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[Tribune] Le bilan annuel de la sécurité routière : outil utile pour le chef d'entreprise ?

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[Tribune] Le bilan annuel de la sécurité routière : outil utile pour le chef d'entreprise ?
© sdecoret - Fotolia

Le bilan annuel de la sécurité routière apprend beaucoup de la manière dont les entreprises doivent protéger leurs salariés contre le risque d'accident de la route. Certains chiffres sont éloquents et peu connus des décideurs.

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S'il est bien un livre de chevet que je conseille à tout chef d'entreprise insomniaque, c'est le bilan annuel de la sécurité routière1 - on devrait plutôt dire "de l'insécurité routière" - établi par l'observatoire national interministériel de la sécurité routière (ONISR). Cet organisme au nom barbare est rattaché à la déléguée interministérielle de la sécurité routière (DISR), à qui revient la mission de "fabriquer le Code de la route". C'est elle qui débusque les niches où se dissimulent les principales causes des morts sur nos routes. À elle de trouver l'angle d'attaque le plus efficace pour faire baisser le nombre de blessés et de tués.

Cet ouvrage, qui fourmille d'informations méconnues, nous invite à méditer sur les données de l'année 2019 : le parc automobile français de 39 millions de véhicules, conduits par les 40 millions de titulaires de permis de conduire, génère 1,3 million d'accidents déclarés aux assurances, dont 56 000 corporels. Parmi ces accidents corporels, 3050 sont dits "mortels" et ont entraîné le décès de 3244 personnes.

La base statistique moyenne en métropole est de 50 morts pour un million d'habitants, mais monte à 92 en Outre-Mer. Mais il y a encore pire : entre 2015 et 2019, il valait mieux circuler dans les Hauts-de-Seine (17 tués par an pour un million d'habitants) que dans les Alpes-de-Haute-Provence (138 morts par an) !

À chaque accident corporel, la police ou la gendarmerie rédige une fiche BAAC qui permet d'établir le portrait-robot des auteurs présumés d'accident mortel (APAM).

700 000 morts depuis la seconde guerre mondiale

Un autre chiffre qui frappe le plus dans cette masse de données : depuis la fin de la deuxième guerre mondiale, ce sont presque 700 000 personnes qui sont mortes sur les routes de France. Une hécatombe !

En tant que chef d'entreprise, pour aller rapidement à l'essentiel, retenez que les trois principales causes de mort sur la route sont : la vitesse excessive ou inadaptée, l'usage d'alcool et/ou de stupéfiants, le non-respect des règles de priorité.

Entre 2015 et 2019, dans 41% des accidents mortels, il y a une vitesse excessive ou inadaptée. Vous comprenez pourquoi le législateur a autorisé la verbalisation "à la volée" de ces infractions par les agents qui n'arrivent pas à intercepter le chauffard. Retenez aussi que 67 % des décès interviennent alors qu'un conducteur ou un piéton était sous l'empire d'un état alcoolisé, ou sous influence des stupéfiants !

Sur ces 3244 décès, 1600 meurent dans des voitures, 650 sur des motos, le reste c'est 500 piétons, 200 cyclistes, une centaine en utilitaires et 40 en camion.

La moitié des personnes tuées lors d'un déplacement professionnel l'ont été à bord d'un poids lourd ou d'un véhicule utilitaire. Selon la nature de votre flotte, vous savez ce qu'il vous reste à faire !

Les hommes plus dangereux que les femmes

Autre conseil avisé : portez une attention particulière aux salariés masculins ! Sur 3244 personnes mortes dans un accident de la route en 2019, plus des trois quarts étaient des hommes. Voilà qui tord le cou à la boutade "femme au volant, la mort au tournant !" désormais hors d'âge et absolument pas vérifiée dans la vraie vie.

Neuf fois sur dix, quand un conducteur est alcoolisé dans un accident mortel, c'est un homme ! Au volant du véhicule, l'homme va prendre des risques dans sa conduite plus souvent que la femme, s'abstenir de respecter les règles de circulation (priorité, changement de files, dépassement dangereux, contresens, distances de sécurité). Un homme au volant prendra quatre fois plus de plaisir à transgresser la loi routière qu'une femme.

Quand il y a un accident corporel, les hommes jeunes commettent plus souvent une infraction (28%) que les femmes (24%). Mais, bizarrement, plus on monte en âge, et moins il y a de différence entre les deux sexes...

L'âge y fait beaucoup également : entre 18 et 24 ans, le taux de mort pour un million d'habitants est le double de la moyenne (106 au lieu de 50). Si vous confiez une voiture à une jeune recrue, il faut absolument lui expliquer qu'il est plus exposé qu'à son vieux collègue plus sage et plus apaisé sur la route. Si vous recrutez un jeune permis, sachez que lorsqu'un conducteur novice est tué, dans 80% des cas, il sera reconnu responsable de l'accident.

