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L'innovation A LA PORTEE DE TOUTES LES PME !

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Faire germer une idée, la transformer en projet viable et profitable sans se la faire souffler en cours de route peut relever du défi dans une entreprise. Mais certainement pas de l'impossible! Et c'est heureux car aujourd'hui, encore plus qu'hier, seule une stratégie créative permet de sortir du lot, de capter de nouveaux clients, de développer son chiffre d'affaires et de s'assurer un avenir prometteur. Voici les étapes à suivre pour dynamiser l'innovation dans votre PME.

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ETAPE 1: Pratiquer l'innovation: de la culture à la stratégie

Prendre un temps d'avance par rapport à la concurrence, c'est l'ambition de tout dirigeant. Pour passer du rêve à la réalité, il doit montrer l'exemple et apprendre à ses managers à insuffler une énergie créative dans leurs rangs. Le reste n'est qu'organisationnel.

Innover, c'est créer une invention... qui rencontre un marché! Ce dernier critère est fondamental. « Trop souvent, les entreprises ont tendance à lancer un produit ou un service dans un premier temps puis à chercher des clients potentiels dans un second, regrette Ivan Gavriloff, p-dg de Kaos Consulting, cabinet conseil en innovation. Elles s'organisent ensuite au mieux pour vendre leur offre et optimisent leur profit par un travail sur les process. » Autrement dit, dans ce cas de figure, l'innovation perturbe l'organisation de l'entreprise. D'où des écueils organisationnels et humains sur le chemin. « C'est prendre le problème à l'envers », affirme l'expert, pour qui l'innovation doit être intégrée d'emblée dans le code génétique de la société, faute de quoi sa survie est tout bonnement menacée dans un monde devenu particulièrement compétitif. Pas évident pour une PME d'éveiller les ressources inventives? « Au contraire, répond Julien Besse, directeur associé de Sinnogen, société de conseil spécialisée sur les problématiques de stratégie et de management de l'innovation, les petites structures sont avantagées par rapport aux grands comptes. » L'absence de cloisonnement fort entre les services et les relations faciles entre collaborateurs et chefs de service sont autant d'atouts qui compensent le manque relatif de moyens. « Les prises de décision et les changements de cap interviennent vite », ajoute le spécialiste, complété par son associé Sébastien Grilli: « En outre, à l'inverse des grandes entreprises où les salariés se freinent d'eux-mêmes, les PME parviennent souvent à créer un climat relationnel favorable à l'esprit d'initiative et au partage. »

Motiver les troupes

Reste que l'innovation ne se décrète pas. C'est un virus qui s'inocule à tous les étages de l'entreprise, chez tous les collaborateurs. A commencer par tout en haut, dans le bureau du dirigeant. Ici, l'exemplarité du management prend tout son sens. « Le patron doit faire preuve d'une volonté farouche et le faire savoir », martèle Ivan Gavriloff (Kaos Consulting) pour qui humilité et passion sont les maîtres-mots. Concrètement, il s'agit de dire clairement à ses collaborateurs que l'entreprise a besoin de leurs méninges et d'expliquer pourquoi leur investissement est essentiel. Qui ne serait pas motivé à l'idée de faire émerger les solutions ou les produits de demain? Qui n'aurait pas envie de se donner au quotidien pour devenir leader sur son marché? Un bon discours emporte l'adhésion et le coeur des foules. «Naît ainsi un état d'esprit qu'il faudra soutenir et encourager via une organisation facilitant le recueil de bonnes idées et leur matérialisation», pointe l'expert.

