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Le DIF, une bombe à retardement pour les PME?

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Le Droit individuel à la formation (Dit) fait bénéficier vos salariés de 20 heures de cours par an. Depuis sa mise en place, en janvier 2005, les heures s'accumulent. Il est urgent, pour les PME, de connaître les droits qui y sont attachés. Chef d'Entreprise Magazine vous donne ses conseils pour que vous-même et vos collaborateurs puissent en tirer le meilleur parti.

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@ FOTOLIA

«Le Dif? Je n'y connaissais rien, avoue Philippe Pissonnier, dirigeant de Technifrance, un bureau d'étude en ingénierie de quelque 80 salariés. Jusqu'au jour où j'ai reçu un courrier d'un professionnel de la formation. J'ai eu alors un déclic et je me suis attaqué au problème. Il était temps... Chacun de mes salariés a déjà accumulé une soixantaine d'heures de formation. Au total, ce sont plus de 4 000 heures qui sont concernées.» De fait, le Droit individuel à la formation (Dif) existe depuis deux ans. Instauré par la loi du 4 mai 2004, relative à «la formation professionnelle tout au long de la vie et au dialogue social», il donne au salarié, depuis le 1er janvier 2005, le droit à un contingent annuel d'heures de formation. Pourtant, la même année, un premier bilan du ministère de l'Emploi soulignait déjà des difficultés, notamment dans la signature des accords de branche. Le fossé entre l'ambition législative et la réalité de son application s'est, depuis, confirmé: selon le baromètre 2007 de l'institut Adiscos, près des trois-quarts des salariés de l'Hexagone s'estiment peu ou pas informés des modalités du Dif et ne pensent pas y recourir.

A SUIVRE
Quelques formations «difables»

Certes, en tant que droit individuel du salarié, le Dif est initié par rapprenant«et non par son employeur. Toutefois, les besoins de votre entreprise peuvent rencontrer les envies de vos collaborateurs. Quelques exemples de stages «difables».

1 APPRENDRE L'ANGLAIS DEVANT SON PC

C'est possible grâce à l'e-learning, ou formation sur le Web. A partir de 250 euros pour 20 heures de cours, avec Tell Me More par exemple. Avantages: l'allocation de Dif est versée proportionnellement au temps de connexion et vous pouvez également suivre les progrès de vos salariés (www.tellmemore-online.com).

2 UN MBA POUR VOTRE FUTUR BRAS DROIT

Vous souhaitez faire évoluer l'un de vos cadres prometteurs? Le MBA (Master of Business Administration) est ce qui se fait de mieux en matière de diplôme de management. Long et cher, il est «difable» et peut donc être en partie supporté par l'effort de formation de l'entreprise. Certaines écoles de commerce ont adapté leurs offres, comme l'ESC Montpellier qui propose des sessions de 20 heures (www.supdeco-montpellier.com). Il faudra compter de 17000 à 35 000 euros selon l'école choisie.

3 UN STAGE D'INFORMATIQUE POUR VOTRE ASSISTANTE

La plupart des Chambres de commerce et d'industrie proposent des formations sur l'utilisation de Word, Excel ou d'un logiciel de gestion, et même des stages d'initiation à la programmation ce qui permet de réaliser un site Web. A partir de 25 euros l'heure avec, par exemple, la Chambre de commerce du Havre (havre.cci.fr). D'une façon générale, les stages présentés par les Chambres de commerce et d'industrie (CCI) offrent un excellent rapport qualité/prix et sont, bien entendu, assurés en région.

4 LES RUDIMENTS DE LA LECTURE ET DE L'ECRITURE

Des cours d'alphabétisation, pudiquement appelés «remise à niveau en français», sont proposés par l'institut Adiscos. Une façon d'aider certains salariés à se réconcilier avec la lecture et l'écriture. A partir de 1080 euros pour vingt heures de cours, soit 54 euros de l'heure (www.adiscos.com).

5 PASSER LE PERMIS DE CONDUIRE

Les auto-écoles proposent des forfaits «difables» de vingt heures à partir de 700 euros. Une offre indispensable aux commerciaux itinérants. Attention cependant, car le permis ne saurait être couvert par le Dif en cas de perte de points.

6 APPRENDRE UN METIER AVEC LE CNAM

Le Cnam (Conservatoire national des arts et métiers) propose plus de quatre cents formations métiers. Elles sont disponibles via le système FOD, la référence dans le domaine de la formation à distance, ou l'on peut les trouver en version mixte avec des stages sur le terrain (www.cnam.fr).

