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Groupement d'entreprises: l'UNION fait la FORCE

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L'union fait la force. Ce vieil adage est plus actuel que jamais s'agissant des PME. Leur taille modeste leur apporte bien des atouts (souplesse, réactivité, adaptabilité, convivialité...), mais aussi quelques inconvénients. Elles peinent, par exemple, à faire entendre leur voix lorsqu'elles ont à affronter de plus grands qu'eux, qu'elles soient clients, fournisseurs ou simples partenaires. Alors, pour s'imposer malgré tout, elles ont trouvé la solution: se regrouper. Quand on est un Tom Pouce du business, exporter semble une gageure. C'est pourtant ce qu'ont fait 32 petites sociétés d'outillage, qui se sont unies au sein d'un groupement, baptisé Outilex, afin de percer sur les marchés lointains. De même, quand on emploie 10, 20, 30 ou 40 salariés, chaque embauche est un pari. Un pari risqué. C'est donc pour atténuer cette difficulté qu'en Eure-etLoir, 134 PME adhèrent à un groupement d'employeurs qui leur permet de «partager» des compétences. D'autres «petits» entrepreneurs peinent à acheter: comment peser sur les prix lorsqu'on est un «micro-client»? Là aussi, la réponse se trouve dans l'union. Dans la plasturgie, sept PME se sont organisées en société afin d'acheter ensemble. Enfin, comment, quand on est tout petit, décrocher d'importants marchés, damant le pion à des acteurs de référence? Quatre PME varoises ont trouvé la solution. Elles ont fusionné pour conquérir, ensemble, les géants de l'aéronautique. Récits.

CAS 1 Elles se partagent des salariés fidèles et impliqués

A Chartres, 134 PME sont réunies au sein du groupement d'employeurs d'Eure-et-Loir. L'objectif? Partager des salariés afin de s'offrir du personnel qualifié en mutualisant les coûts.

En six ans, Aremiag, une PME chartraine spécialisée dans la sérigraphie, n'a jamais raté un contrôle qualité. Son coach s'appelle Didier Peyronnet. Il est responsable qualité à temps partagé et salarié du groupement d'employeurs d'Eure-et-Loir. Une chance pour cette affaire de 27 salariés, qui n'aurait jamais pu, seule, recruter la perle rare pour seulement 30 heures par mois. Sans compter que le groupement s'occupe de tout, de la procédure de recrutement à la gestion de la paie, en passant par les mesures disciplinaires en cas de litige. Comme Aremiag, de nombreux chefs d'entreprise de la région ont choisi cette formule. «Vidée de s'associer pour partager du personnel est née il y a dix ans dans l'industrie cosmétique régionale, évoque Philippe Macel, directeur général du groupement.

Soumises à des pics d'activité saisonniers, ces entreprises avaient du mal à trouver des salariés pour seulement six mois par an.» Créé en 1999, le groupement d'employeurs d'Eure-et-Loir a, lui, beaucoup évolué, notamment grâce aux efforts de Philippe Macel pour recruter de nouveaux adhérents. Avec 50 métiers, 134 membres et 150 salariés (dont 95 en CDI) à son actif, il est devenu, au fil du temps, une véritable PME. Une entreprise à but non lucratif, ayant un statut associatif, comme le montre le montant symbolique de l'adhésion: 150 euros HT par an pour les entreprises de moins de 11 salariés, 300 euros pour celles de 11 à 50 salariés, 600 euros pour les PME de 51 à 100 salariés et 750 euros pour les autres. Un coût jugé plus qu'intéressant par JeanYves Barbeau, ancien gérant et actuel responsable administratif d'Energie Relais, une PME de 11 salariés spécialisée dans la fabrication de groupes électrogènes. «L'adhésion nous procure d'importantes économies», confie-t-il. De fait, le coefficient de facturation sur la rémunération pratiqué par le groupement est de seulement 1,75, contre 2 pour les agences d'intérim. Mais attention: ce système n'est pas la solution miracle. Peu adapté à des besoins occasionnels, il n'a pas vocation à remplacer l'intérim. Denis Bonnet, directeur général de Sensas, une PME de 150 salariés qui fabrique du matériel de pêche, l'a bien compris. Chaque année, entre février et août, dix salariés du groupement viennent grossir ses équipes, saisonnalité oblige. Au-delà de son avantage économique, le chef d'entreprise juge la formule beaucoup plus souple qu'un contrat à durée déterminée. «Même si le planning des salariés est fixé à l'avance pour l'année, il est toujours possible de négocier avec les autres entreprises leurs dates d'arrivée et de départ. Une manière de se rendre mutuellement service entre employeurs, sans nuire au fonctionnement du groupement.»

