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Pour ou contre la pointeuse ?

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Si la pointeuse facilite le travail du service des ressources humaines, elle peut être perçue par les collaborateurs comme un outil de "flicage". Que faut-il penser de ce système qui contrôle les heures d'arrivée et de départ des salariés ?

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Le temps, c'est de l'argent. Cet adage n'a jamais été aussi vrai. Preuve en est le contrôle accru des horaires de travail dans les entreprises. Selon la dernière étude sur les conditions de travail de la Dares, le service statistique du ministère de l'Emploi, la part des salariés dont les horaires sont contrôlés a augmenté, passant de 44,5 % en 1998 à 48 % en 2005, dont 21 % via la pointeuse. Soit une hausse de 4,5 points par rapport à 1998.

Toutes les catégories sont concernées, en premier lieu les ouvriers : plus de 30 % d'entre eux ont pointé en 2005 contre 24 % en 1998. Ce système de contrôle s'appliquait même à 9,5 % des cadres en 2005, contre 7% cinq ans plus tôt. La raison ? Automatiser le contrôle des horaires offre une plus grande fiabilité, tout en optimisant le travail du comptable. « Ce système permet aussi de mieux appréhender la productivité des salariés », souligne Michel Farcy, directeur associé du cabinet de conseil en management Reor. Par exemple, en tenant compte du temps passé par les ouvriers sur leur poste de travail et du nombre de pièces fabriquées, il est assez facile de calculer la productivité par poste. Cependant, l'expert met en garde contre une "démission" du management. En effet, l'encadrement pourrait être tenté d'alléger sa présence auprès de ses collaborateurs et se contenter de vérifier leurs horaires. Avant d'installer une pointeuse ou une badgeuse, le dirigeant doit consulter les représentants du personnel, même si leur accord n'est pas nécessaire. Si ce changement ne nécessite pas la signature d'un avenant au contrat de travail, les salariés doivent en être informés le mois précédant sa mise en place, par exemple par le biais d'un courrier adressé avec les bulletins de paie. « Le chef d'entreprise ne doit pas, non plus, oublier de faire une déclaration à la Commission nationale de l'informatique et des libertés (Cnil), pour communiquer les données enregistrées par la pointeuse », rappelle Me Marie-Cécile de la Chapelle, avocate spécialisée en droit social du cabinet Sekri Valentin Zerrouk.

Risque de contentieux.

Malgré la fiabilité du système, le décompte des heures supplémentaires donne régulièrement lieu à des contentieux. Me Marie-Cécile de la Chapelle se souvient ainsi d'un dirigeant contraint de payer des heures supplémentaires à ses salariés restés un soir pour un pot de départ à la retraite. La précision des relevés de la pointeuse présente aussi un autre revers: son absence de souplesse. Un inspecteur du travail peut, en effet, contrôler plus aisément la durée du travail dans une entreprise qui en est équipée et punir les infractions, y compris celles qui sont involontaires. Pour rappel, la loi autorise une durée maximale de 10 heures de travail par jour ou 48 heures sur une semaine, avec une durée hebdomadaire moyenne calculée sur 12 semaines consécutives qui ne peut excéder 44 heures (articles L.3121-35 et L.3121-36 du code du travail). Par prudence, l'avocate conseille de ne pas faire pointer les cadres en forfait jour : « Si des indices montrent qu'un cadre était finalement bien soumis à des horaires de travail, comme le pointage, il peut demander le paiement de ses heures supplémentaires, assure Me Marie-Cécile de la Chapelle. Le système se retourne alors contre l'employeur : mieux vaut ne pas prendre de risques. »

POUR
La pointeuse coupe court à toute suspicion
DOMINIQUE ROITEL, gérant de Henryot & Cie