Une ignorance qui risque de devenir un problème pour les entreprises. Le Dif concerne aujourd'hui, 4,5 millions de salariés, dont les vôtres, puisqu'il suffit d'être embauché en CDI (contrat à durée indéterminée) depuis plus d'un an pour y prétendre. La loi leur donne droit à un quota annuel de 20 heures de formation, cumulables sur six ans et plafonnées à 120 heures. Le Dif étant un droit reconnu au salarié, celui-ci est libre ou non de l'utiliser. Mais s'il y renonce, il ne peut demander de compensation financière. Les collaborateurs à temps partiel peuvent aussi prétendre au Dif: leur quota est alors calculé au prorata de leur temps de travail. Un salarié employé aux quatre cinquièmes bénéficie du même droit que son homologue à temps plein. Et les collaborateurs en CDD (contrat à durée déterminée) ont droit au dispositif, au prorata de leur temps de travail, à condition de pouvoir attester de quatre mois travaillés au cours de l'année écoulée. Par exemple, un CDD de six mois donne droit à dix heures de formation au titre du Dif et un CDD de six mois à mi-temps à la moitié de ce quota. Sont, en revanche, exclus les apprentis et les salariés en contrat de professionnalisation ou de qualification.

A LIRE
LE DIF, COMPRENDRE ET METTRE EN OEUVRE LA FORMATION PROFESSIONNELLE

L'objectif de cet ouvrage est de vous aider à faire de cette nouvelle obligation un atout pour votre entreprise. Il comprend l'analyse des points-clés sous forme de fiches techniques, une feuille de route enrichie de cas pratiques, les textes intégraux de l'accord et des articles du Code du travail mis à jour. Un quiz vous permettra de situer rapidement vos besoins en la matière. La réédition 2006 inclut révolution des accords de branches et d'entreprises.
Par Alain-Frédéric Fernandez, Dunod, 2004, 247 pages, 22 euros

Une bombe à retardement? Ces droits font du Dif une bombe à retardement pour votre entreprise. Le risque étant, si vous négligez d'ouvrir le dossier, que tous vos salariés fassent jouer leur droit au même moment quand, voyant 2010 approcher, ils réaliseront qu'il est grand temps de s'y mettre... Car lorsqu'ils auront atteint leur plafond de 120 heures, ils ne pourront plus prétendre à des droits supplémentaires tant qu'ils n'auront pas dépensé tout ou partie de leur crédit. Or, pour l'heure, la plupart des dirigeants adoptent la politique de l'autruche. «Les PME mettent du temps à s'y mettre, constate Odile Granjean, de l'Agefos-PME, organisme public chargé de collecter les fonds destinés à la formation dans les PME. Quant aux salariés, ils s'en méfient comme de toute nouveauté qu'ils ne comprennent pas encore...»

Une des difficultés avec le Dif, regrettent les experts, c'est de lutter contre l'idée que vous donnez à vos collaborateurs les armes pour aller se vendre ailleurs. «Oui, ils vont acquérir de nouvelles compétences. Mais renoncer à les former de peur de les voir progresser est aussi absurde que d'embaucher un salarié médiocre pour être sûr de pouvoir le garder, ironise Mathilde Bourdat, formatrice chez Cegos. En outre, il faut comprendre que vos concurrents aussi vont former leurs salariés et que vous bénéficierez donc, à votre tour, de la mobilité de ces talents.» Enfin, dans ce contexte de dynamique pédagogique, les entreprises qui ne jouent pas le jeu seront démasquées et fuies par les meilleurs candidats. Bref, à terme, le Dif est, bien plus qu'une obligation, un must pour qui veut préserver son image d'employeur. Selon les termes de la loi, le Dif a pour vocation d'«améliorer l'employabilité» de son bénéficiaire. Dans cette optique, des accords de branche encadrent les demandes: environ une branche professionnelle sur cinq a signé un accord. Il s'agit soit de cours prioritaires (comme l'amélioration de l'anglais pour les commerciaux), soit de stages visant à améliorer des compétences importantes mais moins vitales, ou de formations ouvertes sur des compétences nouvelles. Si le Dif reste une initiative du salarié, sachez que vous pouvez refuser les formations qui n'ont vraiment aucun rapport avec votre activité. Vous avez un mois pour vous prononcer sur la demande de votre collaborateur. Passé ce délai, elle sera considérée comme acceptée. Mais attention: sachez qu'en cas de refus de votre part, votre salarié peut réitérer sa demande l'année suivante. Si le désaccord persiste durant deux exercices successifs, le collaborateur peut la déposer dans le cadre du congé individuel de formation (Cif). Votre organisme paritaire de gestion du Cif examinera alors en priorité sa requête et aura de bonnes chances d'y accéder, à condition qu'elle corresponde à ses critères d'acceptation. Dans ce cas, vous serez tenu de lui verser l'équivalent de l'allocation de formation correspondant aux droits acquis par la personne au titre du Dif, plus les frais de formation. Financièrement, donc, tout le monde sera perdant: le salarié, qui devra liquider toutes ses heures précipitamment, et l'entreprise, qui devra débourser, d'un seul coup, une grosse somme.