Relais opérationnels, les managers intermédiaires ont un rôle pivot à jouer. Ils sont en contact direct avec les salariés opérationnels, ceux qui sont confrontés tous les jours aux process et aux outils et, par là même, les mieux placés pour détecter les failles, les points d'amélioration et avoir des idées sur l'avenir du produit ou du service. A ces managers d'impulser un dialogue ascendant de manière formelle (lors de réunions thématiques) ou informelle (à la machine à café). Leur capacité d'écoute sera aussi à l'épreuve à l'occasion d'échanges avec les partenaires (sous-traitants, fournisseurs, revendeurs) et avec les clients. Les sonder permet d'obtenir des informations intéressantes sur l'usage qu'ils font réellement de vos produits et services. Une étude de satisfaction ou un focus group, par exemple, peuvent vous donner des pistes d'évolution. «Les collaborateurs doivent se nourrir de ce qu'ils voient et entendent autour d'eux et s'ouvrir sur le monde afin d'ouvrir leur esprit», estime Julien Besse (Sinnogen). Comment? Voici des actions simples à mettre en place: inciter à la participation active à la vie de l'entreprise pour savoir exactement sur quels projets travaillent ses voisins de bureau, intégrer des réseaux professionnels pour échanger sur des problématiques communes ou encore se tenir informé de l'évolution de son secteur et de ses acteurs par un travail de veille approfondie qui peut permettre, notamment, de saisir des opportunités extérieures. Selon Sébastien Grilli (Sinnogen), «le chef d'entreprise doit offrir cette liberté à ses managers même si elle a un coût certain, ne serait-ce qu'en termes de temps ».

Pas question de partir dans tous les sens à partir des idées collectées de-ci de-là. Les deux directeurs de Sinnogen conseillent d'instaurer un comité transverse chargé d'animer et de contrôler les énergies. Il se compose idéalement d'un représentant de tous les services de l'entreprise car l'innovation est le fruit de la confrontation de différents points de vue, et pas uniquement le résultat des projets de R & D. Ses membres participent à des sessions internes de brainstorming et/ou à des séminaires de créativité, encadrés par des spécialistes, sélectionnent les propositions, prévoient leur mise en chantier et décident, le cas échéant, de leur arrêt. « L'une des missions principales de cette structure est de vérifier que le projet s'inscrit bien dans la stratégie globale de l'entreprise et qu'il pourra être mené à son terme dans le délai prévu et avec tous les résultats escomptés », prévient Ivan Gavriloff (Kaos Consulting). Intervient alors la phase d'étude de viabilité: marché, environnement concurrentiel et ressources nécessaires sont passés au crible pour délimiter le périmètre du projet et éviter des orientations coûteuses ou inefficaces. Le plan d'action rédigé par la suite établit les étapes à suivre pour le mener à bien.

Chercher du soutien extérieur

Il peut arriver, selon l'activité de l'entreprise, que des compétences fassent défaut en interne pour poursuivre le projet. La conclusion d'un partenariat est alors l'une des solutions envisageables pour continuer tout en partageant les coûts... et les résultats. Il peut sceller un accord entre vous et bon nombre de structures: grande entreprise, institut de recherche privé ou universitaire, membres d'un pôle de compétitivité, designers, fournisseurs, clients, entreprises aux activités connexes, etc. « Il est indispensable d'opérer une sélection pointue de façon à vous assurer que votre passion et vos intérêts sont les mêmes », recommande Ivan Gavriloff (Kaos Consulting). « Et que vous ne construisez pas une usine à gaz qui consommera énergie et temps de manière disproportionnée par rapport aux retombées attendues », surenchérit Julien Besse (Sinnogen). Bref, il s'agit d'évaluer si le jeu en vaut la chandelle. En d'autres termes, si une innovation rentable en sortira.

ZOOM
Sur quoi une entreprise peut-elle innover?

Il serait réducteur de confiner l'innovation (c'est-à-dire l'apport de la nouveauté) uniquement à vos produits ou services. Vous pouvez innover à tous les étages!
- Le produit: Lancer une nouveauté, ajouter une fonctionnalité à un produit existant.
- La cible: Séduire un nouveau type de clientèle.
- Le procédé: Créer une technique ou technologie qui optimise la fabrication, la logistique, la gestion des ressources...
- L'organisation: Répartir différemment les rôles et le pouvoir de décision ou faciliter la communication interne.
- Le marketing: Changer de packaging, de logo, de message publicitaire.
- La méthode de vente: «Recruter» des prescripteurs.
- La distribution: Trouver des revendeurs supplémentaires.
- L'image: lancer des opérations de communication externe originales.
- Les ressources humaines: Recruter des profils atypiques.

Le bureau pour enfant forteresse fait partie des 40 meubles développés par L'Edito.

Le bureau pour enfant forteresse fait partie des 40 meubles développés par L'Edito.

