Tout savoir sur le port du masque obligatoire en entreprise
Depuis l'annonce du 18 septembre, nous attendions le nouveau protocole définissant les contours de l'obligation du port du masque en entreprise. C'est chose faite avec la publication tardive le 31 août 2020 du protocole sanitaire.
Je m'abonneDernière mise à jour : 31/08/2020
L'obligation du port du masque est désormais consignée dans un nouveau protocole intitulé "Protocole national pour assurer la santé et la sécurité des travailleurs face à l'épidémie de Covid-19".
Cette nouvelle version du protocole a été publiée tardivement lundi 31 août 2020, à quelques heures de son entrée en vigueur. Le moins que l'on puisse dire est que cette version, qui a vocation à remplacer l'ancien protocole national de déconfinement en ligne jusqu'alors, est autrement plus complexe que le projet précédemment publié le 20 août.
Bien que le Ministère ait pris le soin de préciser que la mise en oeuvre par les entreprises serait progressive, il s'agit d'un nouveau texte susceptible de désemparer certains employeurs. Explications.
Le principe : le port du masque dans les lieux collectifs clos, associé aux autres gestes barrières
Le port du masque est désormais systématique au sein des entreprises dans les lieux collectifs clos.
Le texte indique que le masque doit néanmoins être associé au respect d'une distance physique d'au moins un mètre entre les personnes, de l'hygiène des mains, des gestes barrières, ainsi que du nettoyage, de la ventilation, de l'aération des locaux et la gestion des flux de personnes.
Outre les lieux collectifs clos, le protocole rappelle que le port du masque s'impose dans certains lieux recevant du public listés par Décret, le préfet dans chaque département pouvant, si cela s'avère nécessaire au niveau local, le rendre obligatoire dans d'autres lieux que ceux listés.
Des masques grand public, de préférence réutilisables et répondant à des spécifications particulières
Le Gouvernement se positionne de manière plus ferme sur le type de masque à privilégier : le masque " grand public " et en tissu doit être privilégié, lorsque l'activité de l'entreprise n'impose pas le choix d'un type précis de masque ou dès lors qu'il ne s'agit pas de personnes " à risques " devant impérativement porter le masque chirurgical.
Attention, ces masques doivent néanmoins répondre à des spécifications particulières : ils doivent respecter la norme Afnor S76-001 ou équivalente et porter un logo spécifique sur leur emballage.
Pour rappel, c'est donc aux employeurs de fournir les masques nécessaires et en quantité suffisante à leurs collaborateurs. En cas de fourniture de masques lavables, et en application des dispositions du Code du travail, ce sera donc à également à l'employeur de s'assurer de leur entretien. Comme pour les autres EPI, il devrait être néanmoins toujours possible de verser une indemnité mensuelle destinée à compenser l'entretien de ses masques par chaque salarié.
Des adaptations possibles selon les activités ou le secteur professionnel
Le nouveau protocole précise que des adaptations peuvent être envisagées par les entreprises pour répondre à la spécificité de certaines activités ou secteurs professionnels après :
- Avoir mené une analyse des risques de transmission du Covid-19 et des dispositifs de prévention à mettre en oeuvre
- Avoir échangé avec le personnel ou leurs représentants.
Les mesures conditionnant la possibilité d'organiser ces adaptations dépendront du niveau de circulation du virus dans le département d'implantation de l'entreprise (ou de l'établissement) selon des modalités présentées en annexe 4 du protocole, qui distingue les départements en 3 niveaux allant du plus faible niveau de circulation du virus (niveau 1 ou zone verte) au plus fort (niveau 3 ou zone rouge). Le taux d'incidence est publié par Santé Publique France chaque semaine pour une application tous les lundis.
En clair, le taux d'incidence permettra aux entreprises de savoir si elles peuvent mettre en place des mesures de retrait temporaire du masque à certains moments de la journée et selon quelles modalités. Plus le niveau de circulation est élevé et plus le retrait du masque devra être compensé par des mesures protectrices.
Par exemple, pour une mesure de retrait temporaire du masque en zone verte, l'entreprise devra s'assurer de remplir les conditions suivantes : ventilation/aération fonctionnelle et bénéficiant d'une maintenance ; existence d'écrans de protection entre les postes de travail ; mise à disposition des salariés de visières ; mise en oeuvre d'une politique de prévention avec notamment la définition d'un référent Covid-19 et une procédure de gestion rapide des cas de personnes symptomatiques.