Des salariés fidèles et opérationnels. La stabilité des salariés, majoritairement employés en CDI, constitue un avantage de taille. Grâce au groupement, les «morceaux d'emploi» présents dans chaque entreprise se transforment en emplois à temps plein. Résultat: les collaborateurs sont immédiatement opérationnels et, qui plus est, fidèles. Un argument qui a poussé Joffrey Roussel à adhérer à la formule. A la tête de la société Roy, qui fabrique des portails métalliques, le p-dg ne tarit pas d'éloges sur les salariés du groupement. «Ils sont fiables et impliqués, alors qu'un intérimaire peut partir du jour au lendemain si l'entreprise ne lui convient pas», observe-t-il. D'ailleurs, il n'est pas rare de voir un patron embaucher une personne qui a fait ses preuves. Une pratique qui semble fort bien admise par les adhérents. «Il règne une telle solidarité au sein du groupement que l'embauche d'un salarié par l'un de ses co-employeurs n'a jamais posé le moindre problème, souligne Michel Barbaise, p-dg de Cegedis. Mais le maître-mot reste le partage des ressources.» Une solidarité déjà inscrite dans les statuts, puisque les adhérents sont solidairement responsables des dettes sociales et fiscales du groupement. «Les entreprises sont adhérentes, et non clientes. Cela veut dire qu'elles s'engagent les unes envers les autres», rappelle Philippe Macel. Pour lui, les occasions de mesurer leur implication n'ont pas manqué. En l'an 2000, une entreprise de 200 personnes a dû réduire ses effectifs et se séparer des six salariés que le groupement mettait à sa disposition. «L'esprit d'équipe a tout de suite joué. Deux jours après, ils avaient tous retrouvé un poste.» A l'écoute des besoins de ses adhérents, le président s'est fixé comme prochain objectif de recruter un DRH. Un luxe habituellement réservé aux grandes entreprises, qui devient possible à plusieurs.

 

 

GROUPEMENT EURE-ET-LOIR Repères

- ACTIVITE: Groupement d'employeurs
- DIRECTEUR GENERAL: Philippe Macel
- VILLE: Chartres (28)
- ANNEE DE CREATION: 1999
- NOMBRE D'ADHERENTS: 134
- EFFECTIF DE SALARIES MIS A DISPOSITION: 150 salariés

L'OEIL DU CONSULTANT

Un bon exemple d'entraide à l'échelle locale


PIERRE-YVES POULAIN, délégué général de l'Association nationale des directeurs et cadres de la fonction personnel (ANDCP)


Face au besoin croissant de flexibilité des entreprises, le groupement d'employeurs constitue, selon Pierre-Yves Poulain, une excellente réponse. «Seule, une petite entreprise a une marge de manoeuvre restreinte.
L'unique moyen, pour elle, de viser haut est de s'associer avec d'autres structures. Le groupement d'employeurs est une bonne illustration de cette solidarité de terrain entre acteurs privés.» L'expert promet, d'ailleurs, un bel avenir à ce type d'association. «C'est un dispositif innovant et vertueux, qui satisfait les besoins à court terme des employeurs sans nuire à l'intérêt des collaborateurs.» Comme le montre l'exemple chartrain, cette organisation ne peut se décréter au niveau national. «C'est une initiative spontanée, limitée à un bassin d'emploi et qui n'a pas été initialement prévue par la loi», rappelle Pierre-Yves Poulain. Il estime que «les membres de ce type de structure seront de plus en plus amenés à partager des cadres, ces derniers étant de moins en moins preneurs d'emplois à mi-temps».