LE TEMOIGNAGE DE Francis Lelong, directeur général de L'Edito

«L'innovation est au coeur de notre business model»


est au monde du meuble ce que My Major Company est à celui du disque. La petite affaire parisienne fait financer le lancement d'une table ou encore d'une étagère conçue par l'un de ses 100 designers partenaires par les internautes qui vont parier entre 3 et 300 euros sur le succès futur de l'objet. La somme récoltée (de 1 000 à 3000 euros) sert à la réalisation d'études techniques et marketing, ainsi qu'à la réalisation d'un prototype et, éventuellement, d'une présérie. En contrepartie, les coéditeurs perçoivent des royalties durant dix ans à hauteur de 10 % du chiffre d'affaires généré par le produit. A ce jour, un tiers des projets soumis, soit 40 meubles, ont été financés puis commercialisés par la PME qui fabrique les produits en France dans sa propre usine et s'occupe de la distribution. L'innovation se situe donc clairement au coeur de l'ADN de la PME. Mais Francis Lelong, le directeur général, fait en sorte de faire germer les idées au quotidien. Pour ce faire, il recrute prioritairement des profils «issus de start-up plutôt que de grosses boîtes sclérosées» et qui ont «des existences et des personnalités faites d'aspérités». Son community manager, par exemple, est un musicien de formation qui travaille aux 3/5es pour pouvoir se consacrer à sa passion de l'écriture. Manager souple, le trentenaire laisse beaucoup d'autonomie à ses collaborateurs. « Ils doivent se sentir suffisamment sereins pour oser prendre des risques et apporter des solutions détonantes», explique-t-il avant de conclure: «Comme les salariés aiment les produits que nous fabriquons, ils s'intéressent à leur amélioration et n'hésitent pas à formuler des propositions que j'écoute toujours avec attention. »

L'Édito

Activité
Edition, fabrication et distribution de mobilier design
Ville
Paris (XIIe arr.)
Forme juridique
SAS
Dirigeant
Francis Lelong, 38 ans
Année de création
2008
Effectif
25 salariés
CA 2011
1 MEuros

Sébastien Grilli, directeur associé, Sinnogen

« A l'inverse des grandes entreprises, les PME parviennent à créer un climat relationnel favorable à l'esprit d'initiative. »

CE QU'IL FAUT RETENIR

- Une innovation est la rencontre d'une invention et d'un marché.
- En comparaison avec une grande entreprise, une PME est dotée de bon nombre d'atouts pour mettre en place une stratégie d'innovation: peu de cloisonnement, management de proximité et délai de décision rapide.
- C'est au dirigeant de transmettre une culture de l'innovation à ses managers qui eux-mêmes la communiqueront à leurs collaborateurs.
- Un comité transverse, composé d'un représentant de chaque service, peut être mis en place pour animer et contrôler les énergies créatives.
- Une entreprise peut avoir recours à des compétences extérieures, notamment via des partenariats, pour mener à bien un projet d'innovation.

ETAPE 2: De multiples pistes pour financer l'innovation

Pour réunir les fonds nécessaires à l'exécution de votre projet d'innovation, il existe bon nombre de portes auxquelles frapper, en plus de celles de votre agence bancaire habituelle. Tour d'horizon des dispositifs existants, de leurs atouts mais aussi de leurs limites.

1 La banque publique Oséo

« C'est le premier guichet auquel se rendre, affirme François Chollet, directeur d'AbsisKey, cabinet conseil en financement de l'innovation. Oséo est devenu incontournable et ce, pour de bonnes raisons. » D'une part, la banque publique intervient pour garantir (à hauteur de 60 %) les prêts des entreprises via son fonds de garantie innovation. D'autre part, elle octroie elle-même des prêts à taux zéro ou à taux préférentiel (sans garantie, ni caution).

Ses aides prennent également la forme d'avances remboursables. « La palette des offres, particulièrement large, peut couvrir les différents besoins d'une PME en phase d'innovation », complète l'expert. Autre atout: un interlocuteur dédié au sein de 28 directions régionales vous accompagne tout au long de votre demande et vous oriente vers le produit Oséo le plus adapté à votre situation et, le cas échéant, vers d'autres structures à contacter. Les montants versés se situent entre 50 000 et un million d'euros et tournent en moyenne à 130 000 euros. « Attention au timing de votre dépôt de dossier, prévient tout de même Charles-Edouard de Cazalet, directeur de Sogedev, cabinet conseil spécialisé en financement public, la commission rend son verdict sous trois à six mois. »