Les entreprises en zone orange devront respecter ces conditions et auront l'obligation de limiter les dérogations de port du masque aux locaux de grand volume et disposant d'une extraction d'air haute, et les entreprises en zone rouge devront respecter l'ensemble des conditions précédentes et justifier d'une ventilation mécanique et d'un espace de 4 m² par personne.
Ainsi, dans les cas où la dérogation est possible, le salarié qui est son poste de travail pourra " ranger son masque à certains moments de la journée et continuer son activité ", selon le nouveau protocole (sans pour autant le retirer toute la journée). Aucune indication n'est malheureusement fournie sur la durée de cette dérogation qui devra être cadrée par l'entreprise, et contrôler pour éviter tout risque de contestation en cas de contamination décelée dans ses locaux.
Autres adaptations envisageables
Le protocole liste enfin quelques situations particulières permettant de déroger au port du masque en entreprise.
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Ainsi, comme cela avait été évoqué précédemment, les bureaux individuels ne seront (logiquement) pas concernés par cette mesure - dès lors qu'une seule personne y serait présente.
Dans les ateliers, il sera aussi possible de ne pas porter le masque dès lors que les conditions de ventilation / aération fonctionnelles sont conformes à la réglementation, que le nombre de personnes présentes dans la zone de travail est limité, que ces personnes respectent la plus grande distance possible entre elles, y compris dans leurs déplacements, et portent une visière.
En extérieur, le port du masque sera nécessaire en cas de regroupement ou d'incapacité de respecter la distance d'un mètre entre chaque personne et dans les véhicules, le port du masque sera obligatoire si plusieurs personnes sont à bord.
Informer les représentants du personnel ainsi que l'ensemble des salariés
Le nouveau protocole rappelle que les mesures de protection concernant les salariés ou " toute personne entrant sur le lieu de travail " sont diffusées auprès des salariés par note de service après avoir fait l'objet d'une présentation du comité social et économique.
Contrairement au projet qui avait été présenté le 20 août, désormais le protocole indique simplement que ces règles peuvent être intégrées dans le règlement intérieur de l'entreprise. Quoi qu'il en soit, les employeurs auront tout intérêt à respecter le formalisme de mise en place ou de modification du règlement intérieur, y compris en cas de rédaction d'une " simple " note de service (au besoin par la procédure d'application immédiate prévue par l'article L.1321-5 du Code du travail), afin de s'assurer de la valeur contraignante du document en cas d'engagement d'une procédure disciplinaire sur ce fondement.
De cette façon, tout collaborateur récalcitrant pourra faire l'objet de sanctions dès lors qu'il refuserait de porter son masque dans les locaux de l'entreprise.
La formation des salariés sera inévitablement un point important de futurs dossiers contentieux : le salarié avait-il connaissance des gestes à respecter dans l'entreprise pour que le port du masque soit efficient ? Avait-il été formé ou informé du moment où mettre son masque et où le retirer, ou encore de la manière dont il devait le manipuler et l'entretenir ? Autant de questions à ne pas négliger et auxquelles les employeurs devront très certainement répondre.
Un document obligatoire pour l'employeur
Rappelons que le protocole sanitaire est un document qui, même s'il n'a pas valeur législative, est considéré comme étant obligatoire pour les entreprises.
Dès lors, tout employeur qui contreviendrait à ses dispositions s'exposerait au risque d'être appréhendé notamment par l'Inspecteur du travail, qui dispose du pouvoir de contrôler le respect des mesures en matière d'hygiène et de sécurité et d'établir des procès-verbaux d'infraction.
L'employeur qui ne respecterait pas les nouvelles dispositions pourrait également voir sa responsabilité engagée par des salariés sur le fondement de son obligation d'assurer la sécurité et la santé physique et mentale des travailleurs (voire pourrait faire l'objet d'actions en faute inexcusable en cas d'accident du travail ou de maladie professionnelle, action aux lourdes conséquences financières potentielles).
À défaut d'avoir mis en place le télétravail à 100% - qui fait de nouveau partie des pratiques recommandées par le Gouvernement - les employeurs doivent dès lors très vite se pencher sur ce nouveau texte afin d'en intégrer les dispositions à leurs pratiques quotidiennes.
Pour en savoir plus
Anne Leleu-Eté, associé fondateur du cabinet Axel Avocats, dédié au droit du travail et de la sécurité sociale. Axel Avocats conseille des entreprises, TPE et PME françaises et étrangères, de tous secteurs. Pour ses clients, le Cabinet intervient tant en conseil quotidien en matière de gestion du personnel et de représentants du personnel que sur des dossiers plus ponctuels tels que restructurations, audits, contrôles URSSAF, détachement/expatriation, sous-traitance, etc.