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Marchés publics : comment y accéder ?

Publié par Céline Tridon le - mis à jour à
Marchés publics : comment y accéder ?
© momius - Fotolia

Malgré des procédures simplifiées, les PME peinent à se tourner vers la commande publique. En cause : un système encore trop complexe. Si l'accès à une information plus claire est nécessaire, les PME doivent aussi savoir appréhender la sphère publique avec une vraie stratégie commerciale.

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75 milliards d'euros, tel est le montant des commandes du secteur public en France. Un marché qui pourrait sembler juteux pour les PME. La réalité est toute autre. " Les commandes publiques devraient irriguer les territoires et les PME, mais ce n'est pas le cas. La part des PME dans ce domaine doit nous questionner ", soulève Pierre Pelouzet, Médiateur des entreprises. En effet, entre 2014 et 2017, l'importance des PME dans la commande publique a diminué : elle est passée de 62 à 57,5% en nombre de contrats et de 33 à 29,4% des montants, d'après les chiffres de l'Observatoire économique de la commande publique. Les raisons de cette défaveur sont multiples. La principale réside dans le flou qui entoure ces marchés. " Souvent, le dirigeant de PME n'y comprend rien. Aujourd'hui, il y a encore beaucoup de termes à démystifier pour qu'il ait moins peur ", commente Pierre Pelouzet. Pour l'aider à s'y repérer, le Médiateur a annoncé la sortie d'un guide pratique " Chefs d'entreprise, Osez la commande publique ". Ce document revient sur toutes les étapes de la commande publique. Il est disponible en téléchargement gratuit sur le site du ministère de l'Economie et s'inscrit dans une dynamique générale de simplification, y compris de la part du gouvernement.

En effet, depuis le déploiement du nouveau Code de la fonction publique en 2016, l'Etat semble plutôt enclin aux coups de pouce. Par exemple, les PME qui remportent un appel d'offre public disposent d'une avance minimale de 20 % au lieu de 5 % auparavant. De même, l'acteur public n'appliquera une retenue de " garantie " que de 3 % maximum (au lieu de 5 % jusqu'alors). Le projet de loi Pacte, de son côté, prévoit la suppression des ordres de services à zéro euro, une mauvaise pratique des acheteurs qui consistait à ne pas rémunérer une prestation non prévue au contrat. L' " affacturage inversé collaboratif " est lui valorisé, permettant ainsi d'améliorer la trésorerie des PME, puisque ce dispositif repose sur un mécanisme qui doit garantir un paiement à échéance des factures.

Réaliser un ciblage commercial

Enfin, le nouveau cadre légal oblige les acheteurs à découper leur offre en lots accessibles aux PME : c'est ce qu'on appelle l'allotissement. Les gros répondants peuvent ainsi se tourner vers les TPE et PME pour en faire leurs sous-traitants. " La problématique est de faire descendre l'information auprès de nos entreprises, que ce soit au titre de nos fédérations professionnelles ou au titre de nos adhérents, souligne Frédéric Grivot, vice-président de la CPME et président du groupe de travail 'Marchés publics' de l'association. Les PME ne doivent pas hésiter à solliciter les donneurs d'ordre et à demander de participer au sourcing. En somme, il y a une approche technique qui fait défaut et qu'il faut développer auprès de tous les acteurs qu'ils soient privés ou publics. " Autre souhait de la CPME : que la notion de massification soit réellement prise en compte, afin de laisser davantage de temps aux PME de se constituer en groupement. " C'est quelque chose de difficile à mettre en oeuvre, le temps de réponse proposé lors des appels d'offres étant assez court. Donc cela a tendance à exclure rapidement les PME ", estime le vice-président de la CPME. D'où l'importance de constituer des groupements en amont des appels d'offres.

Aurélien Tourret est co-fondateur du cabinet de conseil spécialisé dans les marchés publics, Canéva. Pour lui, il faut aussi que les PME changent de perception face à la commande publique : cette dernière doit être envisagée comme un choix stratégique. " Répondre à un marché public, c'est avant tout une démarche commerciale, même s'il y a un cadre juridique, réglementaire, administratif, explique Aurélien Tourret. A chaque entreprise de comprendre à qui elle a affaire, comment elle peut l'atteindre, dans quel contexte, etc. "

Il ne faut pas non plus sous-estimer la variété des secteurs présents dans le public. Une entreprise peut être amenée à échanger aussi bien avec l'intendant d'un collège dans une zone rurale qu'avec l'un des services centraux de l'Etat. Il y a une variété de cibles et d'établissements avec chacun leur spécificité et une foule d'interlocuteurs, d'où la nécessité de bien s'informer en amont. " De même, on peut avoir à échanger avec une entreprise publique, comme la Monnaie de Paris par exemple, avec une logique économique derrière ou avec une grande municipalité aux enjeux politiques forts, cite pour exemple Aurélien Tourret. Les entreprises ont accès à beaucoup d'opportunités, voire même peut-être un peu trop. Elles ne doivent donc pas oublier de procéder à un ciblage commercial et d'adapter leur offre en fonction des segments à atteindre. "