2 Le crédit impôt recherche (CIR)

Comment ne pas profiter «du dispositif fiscal le plus favorable d'Europe», aux dires des professionnels du financement? Le concept est attractif: dès la fin de son premier exercice fiscal, et tous les ans, une entreprise peut déposer une demande de crédit impôt recherche (CIR). Elle obtient, en cas d'éligibilité, une remise d'impôt sur les sociétés (IS) pouvant atteindre, la première année, 40 % des dépenses engagées en R & D (salaires, fonctionnement, équipements, dépôt de brevets...) puis 35 % la deuxième et 30 % les années suivantes. Seulement il y a deux ombres au tableau. La première? Vos recherches doivent s'inscrire parfaitement dans le cadre défini par le ministère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche: intervention d'au moins un ingénieur et travail sur un produit comportant des améliorations substantielles par rapport à ceux existants, notamment. « D'où l'intérêt de faire appel à un spécialiste qui pourra délimiter le périmètre des travaux éligibles », explique Charles-Edouard de Cazalet. La seconde est le formalisme des dossiers. En cas de contrôle fiscal, charge à vous de fournir des pièces justificatives irréprochables. Faute de quoi vous risquez un redressement sur votre crédit d'impôt. « Il faut donc se préparer en constituant des synthèses techniques et financières », conseille François Chollet (AbsisKey).

3 Le statut de jeune entreprise innovante

Le statut fiscal JEI vise à soutenir les jeunes entreprises de moins de huit ans d'existence en leur conférant des exonérations fiscales et un allégement de charges sur les salaires des collaborateurs du service R & D et des chercheurs. Elles ne s'acquittent pas de l'IS, ni de la contribution économique territoriale (CET). Les charges sociales sont déductibles à 100 % durant les trois premières années, puis à 80 %, 70 %, 60 % et 50 % les années suivantes. Ces exonérations sont plafonnées, par année et par entreprise, à cinq fois le plafond annuel de la Sécurité sociale, soit 181 875 euros pour 2012.

Condition sine qua non pour bénéficier de tous ces avantages: les PME doivent impérativement consacrer au moins 15 % de leur chiffre d'affaires à la recherche et au développement. Ce statut, qu'il suffit de déclarer à la fin de son exercice fiscal, peut se cumuler avec le CIR

4 Le FUI via les pôles de compétitivité

Les PME labellisées peuvent prétendre à des subventions spécifiques de la part de l'Etat, de l'ordre de 100 000 à 500 000 euros, via le fonds unique interministériel (FUI). Ce dernier organise, deux fois par an, des appels à projets thématiques pour des dossiers collaboratifs. La sélection s'effectue en fonction du contenu technologique, du ROI commercial et des retombées attendues en termes d'emploi. Inconvénient majeur: impossible de démarrer les recherches communes avant l'acception du projet, or la validation peut prendre jusqu'à six mois.

5 D'autres pistes à explorer

Enfin, ne négligez aucune piste. Des aides régionales aux européennes. Ainsi, le Fonds européen et développement régional (Feder) et le Fonds social européen (FSE) soutiennent respectivement l'investissement dans le matériel et dans la formation. Ce sont les régions françaises qui les redistribuent. PCRDT, Eureka, Eurostars... Les programmes européens pullulent. Difficile de s'y retrouver et de rentrer dans les clous mais qui ne tente rien...

LE TEMOIGNAGE DE Ludovic Labidurie, président de Neolux

«Les coups de pouce financiers d'Oséo nous permettent un développement accéléré»


Depuis mars, deux grandes maisons champenoises utilisent dans leurs caves un système d'éclairage à diodes électroluminescentes (led) spécialement conçu pour ce type d'espace. Cette innovation est le fruit d'une collaboration entre la PME Neolux et le Commissariat à l'énergie atomique (CEA) de Grenoble. Depuis juin 201 1 , et pour trois ans, les deux structures s'associent pour créer des solutions nouvelles. Celle pour le vin est la première, la seconde, le «projet Moduled», est en cours d'élaboration. Elle vise à intégrer de l'intelligence embarquée dans la led. Pour financer ces chantiers, Ludovic Labidurie, président de l'entreprise, obtient, sur 36 mois, 800000 euros d'avance de trésorerie de la part d'Oséo. Pour monter son dossier, il bâtit un business plan, un plan de développement stratégique en R & D et établit des projections de ventes et de retour sur investissement. «Un travail prenant, mais nécessaire et justifié dans le cadre d'une demande de fonds publics», estime-t-il. Satisfait des services d'Oséo, il sollicite à nouveau une aide financière afin d'investir dans l'achat de machines. Aux 400000 euros versés sous forme d'obligations convertibles par une société de capital-risque, se sont ainsi ajoutés 250000 euros prêtés à 4 % avec un différé d'amortissement de deux ans et sans caution du dirigeant. «De quoi accélérer notre développement sans risque financier majeur», conclut le chef d'entreprise.