Dans la manufacture de sièges Henryot & Cie, avant le retentissement de la sonnerie marquant le début de la journée de travail, chaque salarié présente son badge magnétique à l'entrée de l'entreprise. C'est pour simplifier la tâche de son comptable que le gérant, Dominique Roitel, installe une pointeuse en 2007. «Nous avons réduit le temps consacré aux tâches administratives d'au moins une matinée par mois, assure-t-il. Et le système facilite aussi la gestion des heures supplémentaires, comptabilisées de façon très précise.»
En cas de contestation de la part de salariés, les chefs d'équipe peuvent toujours attester le temps de travail réel grâce au relevé d'heures de la machine. Avant, ces derniers transmettaient à la comptabilité les heures notées par les ouvriers sur des carnets. «Aujourd'hui, aucune suspicion n'est possible; le système est infaillible, ce qui coupe court à toute interprétation et écarte tout favoritisme, estime Dominique Roitel. En outre, les chefs d'équipe sont déchargés de ce travail et peuvent se concentrer sur d'autres tâches.» Le dirigeant a, bien sûr, consulté les représentants du personnel et les syndicats avant de mettre ce système en place: «Ceux-ci l'ont jugé plus juste», affirme-t-il. Pour le principe, les trois cadres sont également soumis au pointage, mais leur temps de travail étant annualisé, le dirigeant ne consulte pas leur relevé d'heures. Autre avantage, selon Dominique Roitel: le système responsabilise les salariés.
« L'un d'eux arrive systématiquement avec cinq minutes de retard: il part le soir cinq minutes plus tard, raconte-t-il. Il n'y a pas de tricherie possible.»


HENRYOT & CIE - Repères
ACTIVITE: Fabrication de sièges d'ameublement d'intérieur
VILLE: Liffol-le-Grand (Vosges)
DIRIGEANT: Dominique Roitel, 48 ans
FORME JURIDIQUE: SARL
ANNEE DE CREATION: 1867
EFFECTIF: 65 salariés
CA 2008: 3,1 MEuros
RN 2008: 320 kEuros

 

CONTRE
C'est un système archaïque
PHILIP GRATTAROLA, président d'Azur industries

Chez Azur Industries, le système de gestion des horaires des salariés repose sur un mélange de contrôle par la hiérarchie et de confiance: «Je sais qui arrive à l'heure ou qui est en retard, assure Philip Grattarola, le dirigeant. La pointeuse nous ramène au XIXe siècle: je trouve ce système archaïque. De toute façon, à l'atelier, tout ouvrier en retard doit demander à son chef la clé du vestiaire, fermé pendant les heures de travail pour éviter les vols.» En outre, chaque jour, les responsables d'ateliers et de chantiers notent sur le planning les heures de chacun. Tout est ensuite centralisé par le directeur administratif et financier. «Je ne dis pas que mon système est infaillible, mais les réclamations sont rares, ajoute le chef d'entreprise. En outre, ce n'est pas dans les cinq premières minutes qu'un ouvrier est le plus productif. Il peut très bien pointer et passer ensuite du temps à la machine à café.» Autre point négatif: la pointeuse manquerait, selon le dirigeant, de souplesse. Aujourd'hui, un salarié qui vient en renfort le samedi, de manière imprévue, peut se voir compter huit heures de travail pour quatre heures effectives. Un arrangement difficile à mettre en oeuvre avec un système automatisé. Le dirigeant s'émeut également de l'influence néfaste que pourrait avoir une pointeuse sur le moral des salariés, qui se sentiraient "fliqués".

REPERES- Azur Industries

ACTIVITE: Fabrication de tuyauterie, chaudronnerie, charpente métallique, mécano-soudure, entretien d'usine
VILLE: Fos-sur-Mer (Bouches-du-Rhône)
DIRIGEANT: Philip Grattarola, 54 ans
FORME JURIDIQUE: SA à conseil d'administration
ANNEE DE CREATION: 1982
EFFECTIF: 120 salariés
CA 2008: 20,2 MEuros
RN 2008: 500 kEuros

 
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Jeanne CAVELIER

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