Des initiatives pour aider les PME

L'expert rappelle également que " le secteur public a des obligations et la PME a des droits ". En effet, l'ensemble des contrats doivent respecter l'article Premier du Code de la commande publique, à savoir la liberté d'accès à la commande publique, qui ne va pas sans une certaine égalité de traitement des candidats et une transparence des procédures. " L'entreprise a donc vraiment la latitude suffisante pour questionner l'acheteur, lui demander des informations pertinentes, l'inciter à mieux comprendre sa demande ", insiste Aurélien Tourret. Reste à ce que les PME franchissent le pas... " Dans une enquête réalisée par la CPME, nous nous sommes rendus compte que seules 30 % de nos entreprises vont sur les marchés publics. Un certain nombre de chefs d'entreprise ne se sentent pas concernés. Ils ont le sentiment que c'est souvent acté avant même d'avoir été candidat à l'appel d'offre. Enfin, ils doivent faire face à une certaine complexité car il y a à l'heure actuelle 1600 plateformes de commande publiques ", ajoute Frédéric Grivot. Pour faire en sorte que PME et secteur public se rapprochent, des initiatives émergent un peu partout dans l'Hexagone. En Bretagne, par exemple, l'association Breizh Small Business Act prend soin de sensibiliser les patrons de PME à aller à la commande publique, en favorisant les mises en relation avec les collectivités locales. A Paris, la CCI Paris Ile-de-France a mis sur pied un programme d'accompagnement pour les TPE-PME désireuses de participer au projet du Grand Paris, le CCI Business Grand Paris. Enfin, pour Frédéric Grivot, rien de tel que le partage d'expérience... positive. " Les success stories au niveau d'un territoire est ce qu'il y a de plus valorisant pour inciter les PME à aller aux marchés publics ", promet-il.

Témoignage

" Un cabinet externe réalise nos réponses aux appels d'offre "
Patrick Poirier, gérant de CKFD Environnement

CKFD Environnement est un gestionnaire de déchets avec collecte dans les bâtiments et en pied d'immeuble. Le marché public représente 15 à 20 % de son chiffre d'affaires. Et d'année en année, Patrick Poirier, gérant de CKFD, constate qu'il perd des marchés. " De manière candide, nous nous sommes aperçus que les procédures de commandes publiques avaient énormément évolué et s'étaient, au final, complexifiées. Par exemple, notre activité est trop fine pour pouvoir être correctement codifiée dans les marchés publics ", partage-t-il. Patrick Poirier décide de réagir et sollicite pour cela l'aide de la CCI Business Grand Paris. Il suit une formation, en espérant mieux comprendre les différentes procédures. Son constat ne se fait pas attendre : " A l'issue de cette formation, nous avons convenu que nous n'avions pas les compétences en interne pour aller à la commande publique. Donc, nous avons fait appel à un cabinet extérieur qui écrit pour nous les réponses que nous envoyons aux marchés publics ", complète-t-il. Pour compenser cette perte des marchés publics, CKFD a travaillé sur une innovation concernant le recyclage des mégots de cigarette. L'entreprise a ainsi séduit de nouveaux partenaires comme le ministère des Finances et l'Assemblée Nationale.

CKFD
Activité : Gestion des déchets
Gennevilliers (Hauts-de-Seine)
Dirigeants : Patrick Poirier, gérant, 49 ans et Christophe Kukawka, gérant, 52 ans
SARL
Création en 2007
Effectif : 8 salariés
CA 2018 : 1 M€

Dématérialisation obligatoire

Depuis le 1er octobre 2018, la dématérialisation de la commande publique concerne toutes les procédures d'achat à partir de 25 000 € hors taxe. Cela comprend la mise à disposition des documents de consultation, la transmission des candidatures et des offres, les échanges entre entreprises et donneurs d'ordre et les notifications de décisions. L'ensemble de la procédure devra s'effectuer via une plateforme d'achat dématérialisée, appelée " profil d'acheteur ", mise à disposition des entreprises candidates. A ce jour plus de 1600 plateformes de ce type existent... De même, la signature électronique, notamment, peut être proposée ou imposée par l'acheteur. Elle a pour but de garantir l'intégrité du document et l'identité du signataire. Pour signer électroniquement, il est nécessaire d'acheter un certificat auprès d'un prestataire qualifié. Ce genre de certificat est valable de 1 à 3 ans. Enfin, même les factures doivent être entièrement dématérialisées via le portail Chorus Pro. Mis en place progressivement, ce système est obligatoire pour les PME depuis le 1er janvier 2019.

 
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