Neolux conçoit et réalise des éclairages à base de leds.

Neolux conçoit et réalise des éclairages à base de leds.

Neolux

Activité
Conception et fabrication de sources lumineuses à leds
Ville
La Chapelle Vendômoise (Loir-et-Cher)
Forme juridique
SAS
Dirigeant
Ludovic Labidurie, 44 ans
Année de création
2007
Effectif
30 salariés
CA 2011
2,7 MEuros

CE QU'IL FAUT RETENIR

- Les aides d'Oséo prennent la forme d'avances remboursables, de prêts à taux zéro ou préférentiel et de garanties bancaires. Un interlocuteur dédié vous conseille et vous oriente.
- Le crédit impôt recherche (CIR) est un dispositif fiscal permettant d'obtenir un financement partiel des travaux de R & D via une remise d'impôt sur les sociétés (IS) pouvant atteindre 40 % de ses dépenses engagées.
- Le statut de jeune entreprise innovante (JEI) permet de bénéficier d'exonérations fiscales et sociales à condition de consacrer au moins 15 % de son chiffre d'affaires à la recherche et au développement.

Micheline Taillardat, présidente de la société éponyme, a opté pour l'enveloppe Soleau pour faire valoir ses droits d'auteur.

Micheline Taillardat, présidente de la société éponyme, a opté pour l'enveloppe Soleau pour faire valoir ses droits d'auteur.

ETAPE 3: Le coûteux mais incontournable passage par la case protection

Pour couper l'herbe sous le pied des copieurs, rien ne vaut un dépôt à l'Institut national de la propriété industrielle (Inpi). Formules, marche à suivre, coût... Voici tout ce que vous devez savoir sur la propriété industrielle.

Vous mettez de l'espoir dans cette innovation coûteuse en temps, moyens et effectifs. Alors ne sautez pas la case Inpi (Institut national de la propriété industrielle). Cet organisme vous assure une protection quelle que soit la nature de votre trouvaille. « Seul un outil juridique vous confère un monopole d'exploitation, précise Gabriel de Kernier, directeur du cabinet conseil en propriété industrielle Netter. C'est la base sur laquelle s'appuyer en cas de contrefaçon. »

D'ailleurs, la publication d'un brevet suffit souvent pour dissuader les concurrents de vous copier. Une recommandation de Philippe Blot, président de Lavoix, cabinet de conseil en propriété industrielle, afin d'éviter les fuites avant même d'entrer en contact avec l'Inpi: « Pensez à inclure des clauses de confidentialité dans les contrats de travail de vos collaborateurs, ainsi que dans ceux qui vous lient avec vos partenaires et sous-traitants. »

L'enveloppe Soleau, première étape

Première possibilité: l'enveloppe Soleau (15 euros pour cinq ans renouvelables) qui permet de dater et d'apporter une preuve d'antériorité sur une oeuvre. Ici point d'exclusivité, mais vous pouvez exploiter votre invention sans crainte, par exemple, de vous voir opposer un brevet déposé ultérieurement. Micheline Taillardat, présidente de la société éponyme (23 salariés, 3 millions d'euros de chiffre d'affaires) spécialisée dans la fabrication et la commercialisation de meubles inspirés du XVIIIe siècle, a opté pour cette formule légère pour faire valoir ses droits d'auteur. Bien lui en a pris. « L'année dernière, un fabricant italien s'est un peu trop inspiré de l'un de nos modèles, se rappelle la dirigeante. Trois échanges de courrier d'avocat plus tard, l'entreprise étrangère reconnaissait ses torts et demandait une transaction commerciale que nous avons acceptée afin d'éviter de longs et coûteux recours devant les tribunaux. » Cette méthode peut donc avoir un effet dissuasif, mais son pouvoir légal est très limité. Il existe, en revanche, trois outils majeurs pour protéger au mieux une création: le dépôt de brevet, le dépôt de modèles ou de dessins et le dépôt de marque. Ils sont complémentaires. Par exemple, s'agissant d'un téléphone portable, vous pouvez déposer une fonctionnalité (brevet), son design (dépôt de modèles ou dessins) et son nom (dépôt de marque). S'agissant du brevet, il protège une innovation technique, c'est-à-dire un produit ou un procédé qui apporte une solution technique à un problème donné. Le monopole d'exploitation peut atteindre 20 ans moyennant une redevance annuelle de 18 euros. Au terme de ce délai, le brevet tombe dans le domaine public et peut être utilisé par n'importe qui.