CAS 2 Elles s'unissent pour percer à l'export

Fort d'une trentaine d'adhérents, le groupement Outilex a pour but de faciliter l'implantation des fabricants d'outillage français à l'étranger. Il organise leur participation à des salons et les aide à étudier des débouchés hors de l'Hexagone.

L'heure est au branle-bas de combat chez Séloron, petit fabricant stéphanois d'outillage. Concentrés, les huit salariés s'activent pour expédier dans les temps une commande vers... la Corée. Un événement qui ne doit rien au hasard, mais tout à l'appartenance de Séloron au groupement Outilex. Fort de 32 adhérents, Outilex a été créé il y a cinquante ans pour aider les petits fabricants français d'outillage à exporter leurs produits. Aujourd'hui, ses résultats ont de quoi faire pâlir de jalousie les grands groupes, puisqu'Outilex rayonne dans 141 pays et réalise le tiers de son chiffre à l'export. «Nous créons des synergies entre des PME aux gammes de produits complémentaires, donc non directement concurrentes», observe Franck Verguet, secrétaire général du groupement. L'adhésion coûte 880 Euros HT par an pour les entreprises réalisant moins de 1,5 MEuros de CA, et 2 500 Euros HT pour les autres. Une cotisation qui permet aux 32 PME de financer des stands collectifs sur les principaux salons de la profession. Ces derniers sont l'un des supports favoris d'Outilex. Depuis 2004, le groupement en organise trois à quatre par an. Un véritable atout pour ses adhérents qui, pour la plupart, n'ont pas les moyens de participer à de tels événements, sachant que tous se tiennent à l'étranger. En témoigne l'exemple d'Hervé Valliet, membre de l'organisation depuis dix ans. P-dg de Sori, société qui fabrique des coffrets métalliques, il a participé pour la première fois au salon Practical World à Cologne, l'un des plus importants du secteur. «Quand j'ai voulu y aller seul, on m'a répondu qu'il n'y avait plus déplace», relatet-il. Mais, grâce au groupement, les portes s'ouvrent comme par magie. Outre la visibilité qu'il a retirée, Hervé Valliet a bénéficié d'un appui logistique. Le groupement s'occupe de tout et met à disposition de ses membres un espace collectif où ils peuvent échanger en toute convivialité. Des services dignes d'un grand groupe, auxquels s'ajoutent une réunion d'information préalable et un débriefing pour comparer les retombées commerciales.

Des adhérents chouchoutés. Mais ce n'est pas tout. Depuis peu, le groupement réalise une enquête annuelle pour mesurer l'impact de ses actions. «Nous étudions les performances commerciales des adhérents pays par pays, pour repérer dans quelles zones nous sommes les plus efficaces», précise Franck Verguet. Pour certains, les retombées sont nettes. C'est le cas d'Alain Camarca, directeur commercial de SEA, une PME de 47 salariés qui fabrique des produits abrasifs. «Participer à un salon collectif me permet de rencontrer une centaine de prospects, témoigne-t-il. Deux à cinq deviennent des clients.» La preuve par les chiffres. L'an dernier, la petite PME a largement rentabilisé les 8 000 Euros qu'elle a déboursés pour le salon «The Big 5» de Dubaï: elle a réussi à y engranger 150 000 Euros de commandes.

