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Le TCO des véhicules électriques est-il compétitif pour les PME ?

Publié par Jean-Philippe Arrouet le - mis à jour à
Le TCO des véhicules électriques est-il compétitif pour les PME ?

Au-delà de l'image de marque, le véhicule électrique est tenu d'être rentable. Toute comparaison avec des modèles thermiques doit donc reposer sur une décomposition du TCO intégrant l'ensemble des coûts.

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Avec 5 243 unités écoulées au cours du premier semestre 2017, le marché du véhicule électrique en entreprises est toujours infime. Il représente 1,3 % des immatriculations selon l'Observatoire du véhicule d'entreprise (OVE). Autonomie trop faible, prix d'achat élevé, valeur résiduelle incertaine sont des griefs connus mais qui ne condamnent pourtant pas nécessairement ces modèles face à leurs équivalents thermiques. Selon les lois de roulage et les conditions d'utilisation choisies, ou encore le mode de détention de la batterie, le TCO des véhicules électriques peut s'avérer plus ou moins compétitif.

Premier exemple avec une Renault Zoe qu'une entreprise louerait sur 48 mois pour 60 000 km. Son prix de revient kilométrique (PRK) serait de 0,41 euro, se rapprochant de celui des Clio essence (0,38 euro) et diesel (0,38 euro), mais sans les égaler. Explication : malgré le bonus écologique de 6 000 euros, la citadine électrique se trouve pénalisée par le coût de la location de ses batteries (soit plus de 4 700 euros sur la durée du contrat).

En revanche, le même type de comparaison réalisé avec la Volkswagen Golf donne des résultats inverses. Affichant un PRK de 0,56 euro, l'E-Golf fait mieux que ses jumelles essence (0,639 euro), diesel (0,660 euro) et hybride (0,681 euro). L'explication est à rechercher dans la loi de finances 2017 : en relevant à 30 000 euros les plafonds d'amortissement dont peuvent bénéficier les entreprises pour les véhicules émettant moins de 20 g de CO2/km, elle favorise clairement l'acquisition des véhicules électriques les plus onéreux. D'où, dans le cas de la Golf, un PRK plus favorable, même face à une version diesel pourtant moins chère de 5 000 euros.

Faire baisser les coûts

Le prix d'achat des véhicules électriques constitue une première composante à optimiser. L'évolution des technologies et l'absence de recul sur le fonctionnement du marché de l'occasion a rendu les loueurs longue durée prudents. En calculant des valeurs résiduelles modérées à la baisse pour couvrir un risque moins bien maîtrisé à la revente, les loyers proposés demeurent élevés. C'est pourquoi des formules d'acquisition telles que le buy-back présentent un intérêt pour ce type de motorisation.

C'est le montage qu'a choisi La Poste pour sa flotte qui compte 7 000 Kangoo ZE. L'établissement les loue à Véhiposte, une filiale du groupe qui les acquiert en buy-back. Seules les batteries sont louées à Renault. Autre solution, dans le cadre de la location, l'allongement de la durée du contrat, qui permet de mieux lisser l'amortissement du véhicule. " Nous allongeons les contrats au-delà de 48 mois, souvent à 60 mois, pour ce type de véhicules " , préconise Sylvie Deneu, directrice associée de Cosma Experts, spécialisé dans l'optimisation des coûts. " Le premier obstacle à l'optimisation de son TCO serait de ne pas faire rouler un véhicule électrique ", affirme pour sa part Adeline Gogé-Lefaivre, directrice marketing et communication de Bemobi.

Cette entreprise a récemment intégré Greenovia, qui a coordonné un projet de recherche sur le VE baptisé Infini Drive. Conduit entre 2012 et 2014 à partir des flottes d'ERDF et de La Poste, il a permis de rentrer dans le détail de la performance économique des VE. " Leur TCO se compose de deux tiers de coûts fixes et d'un tiers de coûts variables, soit l'inverse des véhicules thermiques ", analyse Adeline Gogé-Lefaivre. Autrement dit, plus un véhicule électrique roule, plus son TCO devient compétitif.

Cependant, l'exercice se heurte à l'autonomie des batteries. " Pour des gros rouleurs, l'électrique n'est pas la solution, avertit Sylvie Deneu. Nous allons plutôt travailler sur de l'utilitaire avec des parcours plus limités. Le levier le plus important reste d'adapter l'usage du véhicule à la spécificité de l'électrique. Plus l'usage sera intensifié, plus le gain en TCO sera important. "

Adapté aux tournées denses

Dans son analyse, Infini Drive montre que, dans le cadre de tournées optimisées, plus un véhicule thermique roule, plus son TCO se dégrade, alors que ce n'est quasiment pas le cas pour l'électrique. "Le seuil de rentabilité de l'électrique est voisin de 15 000 km par an, mais ce point d'équilibre peut varier selon l'évolution du prix du baril de pétrole ", souligne Adeline Gogé-Lefaivre. Exemple à La Poste où les véhicules chargés de distribuer le courrier parcourent peu de distance, mais s'arrêtent plusieurs centaines de fois.