La procédure de dépôt de brevet

La demande de dépôt (coût: 36 euros) se fait à l'Inpi. Le dossier doit contenir une description détaillée de ce que vous voulez protéger. Il est conseillé de se faire accompagner pour la rédaction du texte descriptif. Sinon, «vous risquez d'obtenir un brevet sous une forme plus limitée que celle à laquelle vous auriez pu prétendre ou, pire, vous voir opposer un refus de l'Inpi», prévient Philippe Blot (Lavoix). Comptez, selon la technicité de votre innovation, de 3000 à 12000 euros. L'Inpi rend son rapport de recherche préliminaire établissant l'état de l'avancée de la technique dans le domaine concerné et son avis quant à la délivrance au bout de neuf mois maximum (coût 500 euros). Il est possible, à cette étape, d'apporter des retouches à sa demande. La publication a lieu environ 18 mois plus tard et la délivrance intervient généralement un an après (coût: 86 euros).

«Si le dépôt n'est effectué qu'en France, l'entreprise peut être copiée en toute légalité hors de nos frontières», prévient Gabriel de Kernier (Netter). D'où l'intérêt d'étendre le brevet à d'autres pays. La date du dépôt sur le territoire français fait foi et l'entreprise bénéficie d'un délai de priorité (appelé délai d'immunité internationale) de 12 mois pour effectuer sa démarche. Il existe trois options pour étendre ses droits. Une entreprise qui cible un ou deux territoires fera une demande de dépôt directement dans le(s) pays concerné(s). Celle qui vise quelques pays européens s'adressera à l'Office européen des brevets (OEB) auquel 32 Etats adhèrent. Il devrait être remplacé, d'ici à 2014, par le Brevet unitaire européen (BUE) et voir son coût réduit et ses démarches facilitées. Enfin, celle qui a besoin d'une couverture plus importante rentrera en relation avec l'Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI). L'Inpi se charge des transferts de dossiers. Dépôt, rapport de recherche, délivrance, traduction, les prix varient en fonction des tarifs en vigueur dans chaque pays, mais une chose est sûre: la facture atteindra au moins 4000 euros par pays, à quoi s'ajoutera par la suite des centaines d'euros par annuité.

Zoom sur les dessins, modèles et marques

Le droit des dessins (créations bidimensionnelles) et modèles (créations tridimensionnelles) concerne les objets industriels ou artisanaux ayant une fonction utilitaire et présentant une apparence nouvelle (et non fonctionnelle), notamment dans leurs lignes, formes ou textures. La protection court sur cinq ans (coût du dépôt 38 euros et 22 euros par reproduction noir et blanc, 45 euros en couleurs), renouvelable par tranche de cinq ans, dans la limite de 25 ans. Le terme «marque» inclut tout signe servant à distinguer un produit ou un service tel qu'un nom (Lacoste) ou un logo (un crocodile). Elle peut être protégée dix ans (coût: 225 euros), le dépôt (240 euros) étant renouvelable à l'infini. Le système de demande auprès de l'Inpi est similaire à celui des brevets.

