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[Dossier] PME et grandes entreprises : codéveloppement, source de discorde ?

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[Dossier] PME et grandes entreprises : codéveloppement, source de discorde ?

L'étape de la contractualisation est cruciale car elle définira les futures règles du jeu de la collaboration entre le grand compte et la PME. État des lieux et bonnes pratiques.

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Les CGV constituent le socle unique de la négociation commerciale, selon l'article L.441-6 du code de commerce. "Imposer ses conditions d'achat ou de vente sans négociation est illégal", rappelle François Girard, délégué national du Conseil national des achats. Une pratique qui malheureusement persiste. Par exemple, il est encore courant d'être obligé de cliquer sur le bouton "J'accepte les CGA" pour répondre à un appel d'offres en ligne. Or, c'est illicite.

Simplification des contrats

Mais la donne change. "Les grands groupes acceptent de plus en plus de négocier sur la base du contrat présenté par leurs fournisseurs, constate Franklin Brousse, avocat spécialisé dans les achats indirects et innovants. La recherche d'un équilibre économique et juridique est aujourd'hui un objectif pour nombre d'acheteurs."

Les contrats standards ont également le vent en poupe dans les grands groupes. Société Générale a ainsi rédigé soixante contrats-types en fonction des différentes catégories d'achats, dont certains, spécifiquement adaptés aux PME, ne dépassent pas la dizaine de pages. "La standardisation de la structure des contrats constitue une vraie avancée : elle n'exclut pas la négociation mais fait gagner du temps, témoigne Philippe Bouquet, secrétaire général du Comité Richelieu, et directeur exécutif de l'ETI Atos Racks. Aujourd'hui, les clauses sont souvent équilibrées. Quoi qu'il en soit, les entreprises ne doivent jamais accepter un contrat défavorable et des clauses léonines. Il ne faut pas avoir peur de négocier, le grand compte ne vous en respectera que plus. "

Mais le rapport de force est le plus souvent du côté du client, a fortiori si c'est une grande entreprise. "La pression sur les prix est très importante, témoigne Alain Berger, dirigeant de la PME innovante Ardans. Certains acheteurs ont encore tendance à acheter des prestations intellectuelles innovantes comme si c'étaient des tonnes de granulats ! Face à la toxicité de certains grands comptes, j'ai jugé profitable de les délaisser." Avant de signer, il convient donc d'être vigilant sur les conditions tarifaires et de règlement, sans oublier la durée et la sortie du contrat et les enjeux de propriété intellectuelle (PI).

"En cas de création ex nihilo, la PI revient à celui qui crée, sauf clause de cession de droits", rappelle l'avocat Franklin Brousse. Une nouvelle pratique se développe : au lieu de solliciter les droits de propriété intellectuelle sur ce qui est réalisé, les grandes entreprises demandent une exclusivité d'utilisation pour un temps donné. Les PME développent ainsi leur actif immatériel et peuvent chercher de nouveaux clients à l'issue de l'exclusivité. Un contrat d'exclusivité permet de s'inscrire dans une relation sereine pendant un à trois ans, voire plus si l'exclusivité est reconduite.

En revanche, pour les innovations qui touchent leur coeur de métier, les grands groupes conservent généralement les droits de PI, avec une éventuelle clause de partage.

Codéveloppement

En cas de création à quatre mains ou plus, la donne juridique est plus complexe. "L'enjeu est alors le business model associé", prévient l'avocat Franklin Brousse. Qui finance quoi ? Quels sont les organes de pilotage ? Qui commercialisera ? Qui supportera l'effort marketing et de communication ? "Les entreprises doivent apprendre à travailler ensemble, ce qui ne va pas de soi, estime Pierre Pelouzet, médiateur des entreprises. Au départ, les projets se présentent sous les meilleurs auspices. C'est à la fin, quand les recherches aboutissent, quand les enjeux se précisent, que la situation peut s'envenimer."

La médiation des entreprises peut intervenir au départ du projet pour créer des règles du jeu équilibrées. D'ailleurs, elle travaille actuellement à l'élaboration de règles de collaboration entre laboratoires publics et entreprises qui seront communiquées au second semestre. Pacte PME a édité un Guide de bonnes pratiques en innovation ouverte, disponible sur le site pactepme.org. "La co-innovation constitue un formidable atout concurrentiel tant pour les PME que les grands groupes. Mais les PME doivent arriver à dépasser leurs peurs, souligne François Perret, directeur général de Pacte PME. Dans ce guide, nous avons compilé une série de bonnes pratiques à même d'assurer un cadre propice au dialogue, à la confiance réciproque et à un partenariat gagnant-gagnant."

Par exemple, il est nécessaire d'anticiper les besoins en financement de la PME via les dispositions du contrat. Cela peut prendre la forme d'une clause spécifique d'upfront/advance payments, permettant à la PME de commencer les travaux sans avancer de trésorerie. Côté brevet, toutes les options sont envisageables : laisser l'intégralité de la propriété intellectuelle à la PME ou opter pour la copropriété, à parts égales ou non. Le grand compte peut alors prendre en charge les frais de brevet ou avancer la part de la PME, le remboursement pouvant provenir des premières ventes effectuées par cette dernière.

Des litiges réglés à l'amiable

Malgré toutes les précautions prises et la bonne volonté, des litiges peuvent survenir. C'est pourquoi des "correspondants PME" fleurissent dans les grandes entreprises. "Notre médiateur interne n'intervient que sur deux à trois cas par an, affirme Jean-Louis Coudrillier, vice-président group procurement d'Air Liquide. Il est vrai que nous privilégions la proximité et le dialogue avec nos fournisseurs, ce qui permet de limiter les litiges."

Avant la case procès, les entreprises peuvent également faire appel à la médiation des entreprises, une procédure confidentielle, rapide et gratuite. "Dans les trois quarts des cas qui nous sont soumis, les parties trouvent une solution, tout en recréant des liens de confiance", conclut Pierre?Pelouzet.

Témoignage

"L'innovation peut venir des fournisseurs"

Depuis 2014, la PME Netatmo pratique le codéveloppement avec une marque dédiée, "with Netatmo". Forte de son portefeuille de dizaines de brevets et de la qualité de ses produits, la scale-up n'hésite pas à frapper à la porte des pointures du bâtiment (Legrand, Velux, Vaillant Group...) pour leur proposer de rendre leurs produits intelligents.

Son savoir-faire en matière de logiciels et d'ergonomie vient alors se greffer sur le savoir-faire métier du client. "Aujourd'hui, les grandes entreprises ont pris conscience que l'innovation peut venir des fournisseurs", constate Fred Potter, dirigeant de Netatmo, qui n'a jamais eu à déplorer de tentative de domination de la part de ses partenaires grands comptes. Chaque projet "with Netatmo" fait l'objet de deux contrats, l'un de développement et l'autre de fourniture.

En termes de propriété intellectuelle, Fred Potter privilégie les cobrevets en cas de co-innovation, ou la pleine propriété assortie d'un droit d'usage, pour ses propres inventions. Grâce à la notoriété grandissante de "with Netatmo", ce sont aujourd'hui les grands groupes qui frappent à la porte de la PME.

NETATMO
Activité : Conception et commercialisation d'objets connectés pour la maison
Forme juridique : SAS
Ville : Boulogne-Billancourt (Hauts-de-Seine)
Dirigeant : Fred Potter, 46 ans
Année de création : 2011
Effectif : 180 salariés
CA 2016 : NC

 
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