Autre mission d'Outilex: servir d'informateur pour faciliter la prospection. Tous les trois mois, le groupement réunit les chefs d'entreprise pour les amener à partager les ren- seignements dont ils disposent sur telle ou telle zone géographique et sur leurs distributeurs étrangers. «Tout le monde joue le jeu, assure Franck Verguet. Le but est de mettre cartes sur table.» Un partage d'informations qui décuple l'efficacité commerciale de chacun. Pour accéder à cette manne, une seule condition: être membre actif. «En réunion, ce sont les adhérents qui font l'essentiel du travail. On n'adhère pas pour consommer de l'information, mais pour coopérer», avertit le secrétaire général. Une philosophie qui convient bien à André Peyron, p-dg de la société Emile Peyron. Depuis qu'il a adhéré, il y a trois ans, il a découvert de nouveaux débouchés commerciaux en Italie et en Belgique. Une aubaine pour ce chef d'entreprise dont la clientèle traditionnelle - l'Afrique et les Dom-Tom - s'appauvrissait. «Grâce à Outilex, je sais quels pays prospecter et j'ai acquis une vision plus globale de mon marché», explique-t-il. Certes, avec une petite affaire de 7 salariés, André Peyron sait qu'il pourra difficilement jouer un rôle de locomotive. Mais qu'importe. «Les échanges informels m'apportent déjà beaucoup. Si je souhaite courtiser un prospect lointain que je ne connais pas du tout, je me renseigne auprès des adhérents sur sa fiabilité.» Sans parler de l'effet réseau, vecteur de retombées parfois inattendues. Le seul bouche à oreille entre adhérents a permis à la petite société Séloron de conquérir le quart de ses clients à l'export. Il faut dire qu'au fil du temps, des liens d'amitié se tissent et des coopérations s'installent. A tel point que certaines entreprises organisent des déplacements à plusieurs, en Libye ou au Maroc, en s'appuyant sur le réseau d'adhérents d'Outilex.

OUTILEX - Repères

- ACTIVITE: Groupement d'exportateurs d'outillage
- VILLE: Paris (XIVe arrondissement)
- ANNEE DE CREATION: 1957
- NOMBRE D'ADHERENTS: 32
- CA CUMULE DES ADHERENTS: 210 millions d'euros

L'OEIL DU CONSULTANT

Un excellent coup de pouce pour démarrer à l'export


PIERRE-JEAN BAILLOT, directeur de l'internationalisation des PME à l'association Erai (Entreprise Rhône-Alpes International)


Selon Pierre-Jean Baillot, le vieil adage «l'union fait la force» reste d'actualité lorsqu'il s'agit d'exportateurs. «Le principal frein à l'export pour les PME est leur solitude. Elles savent rarement quelle stratégie adopter et manquent cruellement de moyens financiers.» Adhérer à un groupement leur permet de mutualiser les coûts et de partager des expériences. Mais pour que l'effet «groupe» fonctionne, «le chef d'entreprise ne doit pas tout en attendre». Il doit s'impliquer personnellement dans la démarche. Autre conseil: «Il ne suffit pas de participer à des salons et de récolter des cartes de visites. Il faut transformer ces contacts en commandes.» S'il estime judicieux d'avoir une démarche collective pour démarrer, PierreJean Baillot rappelle qu'elle devra se poursuivre par une démarche individuelle. «Les entreprises finiront par entrer en concurrence, ce qui relativise l'intérêt du groupement. Sauf si celui-ci anticipe leurs besoins et propose de nouveaux débouchés, ce qui peut être le cas d'Outilex.»

CAS 3 Elles se regroupent pour mieux acheter

Face à la hausse des matières premières, sept plasturgistes non concurrents ont décidé d'acheter ensemble afin d'obtenir de meilleures conditions. Ils ont, depuis, élargi le système à tous les achats stratégiques.

Devinette: quel point commun y a-t-il entre un chauffe-biberon, une jardinière et un tube de crème anti-rides? Réponse: tous trois sont réalisés en matière plastique. Et surtout, bien que ces trois articles proviennent d'usines bien distinctes, leur composant principal a peut-être été acheté par la même personne, Marie-Dominique Poggi, animatrice d'un groupement d'achats baptisé GMB. Né en 2002 à l'initiative de trois chefs d'entreprise qui ont décidé de trouver une solution au problème infernal de la hausse des matières premières, GMB fédère aujourd'hui sept PME de plasturgie non concurrentes. Et - consécration suprême - il a été rejoint, en 2003, par un géant de l'agroalimentaire, le groupe Sodiaal, venu frapper à sa porte afin de faire profiter à sa filiale Candia, puis à son partenaire 3A (produits laitiers), des conditions optimales négociées par les acheteurs de GMB.