A SAVOIR

> BESOIN D'AIDE?
De nombreux cabinets d'experts ont vu le jour, qui vous proposent d'organiser votre plan de formation. Accessibles aux grandes comme aux petites entreprises, ils vous aideront à faire le tri dans l'offre pléthorique des centres de formation et à planifier votre approche du Dif afin que vous puissiez appliquer la loi sans risque de déséquilibre financier.

ALAIN BEYDON-SCHLUMBERGER et sa nièce Séverine, vignerons

Grâce au Dif, notre commerciale se transforme en créative!


Pour Alain Beydon-Schlumberger, vigneron alsacien, le Dif n'est pas inconnu. Plusieurs de ses salariés ont déjà bénéficié de cours d'anglais et sa nièce, Séverine Schlumberger, a elle-même suivi un Dif d'un an, pour apprendre à diriger une entreprise, afin de prendre un jour la suite de son oncle. Mais l'utilisation la plus originale du Dif leur a été suggérée par l'une de leurs salariées, une assistante commerciale qui désirait pouvoir utiliser des logiciels de mise en page et de photographie. «C'est une personne passionnée parla création. Quand elle nous a proposé de se perfectionner à l'utilisation de Photoshop, cela nous a paru d'autant plus légitime qu'elle s'intéressait déjà à la communication. Grâce au Dif, notre commerciale se transforme en créative!» Une occasion en or pour la jeune femme de prendre en charge de nouvelles missions, plus gratifiantes que la réalisation des étiquettes et des cartes de visite... Et une aubaine pour la PME, qui fête ses 200 ans dans trois ans et se prépare déjà à l'événement. «Lorsque nous nous offrons une nouvelle plaquette, cela monopolise les deux tiers de notre budget communication. Cette fois, ce sera autant d'économisé, mais nous allons en parallèle investir dans du matériel informatique pour lui permettre de mieux travailler.»


Domaine Schlumberger Repères


- ACTIVITE: domaine viticole
- VILLE: Guebwiller (Haut-Rhin)
- FORME JURIDIQUE: SCEA (société civile d'exploitation agricole)
- DIRIGEANT: Alain Beydon-Schlumberger, 61 ans
- ANNEE DE CREATION: 1810
- EFFECTIF: 63 salariés
- CA 2006: 3MEuros
- RESULTAT NET 2006: non communiqué

Des dirigeants heureusement surpris. Toutefois, dans la pratique, les dirigeants reconnaissent être agréablement surpris par le contenu des demandes de leurs salariés. «J'avais peur que l'on me réclame des cours de théâtre ou de cuisine, avoue le dirigeant d'une société d'édition de logiciels financiers. Mais en fait, mes salariés font preuve d'un esprit très professionnel et leurs demandes sont justifiées.» Un pragmatisme que confirme Sophie Bolloré, directrice de l'institut de formation Docendi: «La plupart des salariés recherchent des formations qui vont leur permettre d'évoluer au sein de leur entreprise.» En effet, la plus grande audace du Dif est sans doute d'installer la formation au coeur des préoccupations des patrons de PME. Car c'est la grande nouveauté: jusqu'ici pénalisés par rapport aux salariés de grands groupes, les équipiers des PME peuvent, désormais, prétendre à leur part du gâteau. Mieux: ils peuvent solliciter des formations dites «de développement personnel», c'est-à-dire des stages dont le sujet n'est pas directement en rapport avec leur métier. Gestion du stress, conduite de réunion... Il s'agit, dans l'esprit de la loi, d'enclencher un cercle vertueux permettant à chacun de découvrir de nouveaux centres d'intérêt et domaines de compétence. «On passe d'un programme pour tous à un projet pour chacun», résume Alain-Frédéric Fernandez, expert du Dif et auteur d'un ouvrage de référence en la matière (Cf. notre encadré «A lire», page 31) .