"Dans une logique économique, nous affectons les Kangoo ZE à des tournées d'une soixantaine de kilomètres car, pour ces faibles kilométrages, le recours au thermique n'est pas rentable ", affirme Maud Marchand, responsable du domaine ingénierie de la distribution et des véhicules à la direction technique de la branche courrier et colis.

Un bon moyen d'optimiser son TCO flotte consiste à combiner des motorisations thermiques et électriques en fonction des usages. C'est ce que se propose d'étudier Antsway. Cette start-up a développé un algorithme d'optimisation qui permet de rentabiliser des tournées en dimensionnant le nombre de véhicules électriques susceptibles d'être intégrés dans une flotte. "Pour notre analyse, nous prenons en compte des éléments tels que les températures extérieures, la topographie ou encore le planning de recharge de la veille pour éviter les pics d'appel de puissance susceptibles de dégrader la compétitivité des véhicules électriques ", explique Marc Grojean, directeur général d'Antsway.


Contraintes externes

Cependant, l'analyse par le TCO rencontre certaines limites. D'une part, la question de l'investissement dans des infrastructures de recharge et son intégration dans le calcul peut faire pencher la balance dans un sens ou dans l'autre. La Poste a par exemple choisi d'investir dans des bornes de charge en décorrélant cette dépense du calcul du TCO puisqu'elle considère que les infrastructures pourront continuer à être utilisées après le remplacement de la génération actuelle de ses Kangoo ZE.

D'autre part, le calcul économique du TCO ne peut suffire à guider le choix de l'entreprise dans tous les cas. Ainsi, lorsqu'il faut s'équiper de gros fourgons, l'offre thermique domine le marché, même si Renault vient d'y introduire une brèche avec son Master ZE (jusqu'à 22 m3). Cependant, son autonomie limitée à 200 km NEDC le cantonne à des usages ciblés. Mais là encore, une évolution favorable de la fiscalité, sur le véhicule électrique comme sur les carburants, pourrait rebattre les cartes à partir de 2018.

Témoignage

"Notre TCO est identique à celui des modèles diesel"

Loïc Péquignot, président d'Energy Dynamics

Avec leur livrée bleue à toit blanc, impossible de rater les Kia Soul EV qui trônent sur le parking d'Energy Dynamics (Endy). Cette PME, qui compte 120 techniciens se déplaçant en Île-de-France pour des installations électriques et autant de véhicules en parc, vient d'en intégrer une dizaine aux côtés de ses Renault Kangoo et Peugeot Partner diesel. Un choix d'image, mais qui ne s'est pas fait au détriment des réalités économiques et des contraintes métier. "Nos techniciens parcourent entre 50 et 80 km par jour, or ils étaient stressés par l'autonomie du véhicule électrique et la crainte de tomber en panne ", confie Loïc Péquignot, président du groupe Bugbusters, auquel appartient Endy.

Pour cette raison, l'entreprise a d'abord testé les Kangoo ZE, dont l'autonomie mesurée en conditions réelles d'exploitation était trop proche de la limite. Quand le constructeur coréen Kia lui a proposé la Soul EV, avec une autonomie affichée de 250 km, Loïc Péquignot a de nouveau accepté de tester. "Avec la climatisation en marche et une utilisation normale, nous faisions 160 km sans recharger ", résume-t-il. En outre, ces crossovers urbains offrent une image attractive de cette jeune entreprise, justement spécialisée dans les équipements électriques de pointe.

Un obstacle concernait cependant le TCO de ces véhicules comparé aux modèles diesel déjà en service. Avec l'offre de location longue durée proposée par Kia Lease à 320 euros, entretien et assurances comprises, le TCO s'élève à 340 euros mensuels, soit un coût presque équivalent en tenant compte des économies réalisées sur le poste carburant (160 euros par mois).

Certes, l'entreprise a investi dans des bornes sur ses trois sites franciliens, pour un montant de 2 000 euros pièce en effectuant l'installation elle-même. Mais elle devrait toucher une prime de 1 000 euros de l'Ademe. Reste une inconnue, qui devrait jouer en faveur de l'élec­trique : les coûts de maintenance prévisionnels, revus à la baisse. Seul bémol, cet équilibre éco­nomique n'est pas transposable à des régions moins denses.

Energy Dynamics

Activité : Déploiement d'objets connectés
Ville : Boulogne-Billancourt (Hauts-de-Seine)
Dirigeant : Loïc Péquignot, 47 ans
Forme juridique : SAS
Effectif : 180 salariés
CA 2016 : 8 M€ (env.)

 
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