Car petites ou grandes, les entreprises consommatrices de plastique ont toutes souffert du même mal au cours des dix dernières années. Son nom? La hausse des prix de ce matériau. «A titre d'exemple, indique Jean-Jacques Bouillard, président de Bouillard SAS, une PME de 100 salariés spécialisée dans la production d'articles de jardinage, le polypropylène, l'un des matériaux que nous utilisons le plus, coûtait environ 650 Euros la tonne en 2002; il en vaut le double aujourd'hui!» Une inflation qui aurait entraîné les petits plasturgistes français dans la tourmente s'ils n'avaient pas eu l'idée ingénieuse de se regrouper pour peser, tous ensemble, sur les tarifs de leurs fournisseurs, des groupes pétroliers internationaux. Et ça marche. «Nous avons amélioré nos conditions d'achats de façon significative, confie Jean-Jacques Bouillard. Chacun de nous est bien trop petit pour imposer ses conditions à des multinationales. Mais ensemble...» Le fabricant d'articles de jardinage reste toutefois discret sur le montant exact des ristournes. Il n'empêche. «Si nous n'avions pas trouvé cette solution, la hausse aurait probablement eu raison de notre rentabilité», analyse-t-il a posteriori. Car pour une PME dont les clients se nomment Gamm'Vert ou Jardiland, pas question de revoir les prix de vente des produits finis. Seule solution: grignoter sur ses propres marges. Une stratégie que Jean- Jacques Bouillard, pas plus que ses homologues de GMB, n'aurait pu adopter durablement.

Une organisation faite pour durer. Constitué en SAS (société anonyme simplifiée), GMB est dirigé, depuis toujours, par l'un de ses trois fondateurs, Christine Millet, également présidente de Millet-Marius (injection de pièces techniques). «Nous aurions pu nous contenter d'un groupement d'intérêt économique, mais nous avons estimé que ce statut de SAS nous donnerait une plus grande stabilité», argumente Jean- Paul Vulliermet, président du directoire de Beaba, une petite entreprise spécialisée dans les articles de puériculture, lui aussi à l'origine de GMB. De fait, l'organisation a été pensée pour traverser les années. En rejoignant GMB, chaque adhérent signe un mandat juridique stipulant qu'il délègue au groupement le pouvoir d'acheter pour son compte. Il verse aussi une cotisation représentant de 0,25 à 1% du budget annuel qu'il confie. La somme des cotisations correspond au budget de fonctionnement de la SAS, soit le salaire de sa directrice des achats et des frais divers. En contrepartie, Marie-Dominique Poggi oeuvre pour obtenir à tous de meilleurs tarifs. Entrée fin 2003 chez GMB, la jeune femme était, auparavant, directrice des achats dans l'industrie. Pour elle, les approvisionnements en matières premières n'ont donc pas de secret. C'est pourquoi après s'être penché sur les matériaux plastiques, GMB s'est intéressé aux emballages, prestations de travail temporaire, location automobile... «Désormais, sont concernées presque toutes les familles d'achats stratégiques», résume Marie-Dominique Poggi. Pour cela, GMB s'est doté d'une méthodologie très efficace: chaque famille d'achats est suivie, sous la houlette de l'animatrice de GMB, par l'acheteur d'un des adhérents, qui rend compte mensuellement de son travail à l'occasion du comité opérationnel d'achats. «C'est un véritable travail d'équipe, commentet-elle. En se spécialisant dans telle ou telle catégorie de produits ou de service, chaque département achats obtient de meilleurs résultats. Et il en fait profiter les six autres adhérents.» Exemple chez Beaba: au lieu des quatre véhicules qu'elle loue pour son propre compte, la petite affaire de puériculture accède à la puissance d'achat d'une grande entreprise, puisqu'à eux tous, les membres de GMB louent quelque 50 véhicules. Une force qui leur confère une capacité réelle de négociation. Selon son dirigeant, Jean-Paul Vulliermet, Beaba a réalisé une économie moyenne de 5 à 6% sur les budgets gérés par GMB.

