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[Interview] Benoist Grossmann (France Digitale) : " Entrepreneurs et investisseurs : c'est une séduction réciproque "

Publié par Céline Tridon le | Mis à jour le
[Interview] Benoist Grossmann (France Digitale) : ' Entrepreneurs et investisseurs : c'est une séduction réciproque '

Alors que la 9e édition de France Digitale Day se tient mercredi 22 septembre 2021, le coprésident de l'organisation Benoist Grossmann revient sur la relation entre entrepreneurs et investisseurs. Comment doit-elle se construire ? Qu'est-ce qui fait la différence ? Explications.

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Si l'on parle investissement, quel est le contexte actuel ?

L'investissement en France est très dynamique, grâce à l'écosystème entrepreneurial qui se porte bien. Il y a de beaux profils d'entrepreneurs et on commence même à voir de plus en plus de serial entrepreneurs. Après tout, ces derniers constituent le coeur de la Silicon Valley : ce sont des personnes qui entreprennent pour la deuxième ou troisième fois et qui progressent, deviennent meilleures à chaque fois.

Grâce à cet écosystème qui gagne en qualité, il y a plus d'investisseurs qu'auparavant (fonds seed, business angels, des investisseurs en série A, série B ou série C et même des journalistes qui s'intéressent au secteur).

S'agit-il d'une dynamique qui est boostée par le numérique ?

Aujourd'hui en effet tout tourne autour du numérique. En ce sens, la Covid a été un formidable accélérateur de la digitalisation de l'économie. Les experts s'accordent à dire que l'on a gagné deux ans dans les efforts des sociétés en matière de numérique.

98 % des start-up créées proviennent du digital, qui n'est pas très capitalistique.

Cela est-il donc plus facile pour se lancer et créer son entreprise ?

Dans ce contexte, vous avez besoin de très peu d'argent pour créer un Poc (proof of concept). Se lancer dans l'industrie de semi-conducteurs ou de la santé, par exemple, nécessite plusieurs millions d'euros. Une entreprise dans le digital, elle, peut démarrer avec 500 000 ou 1 million d'euros. Il suffit de voir comment se comporte le business et s'il marche bien, il est possible alors de lever davantage d'argent.

L'autre atout du digital est que l'on peut pivoter facilement et réorienter l'entreprise sur un nouveau secteur d'activité. Souvent, le test marché est une étape rapide qui permet de se rendre compte au bout de quelques jours si l'idée trouve ses clients, ou pas. Toutefois, lever de l'argent n'est jamais simple.

Qu'est-ce qui permettra justement à un entrepreneur de convaincre des investisseurs ?

La qualité de l'équipe dirigeante : son 'drive', sa vision, sa capacité à savoir s'entourer.

Détecter les bonnes équipes, c'est un peu comme un métier de recruteur : ce n'est pas une science exacte. Parfois, le recruteur choisit le bon candidat, parfois il fait des erreurs de casting. Pour un investisseur, c'est pareil.

Cela signifie-t-il que vous fonctionnez au feeling ?

Le feeling repose uniquement sur l'estimation des qualités entrepreneuriales. C'est pourquoi il faut aussi regarder les marchés dans lesquels l'entreprise veut évoluer, étudier la concurrence. Quand il s'agit de soutenir de jeunes entreprises en cours de création, il y a peu d'historique sur lequel s'appuyer. Il faut donc réfléchir à son éventuel futur et pour cela, il s'agit d'analyser son marché sur les trois prochaines années.

Une entreprise qui mise sur l'impact positif a-t-elle davantage de chance de séduire les investisseurs ?

Selon moi, l'impact est comme l'ESG (NDLR : des critères environnementaux, sociaux et de gouvernance) : il est partout. J'aime bien investir dans les entreprises dont j'apprécie les fondateurs, leur parcours, leur diversité. Et bien sûr, je préfère investir dans une entreprise qui a un impact positif sur l'environnement que dans une qui n'en a aucun, mais ce n'est pas l'unique critère que je vais prendre en compte.

Je veille aussi à ce que le business soit bon pour la communauté.

Quel conseil donner à une start-up qui veut solliciter des investisseurs ?

Il faut garder en tête que c'est une séduction réciproque : lorsqu'ils se rencontrent, l'investisseur doit être séduit par l'entrepreneur et l'entrepreneur séduit par l'investisseur. Car il ne faut pas oublier qu'un porteur de projet peut lui aussi choisir entre deux investisseurs. Il retiendra celui avec lequel il a le plus d'affinités. La réputation dont bénéficie un VC joue aussi.

Enfin, les deux parties doivent être honnêtes l'une envers l'autre et établir des liens naturels. C'est une aventure humaine avant tout.

Le rôle du VC ne se limite d'ailleurs pas au simple financement ?

Il a en effet un rôle d'accompagnateur. Il est présent auprès de l'entreprise pour une période qui va en général de cinq à huit ans. Un laps de temps pendant lequel investisseur et entrepreneur se rencontreront trois heures tous les deux mois environ. Cela fait beaucoup de temps passé ensemble !

Avec le dirigeant, nous allons travailler à la structuration de l'entreprise, à savoir l'aider à recruter les bons profils, le faire rencontrer des clients ou d'autres investisseurs pour les prochains tours de financement. Nous faisons part de notre réseau et de notre expérience.

Mais il n'y a pas de recette magique pour autant ?

J'ai financé un certain nombre d'entreprises et je ne sais toujours pas ce qu'il faut faire pour qu'une société marche bien ! En revanche, je sais ce qu'il ne faut pas faire, ce qui statistiquement aidera la start-up à grandir.

C'est-à-dire ?

Le plus souvent, on se trompe sur les personnes. Un autre écueil est de minimiser la concurrence. Beaucoup d'entrepreneurs viennent me voir en m'assurant que Google ou Apple c'est fini ! Or il ne faut jamais sous-estimer ce que font les autres entreprises ! Il faut conserver une vision réaliste de son projet. Créer une entreprise fait avant tout appel au pragmatisme.

Cette dynamique que vous abordez ci-dessus se poursuivra-t-elle selon vous ?

Je pense qu'elle est là pour quelques temps encore ! Elle répond à de vrais besoins donc elle ne va pas s'arrêter du jour au lendemain. Tous les indicateurs sont au vert : il y a de plus en plus d'entrepreneurs, les entreprisses grandissent, il y a de l'argent sur le marché...

Cela est-il propre à la France ?

La France a su développer un véritable écosystème, qui ne se retrouve pas forcément ailleurs en Europe. Elle est le pays qui investit le plus, juste derrière le Royaume-Uni qui bénéficiera toujours des retombées de ses relations avec les Américains.

Mais nous, nous avons la chance d'avoir de vrais soutiens à l'innovation comme la BPI et des actions politiques qui soutiennent le business, notamment celui des start-up. Espérons que cela se poursuive au-delà des élections présidentielles de 2022 !

Benoist Grossmann est CEO d'Eurazeo Investment Manager, Managing Partner Venture & Growth. Co-président de France Digitale, il occupe également un poste d'administrateur au conseil d'administration du Centre National d'Etudes Spatiales. Il est membre de l'advisory board de Facebook France et du comité innovation de Bpifrance. Il siège actuellement aux conseils d'Ogury, Molotov, SpaceCargo et Frichti, et précédemment à ceux de Criteo, Dailymotion, Deezer et Meetic.

 
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