Incroyable, mais le passage à l'heure d'hiver a un effet notable sur les accidents : parce qu'on les voit moins bien le soir, quand on passe à l'heure d'hiver, il y a 42 % d'accidents impliquant un piéton en plus que durant l'été. Près de la moitié des piétons qui meurent sur nos routes perdent la vie entre octobre et janvier. Il est donc important de dire aux utilisateurs des véhicules de société qu'à partir d'octobre, il faut redoubler de vigilance vis-à-vis des piétons.

L'impact de la géographie sur la mortalité routière

A Paris et en petite couronne, le taux de mortalité est trois fois inférieur à la moyenne nationale, mais les piétons y sont en grand danger. La moitié des tués à Paris sont des piétons, alors qu'elle est de 15% en moyenne nationale. Les deux-roues, c'est un mort sur trois ! Les cyclistes, c'est 10% (le double de la moyenne nationale).

En revanche, si votre société est située dans un département rural peu dense, il faudra sensibiliser en priorité les conducteurs plus jeunes : le taux de mortalité des 18/24 ans y est le double de la moyenne nationale.

Sur 3244 décès, 2000 interviennent hors des agglomérations ! Vous comprenez pourquoi les spécialistes de la sécurité routière tiennent à faire baisser la vitesse à 80 km/h sur le réseau secondaire, lorsqu'il n'y a pas de glissières de sécurité. Quand la vitesse baisse, les morts baissent... Cette baisse à 80 km/h a fait baisser le coût des accidents de la route d'un milliard d'euros pour le pays.

Aussi incroyable que cela puisse paraître, l'apéro est devenu aussi un élément modérateur : dans les zones urbaines (mais pas hors agglomération), on constate un creux dans les accidents mortels entre 12h et 15h.

Si la trésorerie de votre société est un point sensible à vos yeux, vous serez sidéré d'apprendre que les accidents corporels ont coûté presque 40 milliards d'euros au pays en 2019 (c'est plus que les 37,5 milliards d'euros du budget des Armées), auxquels on ajoute 11 milliards d'euros pour les accidents matériels.

Si vos salariés fréquentent les autoroutes, c'est bien là qu'ils seront le plus en sécurité : 1,4 mort pour un milliard de kilomètres parcourus, alors que sur l'ensemble du réseau, on est à 5,2 morts (frontaux, pas de croisements).

Petit conseil à communiquer à vos salariés : sur autoroute, c'est le vendredi qu'il y a le plus d'accidents. Et on meurt plutôt la nuit, surtout si on est piéton : sur 47 piétons tués sur autoroute, 38 l'ont été de nuit. Il ne vous reste plus qu'à expliquer à vos collaborateurs que sur autoroute, la nuit, on se met tout de suite à l'abri en cas de panne...

Vous pourriez être tentés de leur fournir des trottinettes, mais alors, expliquez-leur bien qu'il ne faut pas les utiliser une fois la nuit tombée : 10 morts en trottinette en 2019, dont 9 hommes ! Huit ne portant pas de casque. Tous ont été tués entre 20h et 7h du matin.

Des chefs d'entreprise mobilisés

Les accidents de la route entraînent quatre millions de journées de travail perdues (16 000 ETP par an). En moyenne, c'est 77 jours d'arrêt par accident corporel, soit dix jours de plus que la moyenne des autres arrêts de travail.

Les entreprises ne restent pas inactives face à un tel fléau économique et social : si 55% des salariés ne savent pas que le risque routier est la première cause de mortalité au travail2 (sur les 1200 morts au travail chaque année, 600 sont tués sur les routes), les actions de prévention ou de sensibilisation routière qui sont organisées à leur intention sont importantes pour 77% d'entre eux, et ils plébiscitent les formations e-learning pour leur efficacité. Les patrons, surtout les jeunes dirigeants, sont d'ailleurs très impliqués et assument leur responsabilité quand on les interroge sur ces sujets.

Mais vous serez surpris d'apprendre que selon le baromètre Vinci autoroute, 70 % des conducteurs reconnaissent insulter les autres usagers, 60 % klaxonner de manière intempestive et 16% descendre de leur voiture pour aller s'expliquer avec l'autre conducteur. On croit rêver !

Pourtant les sanctions tombent : près de 260 000 condamnations et compostions pénales, c'est plus de 40% du travail de la justice en France. Et seuls 3% des dossiers ont été classés pour cause d'auteur inconnu.

Pour en savoir plus


Olivier Bonnefond, créateur de assistancepv.fr




1) https://www.onisr.securite-routiere.gouv.fr/etat-de-l-insecurite-routiere/bilans-annuels-de-la-securite-routiere/bilan-2019-de-la-securite-routiere
2) Sondage IFOP pour MMA "les professionnels et la route; quelle connaissance du risque routier de leurs salariés ?" avril 2019


 
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