Et demain? Pour les trois fondateurs, le groupement sera d'autant plus efficace qu'il poursuivra sa croissance en accueillant de nouveaux membres. Sans toutefois déroger à ses règles fondamentales: pas question de faire entrer un concurrent de ses actuels membres. Pour se présenter, une entreprise doit être cooptée par un adhérent. Autre principe: accueillir des patrons propriétaires plutôt que des dirigeants salariés, dont les décisions pourraient être commanditées par un actionnaire poursuivant d'autres priorités. Une indépendance qui constitue - peutêtre - la clé de voûte de son succès.

GMB - Repères

- ACTIVITE: Groupement d'achat
- STRUCTURE JURIDIQUE: SAS
- VILLE: Saint-Martin-du-Fresnes (Ain)
- ANNEE DE CREATION: 2002
- NOMBRE D'ADHERENTS: 9

L'OEIL DU CONSULTANT

Une démarche pertinente de centrale d'achats


PATRICK CAVERIVIERE, consultant-formateur en achats chez Demos Et auteur de deux ouvrages de référence: «Le guide de l'acheteur» (2002) et «Profession: acheteur» (2005), Ed. Demos


Pour Patrick Caverivière, expert en stratégie d'achats, la démarche de ces sept entreprises mérite d'être applaudie: «II est évident qu'une PME achète d'autant mieux qu'elle accède à une certaine puissance d'achat La solution du regroupement, empruntée au système des centrales d'achats, est donc judicieuse.» Pour lui, la règle de la nonconcurrence est une condition de succès.
«Il me semble impératif de ne jamais y déroger», précise-t-il. Quanta la présence, au sein de GMB, de deux grandes entreprises, l'expert la juge également opportune: «Cela augmente la capacité d'approvisionnement du groupement tout en confortant sa crédibilité vis-à-vis des fournisseurs.» Autre point salué par Patrick Caverivière: le principe de délégation d'une famille d'achats aux acheteurs des différents adhérents. «C'est une excellente initiative, à condition que les membres de GMB s'engagent à respecter les accords pris en leur nom par d'autres.»

CAS 4 Elles fusionnent pour conquérir les géants de l'aéronautique

Pour séduire les marchés de l'aéronautique et développer des technologies en commun, quatre PME ont uni leur capital. Elles forment le groupe MontBIanc Technologies.

«N ous sommes en train de conclure un marché de 20 millions d'euros, qui s'étalera sur dix ans», se félicite Christian Van Hecke, le président du groupe MontBIanc Technologies. Une belle affaire, pour ce groupe de 55 salariés. Cette réussite, le dirigeant la doit beaucoup à la constitution, en mars 2005, d'une holding née de la fusion de quatre PME innovantes (Smac, Epcots, VN Composites et Adetests). «Aujourd'hui, si des PME veulent figurer dans la short-list des grands de l'industrie aéronautique et militaire, elles n'ont pas d'autre choix que de se regrouper», observe-t-il. A fortiori dans les industries de pointe telles que la haute protection industrielle, métier de MontBIanc Technologies. Dans ce domaine, les donneurs d'ordres ont pour nom Airbus, DCN, Dassault ou encore Thaïes. Les contrats se chiffrent en millions d'euros et durent, en moyenne, dix ans. «Nos clients exigent de leurs fournisseurs qu'ils aient une taille critique, observe Jean-Paul Tronquoy, gérant de VN Composites, qui fabrique des pièces techniques en matériaux composites. Avec un capital social de 15000 euros et moins de 10 salariés, je faisais figure d'électron libre.» Réputées fragiles financièrement, les petites structures n'ont donc pas les faveurs des grands groupes, qui préfèrent travailler avec des prestataires assez généralistes plutôt que de multiplier les interlocuteurs.

Une fusion en douceur. Mais pourquoi, plutôt que de nouer un simple partenariat, les quatre petites sociétés ont-elles pris le parti de se marier? «Un accord capitalistique a beaucoup plus de poids qu'un accord commercial, qui peut être très facilement dénoncé», répond Christian Van Hecke. De fait, le quatuor semble faire ses preuves. Depuis sa création, MontBIanc Technologies a bien des atouts à faire valoir. Au premier rang desquels son assise financière, le groupe s'étant doté d'un capital social d'1 million d'euros. Quant au regroupement lui-même, il s'est opéré sans heurts, l'actionnaire majoritaire de MontBIanc Technologies, Serge Seguin, étant déjà actionnaire de Smac et VN Composites.

