D'échec en lumière : le second souffle de Sandra Rey !

À 22 ans, Sandra Rey veut révolutionner l'éclairage urbain grâce à la bioluminescence. En dix ans, elle lève des centaines de milliers d'euros, installe du mobilier urbain lumineux et fédère une équipe de 18 personnes. Mais l'aventure s'éteint brutalement, victime d'un financement qui ne viendra jamais.
Je m'abonneContexte : un concours, une startup
Le déclic est aussi inattendu que puissant. Étudiante en design, Sandra Rey découvre la bioluminescence lors d'un concours étudiant. Son idée ? Exploiter la lumière produite par des micro-organismes marins pour remplacer une partie de l'éclairage urbain. Le concept séduit immédiatement : presse, réseaux, premiers investisseurs. Très vite, elle quitte son statut de freelance et fonde Glowee, à seulement 22 ans, sans background scientifique. La promesse est ambitieuse : réduire la pollution lumineuse en ville en développant une technologie vivante, durable, poétique. Elle s'entoure d'une équipe pluridisciplinaire, lève près de 450 000 € en 18 mois et décroche des soutiens publics. La traction marché est forte, mais la techno reste un pari. Sandra avance, portée par l'élan. Son ambition n'est pas de devenir une startuppeuse star, mais d'avoir un vrai impact. Elle entre en laboratoire, dépose des brevets, structure une équipe. Glowee devient rapidement un symbole de l'innovation bio-inspirée à la française. Et pourtant, l'étincelle ne suffira pas.
Le fait : une promesse non tenue fait tout basculer
En surface, tout va bien. Glowee boucle des levées de fonds, recrute, installe enfin ses premiers équipements lumineux. Mais en coulisses, l'équilibre est fragile. La startup attend un financement clé promis par la Commission européenne. Une termsheet est signée depuis plus d'un an, mais les fonds n'arrivent jamais. Ce retard devient un verrou : les autres financements sont conditionnés à cette enveloppe. Impossible de débloquer les aides BPI, de sécuriser des prêts ou d'activer des subventions. L'entreprise entre alors dans une spirale de blocages. Pourtant, techniquement, Glowee est à son apogée : la techno fonctionne, les premières installations sont en place, les équipes livrent à temps. Mais sans carburant financier, l'élan est brisé. En janvier, Sandra entame une procédure de conciliation. En avril, elle dépose le bilan. La liquidation judiciaire est prononcée en juillet, le jour même de l'inauguration de leur premier mobilier urbain public. Dissonance totale entre le succès opérationnel... et la faillite financière. Ni les salariés, ni les clients, ni les investisseurs n'avaient vu venir cette chute. Tout semblait sous contrôle.
Le rebond : liquidation, mais pas enterrement
La fin semble actée. Quatre projets de reprise échouent dans les toutes dernières heures. L'administrateur judiciaire annonce la liquidation sèche. Mais un ultime rebondissement survient : un entrepreneur australien, familier du dossier, rachète l'intégralité des actifs : brevets, marque, matériel. Son objectif : relancer Glowee depuis l'étranger. De son côté, Sandra choisit de ne pas remonter dans le navire. Elle a passé huit mois à digérer l'échec, faire son deuil, se reconstruire. Elle refuse de recommencer seule, sans son équipe, ni ses moyens. Elle l'admet : elle a sans doute atteint ses propres limites. Repartir de zéro serait un pas de trop. Surtout, elle réalise que sa force réside peut-être ailleurs : dans la genèse d'idées, dans la mise en orbite, pas forcément dans la gestion de la croissance à grande échelle. Une forme de lucidité rare. Elle accepte que Glowee lui échappe, avec l'espoir qu'un autre saura l'emmener plus loin. Pour elle, la vraie victoire, c'est d'avoir su s'arrêter avant d'y laisser sa santé mentale ou sa stabilité personnelle.
Depuis : anima, un nouveau terrain de jeu pour le biomimétisme
Loin de se retirer, Sandra rebondit avec méthode. Elle cofonde Anima, un startup studio dédié aux projets bio-inspirés. L'un des associés est un ancien candidat au rachat de Glowee. Ensemble, ils accompagnent des chercheurs ou entrepreneurs dès les premières étapes : structuration, financement, stratégie. Leur ambition ? Faire éclore des projets à impact réel, en combinant expertise scientifique et vision business. Sandra met à profit tout ce qu'elle a appris : son réseau, sa résilience, sa capacité à anticiper les pièges de l'hypercroissance. Elle n'est plus en première ligne sur un seul produit, mais catalyse l'émergence de plusieurs startups. Plus alignée, plus lucide, elle se sent à sa place. "Je valorise 100 % de ce que j'ai appris. Et je me sens plus utile que jamais." L'échec de Glowee n'a pas freiné sa trajectoire. Il l'a redirigée. Et surtout, il lui a appris la chose la plus précieuse en entrepreneuriat : identifier ses vraies limites, pour mieux les dépasser ailleurs.