Philippe Blot, président, Lavoix

« Pensez à inclure des clauses de confidentialité dans les contrats de travail de vos collaborateurs, ainsi que dans ceux qui vous lient avec vos partenaires et sous-traitants. »

CE QU'IL FAUT RETENIR

- Pour protéger une innovation naissante, mieux vaut inclure des clauses de confidentialité dans les contrats de travail de vos collaborateurs, ainsi que dans ceux qui vous lient avec vos partenaires et sous-traitants.
- L'Inpi (Institut national de la propriété industrielle), vous assure une protection quelle que soit la nature de votre innovation.
- Il existe trois outils pour protéger une création en France: le dépôt de brevet, le dépôt de modèle ou dessin et le dépôt de marque.
- Pour déposer un brevet à l'étranger, vous pouvez soit faire une demande de dépôt directement dans le(s) pays concerné(s), soit vous adresser à l'Office européen des brevets (OEB), soit entrer en relation avec l'Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI).

ETAPE 4: Rentabiliser ses innovations: en interne ou via une licence?

Innover pour innover ne rime à rien. Dès lors, il convient de prêter une attention toute particulière à l'exploitation de vos brevets, donc de leur retour sur investissement. Voici les formules possibles pour maximiser les retombées issues de votre trouvaille.

Innover, c'est bien. En tirer de véritables profits, c'est encore mieux! Une technologie ou un service, aussi extraordinaires soient- ils, ne vous rapporteront rien s'ils ne rencontrent pas des clients. Les fichiers de l'Inpi débordent d'inventions géniales qui n'ont enrichi personne! Tout d'abord, sélectionnez l'idée qui, étude de marché à l'appui, répond à un besoin non satisfait et laisse envisager de réelles perspectives de débouchés commerciaux et un modèle économique viable. Certes, le calcul du retour sur investissement n'est pas chose aisée. Mais ne faites pas pour autant l'impasse sur une estimation de la rentabilité de l'affaire en tenant compte, notamment, du montant des investissements de départ, des coûts humains et matériels. Mettez également dans la balance les bénéfices non mesurables, comme la possible montée en compétences de l'équipe investie dans le projet ou l'image de marque de l'entreprise. Réactualisez régulièrement vos estimations et vos indicateurs au fur et à mesure de l'avancement du projet afin d'en garder une vision réaliste. Une fois l'innovation en boîte, deux options s'offrent à vous: l'exploiter vous-même ou transférer sa propriété à un tiers contre une compensation. « Développer en interne un produit ou service que l'entreprise sera la seule à commercialiser permet de dégager des marges importantes », assure Philippe Blot, président de Lavoix, cabinet conseil en droit de la propriété industrielle. C'est la voie la plus largement choisie par les PME, selon Gabriel de Kernier, directeur du cabinet conseil en propriété industrielle Netter. Dans ce cas, l'entreprise se charge de constituer une offre commerciale, de la promouvoir et de trouver des clients. Elle maîtrise ainsi l'intégralité du développement du projet et jouit de toutes les retombées.

Lorsque le titulaire d'un brevet ne dispose pas de moyens suffisants (humains ou financiers) ou n'en exploite qu'une partie ou que dans un domaine donné, il peut envisager de le céder ou de le concéder par licence. Il est alors impératif d'en informer l'INPI. « Avec la licence, toutes les formules sont possibles », indique Gabriel de Kernier (Netter). Vous pouvez vendre votre brevet contre une somme fixe ou en échange de titres dans une autre société (vous êtes alors un apporteur en nature). Ou encore le louer: vous en restez propriétaire et autorisez une société à l'exploiter dans le cadre d'une licence. Il en existe de quatre sortes. D'un côté, la licence totale qui autorise le licencié à exploiter le brevet pour toutes les applications possibles et pour tous les modes d'exploitation. Vous pouvez sinon proposer une licence partielle (applications spécifiques à un marché, etc.). Autre possibilité: la licence simple où le titulaire peut concéder plusieurs licences du même brevet à plusieurs entreprises pour les mêmes modes et domaines d'application et sur le même territoire ou, a contrario, une version exclusive. Le concessionnaire vous rémunère soit une fois pour toutes, soit à travers des redevances régulières, calculées en fonction des ventes ou de la production. Dans ce dernier cas, Gabriel de Kernier (Netter) conseille d'inclure dans le contrat un minimum annuel qui permet de se protéger d'une mauvaise gestion commerciale du détenteur de la licence.