«Les actionnaires sont restés les mêmes, indique Christian Van Hecke, mais au lieu de posséder une part, majoritaire ou non, de leur entreprise, les dirigeants sont devenus actionnaires minoritaires du groupe.» Serge Seguin possède 88% de la holding, qui détient elle-même la totalité du capital des filiales. Les 12% restants étant répartis à parts inégales entre les quatre dirigeants de filiales, Christian Van Hecke, Philippe Robert, Jean-Paul Tronquoy et JeanPaul Aldon. «Nous possédons ainsi une plus grande capacité d'autofinancement et nous pouvons affecter des fonds à une filiale sans que celle-ci ait besoin de solliciter son banquier», argumente Christian Van Hecke.

Mais là ne s'arrêtent pas les avantages. Intéressées aux résultats du groupe, les filiales répondent à des appels d'offres en commun, misant sur la complémentarité de leurs métiers. Un exemple? Il y a quelques mois, MontBIanc Technologies a décroché un contrat de 10 millions d'euros avec Boeing. Désormais, la PME lui fournit des pièces en caoutchouc pour insonoriser le fuselage de son Boeing 787. Pour remporter la donne, Smac et VN Composites ont développé un procédé commun. Un bel exemple de coopération en recherche et développement, autre point fort du groupement. Pour preuve, près de 80% des modèles et solutions actuellement proposés par le groupe n'existaient pas il y a cinq ans. Récemment, un bureau d'études collectif a d'ailleurs été mis en place pour les travaux dépassant le strict cadre de l'entreprise. Et tout le monde y gagne. Y compris VN Composites, la plus petite entité du groupe, qui bénéficie, par ce biais, de l'appui d'un directeur technique.

@ D.R.

Grâce à sa présence, Jean-Paul Tronquoy, dirigeant de VN Composites, prévoit d'augmenter son chiffre d'affaires de 10% au cours des deux prochaines années. Quant au groupe, ses revenues devraient passer de 5 à 16 millions d'euros d'ici à 2010.

 

 

 

 

MONTBLANC TECHNOLOGIES - Repères

- ACTIVITE: Haute protection appliquée en milieu industriel
- NOMBRE D'ENTREPRISES: 4 (Smac, Epcots, VN Composites et Adetests)
- DIRIGEANT: Christian Van Hecke, 59 ans
- ANNEE DE CREATION: 2005
- EFFECTIF: 66 salariés
- CA 2005 CONSOLIDE: 5,3 millions d'euros

@ D.R.

«L'OEIL DU CONSULTANT

Les dirigeants devront veiller à rester solidaires


GEORGES MARTIN, consultant senior chez Storqua, cabinet de conseil en stratégie commerciale


Selon Georges Martin, «la fusion de plusieurs PME au sein d'un groupe est trop souvent un pis-aller». C'est pourquoi le consultant salue la création de MontBIanc Technologies. «La corbeille de la mariée est en l'occurrence, bien remplie: quatre PME, aux portefeuilles d'activité complémentaires et non concurrents, s'adressant au même marché, solvable, ne peuvent que retirer des synergies évidentes en unissant leurs ressources.» Mais avec le succès, selon l'expert, le groupe sera nécessairement conduit à investir. «Les dirigeants devront faire des choix difficiles qui pourront fragiliser leur entente.» Et en cas de litige? «Ils devront privilégier l'une de leurs activités, donc l'une de leurs filiales, mais devront, pour ce faire, s'entendre sur les critères de sélection.» Est-ce celle qui rapporte aujourd'hui ou celle qui rapportera demain? «A l'avenir, répond Georges Martin, la rentabilité des différentes branches sera peut-être inégale. La tentation sera donc très forte de se séparer des activités les moins performantes.» Son conseil? «Rester solidaires, quelles que soient les circonstances. C'est la partie la plus difficile à jouer sur le long terme.»

 
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Stéfanie Moge-Masson, Hélène Duvigneau

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