l'entreprise, elle doit surtout "avoir du sens".

Complémentarité des associés

Le choix de l'associé apparaît alors comme la première étape d'un mariage réussi. "L'association est un accélérateur de business indéniable, précise Benoît Galy. On recommande de réfléchir aux rôles de chacun en fonction de leur profil, de leurs compétences et surtout de tester, en amont, la relation de travail."

Une astuce que les cofondatrices de BimBamJob, une plateforme de recrutement dédiée au secteur social, ont pu mettre à l'épreuve. Ce qui n'était qu'un projet d'étude commun à HEC s'est transformé, en 2015, en une vraie petite start-up. "Dès nos études, nous partagions des valeurs personnelles et de travail communes, précise Aurélie Lavaud, cofondatrice avec Irène Soulages. Ce socle et notre parcours relativement semblable ont motivé le projet et nous ont rassurées sur notre entente au quotidien dans le travail."

Irènes Soulages et Aurélie Lavaud, cofondatrices de BimBamJob

Un exercice qui a le mérite de s'appuyer également sur une complémentarité à toute épreuve, chacune disposant de ses prérogatives. "Je suis davantage quelqu'un qui porte la vision et initie les projets tandis qu'Aurélie a cette faculté de très bien gérer l'opérationnel, en assurant le maintien et le développement des projets", ajoute la jeune présidente.

Une interdépendance trouvée par David Rebeyren et Pierre Sappey-Marinier, anciens collègues et cofondateur de la SARL RS Développement, créée en 2008. "L'un est davantage sur l'opérationnel, la gestion et le côté commercial, l'autre sur la stratégie de développement de l'entreprise. Mais les grandes décisions ne se prennent véritablement qu'à deux", expliquent-ils.

Néanmoins, si des désaccords surviennent, l'unanimité des décisions est prépondérante. "Il arrive de ne pas être d'accord mais on parvient à prendre des décisions communes en dialoguant. La communication et l'échange sont la base d'une relation réussie", note Aurélie Lavaud.

Si la complémentarité des associés constitue la clé de voûte d'une association aboutie, la question de la confiance est également essentielle. "Chacun doit avoir sa fenêtre de création et ses missions", considère Aurélie Lavaud, qui pointe la nécessité de ne pas vouloir tout contrôler.

Anticiper l'association

Un enjeu qui ne doit pas éluder une autre réalité : celle de la prise de décision. "Dans toute entreprise, il y a besoin d'un décisionnaire. Son objectif : que le projet d'entreprise passe au premier plan." Pour cela, Benoît Galy avertit que la question du partage des parts de capital constitue un moyen d'afficher une transparence dans la prise des décisions. "Un partage à parts égales est plus compliqué à gérer en cas de conflit", considère-t-il.

Ce n'est pourtant pas la direction prise par David Rebeyren et Pierre Sappey-Marinier, malgré les mises en garde. "Beaucoup nous ont déconseillé ce partage égalitaire mais on s'est lancés quand même en anticipant au maximum les risques éventuels", précisent-ils. Les cofondateurs de la PME de quarante salariés ont inscrit de nombreuses clauses relatives à la gestion, à la stratégie et à leur rémunération dans les statuts. En cas de départ de l'un, la vente des parts est, par exemple, priorisée à l'autre associé.

Cette multitude de pièges se doit d'être devancée, avant même le choix de la forme juridique via l'établissement de clauses ou d'un pacte d'associés. "L'entreprise est le lieu de la décision. Le pacte d'associés doit les amener à réfléchir à ce qu'ils veulent faire ensemble, aux objectifs, aux missions de chacun mais surtout à anticiper le divorce. Les chefs d'entreprise ne pensent généralement pas à évoquer la question de la séparation au moment de la lune de miel", déplore Benoît Galy.

Un défi d'envergure auquel Arbia Smiti espère bien se confronter rapidement. Mais elle l'assure : "La question d'un partage égalitaire des parts ne se pose pas."

" Notre relation d'associés passe avant la boîte "

Philippe de Chanville et Christian Raisson, cofondateurs de ManoMano


Philippe de Chanville et Christian Raisson affichent une unité de (vieux) "couple". C'est même avec ce mot qu'ils signent leur mail lorsqu'on les contacte pour échanger sur leur relation d'associés. Cofondateurs de ManoMano, une marketplace de jardinage et de bricolage au succès fulgurant, ils reviennent sur les prémices de leur duo entrepreneurial.

"C'est un concours de circonstances, avance l'un d'eux. Chacun voulait monter sa boîte et on s'est lancé le pari à deux. On s'est choisis mutuellement." Avec 171 salariés, la start-up est devenue une belle PME au sein de laquelle l'association prime et les choix sont faits collégialement. "On ne prend aucune décision stratégique seul. Si l'un n'arrive pas à convaincre l'autre du bien-fondé d'une décision, c'est que ce n'est pas la bonne direction", avance Philippe de Chanville, tandis que Christian Raisson glisse : "Notre relation d'associés passe avant la boîte."

Malgré la réussite du binôme, chacun s'accorde à reconnaître que les difficultés font partie du jeu.

"Des traversées du désert, on en a eu, mais l'association a toujours fonctionné en raison de notre complémentarité." Et de filer la métaphore sur le mariage : "La réussite d'un couple, c'est de parvenir à mettre son ego de côté et se dire les choses."



Les points à retenir :

+ Miser sur la complémentarité des compétences et tester la relation de travail

+ Penser à prévoir les conditions de sortie des associés en cas de désaccord.

- Un partage égalitaire des parts comporte des risques en cas de désaccords stratégiques.

- Un manque de communication et de définition des missions peut être fatal à l'association.



 
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