MEMO

> LE DIF EN PRATIQUE
- Les périodes d'absence d'un salarié pour congé de maternité, d'adoption, de présence parentale ou pour congé parental d'éducation sont intégralement prises en compte dans le calcul des droits ouverts au titre du Dif.
- En cas de démission, un salarié peut demander à utiliser son Dif avant la fin de son préavis.
- En cas de licenciement, sauf pour faute grave ou lourde, vous devrez notifier les droits au Dif dans la lettre jointe. Et vous acquitter du versement du montant des allocations de formation cumulées pendant six ans.

Une opportunité à saisir. Pour le dirigeant, il s'agit de saisir cette opportunité en faisant coïncider le projet de ses salariés avec celui de son entreprise. Pour les formations classiques, type langues ou informatique, les grands instituts se sont adaptés au raz de marée Dif en proposant de nombreux modules de vingt, quarante ou soixante heures. Abordé dans le cadre de l'entretien annuel professionnel par exemple, le dialogue sur le Dif est l'occasion d'évoquer les perspectives d'évolution du salarié. Certains pourront même faire sanctionner leur Dif par un diplôme. «Les formations diplômantes sont aussi concernées», rappelle Blandine Legrand, formatrice chez Démos. En cumulant ses heures, un cadre peut s'inscrire à un MBA (Master of Business Administration, diplôme de haut niveau en management), même si son coût total dépasse le taux de remboursement du Dif (voir p.30).

Tout cela sans que l'activité de votre PME soit (trop) perturbée. Car le dispositif incite les collaborateurs à se former en dehors de leur temps de travail, le soir et le week-end par exemple. «Lorsqu'ils choisissent cette option, explique André Escure, dirigeant d'un cabinet de consulting en formation, ils reçoivent une allocation équivalente à 50% de leur rémunération, exonérée de cotisations sociales patronales et salariales.» Si les frais de formation, ainsi que l'allocation, sont à la charge de l'employeur, ce dernier peut demander jusqu'à 100% de prise en charge à l'organisme paritaire collecteur agréé (OPCA) dont il dépend, pour peu que sa demande satisfasse aux critères définis par la loi. «A défaut, le Dif sera financé sur le fonds déformation de l'entreprise», précise l'expert. Enfin, toujours dans une démarche proactive, sachez que vous avez tout intérêt à mutualiser les demandes de formation. Si plusieurs salariés veulent se perfectionner en anglais, chargez-vous de mettre en concurrence plusieurs organismes de formation afin d'obtenir un tarif négocié.

Reste que le système n'est, bien sûr, pas parfait. Certains déplorent qu'il ne soit pas obligatoire. «J'ai bien peur qu'il n'intéresse personne tant qu'il ne sera pas plus contraignant», soupire Pascal Chauvin. Ce spécialiste en formation a monté, en 2005, une société de conseil, baptisée Dif-expert, qui a mis la clé sous la porte au bout de sept mois, faute d'intérêt de la part des dirigeants. «Le cumul sur six ans leur laisse croire, à tort, qu'ils peuvent enterrer le dispositif», souligne Pascal Chauvin. D'autres reprochent au Dif de ne pas être transférable d'une entreprise à l'autre. Deux ans après sa mise en place, reste à optimiser un scénario qui se voulait gagnant sur tous les fronts. Du côté des PME, le chef d'entreprise a réellement intérêt à l'anticiper: il pourra ainsi tirer profit de ce dispositif rien moins qu'indispensable, à une époque où l'on fait rimer performance et développement des compétences.

PRATIQUE
L'Agefos met à la disposition des PME un nouvel outil d'aide à la gestion du Dif

En substance, il s'agit d'abord d'un diagnostic pour définir les investissements nécessaires, de votre part, ainsi qu'une étude des paramètres sensibles de votre entreprise. Ensuite, vous avez accès à une base internet qui met à disposition des fiches conseils et des processus de gestion dématérialisés du Dif.
Enfin, un contrat est signé avec l'Agefos PME, contrat évolutif qui prend en compte les attentes des salariés et inclut un accompagnement juridique et fiscal de votre mise en place du Dif.
Plus d'informations sur le site www.agefos-pme.com

 
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Mathilde DAMGE

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