Les précautions à prendre

Mieux vaut prévoir un montant minimum de chiffre d'affaires au-dessous duquel le titulaire s'octroie le droit de se séparer de son licencié. Le concédant peut aussi prévoir un accès aux documents comptables du licencié. A noter qu'en cas de contrefaçon, le donneur de licence est le seul habilité à agir contre les tiers. « On ne s'improvise pas concédant», affirme Philippe Blot (Lavoix), pour qui les contraintes juridiques et entrepreneuriales liées à ce statut sont fortes. Une opinion partagée par Jean-Charles Hourcade. Depuis l'été dernier, il est le directeur général de France Brevets, un fonds d'investissement doté de 100 millions d'euros, créé conjointement par la Caisse des dépôts et l'Etat, afin de maximiser les revenus de ces actifs souvent sous-valorisés. «Les négociations de contrats de licence supposent des compétences que les PME n'ont pas toujours en interne, assure-t-il. D'où l'utilité de notre structure composée de professionnels du métier qui jouent les intermédiaires entre le titulaire de brevets et les utilisateurs possibles. » France Brevets prend à ses frais les études de marché, les recherches de partenaires et les négociations et ne demande aucun remboursement si les résultats ne sont pas au rendez-vous. Pour augmenter les chances de succès, l'entité sélectionne les brevets qui ont le plus de potentiel, en particulier à l'international, puis se charge de les faire fructifier. Comment? «En les agrégeant en grappes cohérentes, pour leur assurer une visibilité mondiale», répond Jean-Charles Hourcade. L'entreprise reste propriétaire de sa trouvaille mais concède à France Brevets un droit de licence exclusive et de sous-licence. En échange, les royalties sont partagées: France Brevets s'en octroie de 40 % à 50 %. Le prix de la tranquillité.

Jean-Charles Hourcade, directeur général, France Brevets

« Les négociations de contrats de licence supposent des compétences que les PME n'ont pas toujours en interne. D'où l'utilité d'un intermédiaire. »

LE TEMOIGNAGE DE Didier Derdérian, p-dg de Néocom Multimédia

«Pour l'heure, l'exploitation de notre brevet se fait en interne, mais pour l'étranger nous songeons à un déploiement via la licence»


«Il aura fallu moins d'un an à Néocom Multimédia pour rentabiliser les dizaines de milliers d'euros d'investissement en R & D autofinancés, nécessaires pour concevoir la technologie innovante qu'elle exploite désormais», se félicite son p-dg, Didier Derdérian. Cet opérateur marseillais de télécommunication dépose à l'Inpi, début 2010, une demande de brevet relative à un procédé qui permet de laisser un message préenregistré directement sur le répondeur d'un téléphone portable. Le Voice message service (VMS), marque déposée, permet à la PME de cibler à la fois le marché des particuliers via son offre «3637», un numéro surtaxé, mais aussi les professionnels avec le VMS mailing utilisé dans un cadre de prospection ou de relation commerciale. L'entreprise passe par des distributeurs spécialisés en marketing direct et en publicité pour proposer ses offres B to B. Et envisage une approche directe. «C'est l'un des chantiers du directeur commercial recruté en mars dernier», souligne le dirigeant conscient de l'importance de structurer son offre. Charge aussi à cette nouvelle recrue d'identifier des partenaires potentiels dans les pays limitrophes où la société compte se lancer dès cette année. Les avocats de Néocom Multimédia y déposent en ce moment même des demandes de brevets. «A l'international, nous songeons à recourir par la suite à la licence afin d'accélérer notre déploiement», conclut le p-dg.

Néocom Multimédia

Activité
Opérateur de télécommunication
Ville
Marseille (Bouches-du-Rhône)
Forme juridique
SA
Dirigeant
Didier Derdérian, 44 ans
Année de reprise
2008
Effectif
20 salariés
CA 2011
6,5 MEuros

CE QU'IL FAUT RETENIR

- Une innovation rentable est celle qui répond à un besoin affiché de clients potentiels.
- Une estimation du ROI, bien qu'ardue, est indispensable avant de vous lancer
- Deux possibilités s'offrent à vous: exploiter l'innovation en interne ou laisser des tiers s'en charger Dans ce dernier cas, plusieurs types de licences peuvent être cédées
ou concédées: exclusive ou non, totale ou non.
- Pensez à solliciter France Brevets qui peut jouer les intermédiaires pour vous auprès de licenciés potentiels partout dans le monde.

 
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GAELLE JOUANNE

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