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ELLES COURENT, ELLES COURENT, LES GAZELLES

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Les PME sont sur le devant de la scène. Il y a deux ans, le gouvernement a créé de toutes pièces un statut spécifique: l'entreprise de croissance, joliment baptisée «gazelle». A la clé, des avantages fiscaux et sociaux. Qui sont ces entreprises? Ce nouveau statut permet-il réellement de doper leur croissance? Témoignages.

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@ CORBIS

Lionel Hirsch n'en revient toujours pas. En mai 2006, le dirigeant de Cidelec a reçu un courrier estampillé «République française», l'informant du nouveau statut de gazelle de son entreprise. Pour avoir connu une progression de son chiffre d'affaires de 34% entre 2003 et 2004, ce fabricant de luminaires de 22 salariés fait partie des 2 000 PME hexagonales à plus forte croissance. «Au début, je n'y croyais pas. J'ai même pensé que c'était une plaisanterie», confie-t-il. Pourtant, un mois plus tard, c'est sous les ors de la République, en présence du Premier ministre en personne, que le chef d'entreprise se voit remettre le diplôme en bonne et due forme de son nouveau statut de gazelle. Vous avez dit gazelle? Outre les mammifères à cornes répandus dans les savanes africaines, les gazelles symbolisent aussi une certaine catégorie de PME. Qui, comme les animaux éponymes, avancent au pas de course. «Ce sont des entreprises françaises de 20 à 250 salariés qui ont connu une croissance de leur masse salariale de plus de 15% durant les deux derniers exercices», expliquait Renaud Dutreil, en mars dernier, lors d'une soirée de célébration des gazelles. Un an auparavant, le ministre des PME a voulu mettre l'accent sur ces sociétés en pleine croissance. En effet, ces futures pépites de l'économie française ne sont pas légion. Sur 2,5 millions d'entreprises recensées par l'lnsee dans notre pays, seules 5 000 ont atteint le cap de 250 salariés, d'après les statistiques du ministère des PME. Insuffisant. «Le problème, en France, est d'arriver à passer le seuil critique de la petite à la moyenne entreprise, pour parvenir à créer les champions économiques de demain», indique Edith Henrion d'Aubert, présidente de Croissance Plus, une association de dirigeants d'entreprise à forte croissance. Pour les aider à passer ce cap, Renaud Dutreil a donc pris le taureau par les cornes et créé un statut spécifique, la PME de croissance. Approuvé par le Parlement fin 2006, ce nouveau statut est assorti d'une série d'avantages fiscaux et sociaux, tels qu'un report de charges sociales, le remboursement du crédit d'impôt recherche et même un gel de l'impôt sur les sociétés (voir notre encadré p. 31). Le dispositif profite, depuis deux ans, à quelque 6 000 entreprises hexagonales. Un chiffre que le ministère des PME espère doubler d'ici à 2010. Ambitieux? Peut-être, mais le dispositif est jugé révolutionnaire par les experts. «Il constitue une vraie réhabilitation des sociétés en croissance, estime Jean-Marc Durand, directeur du développement d'Oséo. Jusqu'ici, le gouvernement s'était contenté de favoriser les créateurs d'entreprise. Aujourd'hui, il soutient les PME.»

NICOLAS BERGERAULT, président de L'Atelier des Chefs


Grâce au statut de gazelle, j'ai économisé 90 000 euros d'IS

Création d'ateliers en France et à l'étranger, interviews de journalistes, recrutement de nouveaux talents... Depuis quelques mois, Nicolas Bergeraul test au four et au moulin. Sa jeune PME, qui propose des cours de cuisine, fait un malheur auprès des citadins gastronomes. Depuis sa création en 2004, L'Atelier des Chefs a quasiment décuplé son chiffre d'affaires, passant de 350 000 à 3 millions d'euros en l'espace de deux ans, «Nous avons eu la bonne idée au bon moment», confie modestement Nicolas Bergerault, qui enregistre 300 demandes de particuliers de cours de cuisine par jour. Pas facile de faire face à une croissance si fulgurante, «Pour bénéficier du statut de gazelle, j'ai déposé un dossier au ministère des PME faisant état de l'évolution de la masse salariale de l'entreprise entre 2005 et 2006», raconte le dirigeant. Quelques semaines plus tard, il reçoit son diplôme de gazelle 2006. Un nouveau statut qui donne à L'Atelier des Chefs un sacré bol d'air pour financer sa croissance. «J'ai profité du gel de l'impôt sur les sociétés en 2006, ce qui m'a permis d'économiser 90 000 euros.» De quoi ouvrir deux nouveaux ateliers cette année et quatre autres l'année prochaine.

L'ATELIER DES CHEFS - Repères

-ACTIVITE: Cours de cuisine
- VILLE: Paris
- FORME JURIDIQUE: SAS
- DIRIGEANTS: Nicolas et François Bergerault, 30 et 38 ans
- ANNEE DE CREATION: 2004
- EFFECTIF: 35 salariés
- CA 2006: 3 millions d'euros
- RESULTAT NET 2006: en attente

EDITH HENRION D'AUBERT, présidente de Croissance Plus

Il est impératif d'aider les entreprises qui réussissent à se développer davantage.

De petites entreprises qui raflent les parts de marché. Mais qui sont les gazelles, ces championnes économiques de demain? Leur fulgurante croissance n'est, en tout cas, pas le fruit du hasard. Alors, quel est leur secret? La plupart d'entre elles ont fait preuve d'originalité et d'innovation pour se démarquer de leurs concurrents et rafler des parts de marché. Ce dont peut témoigner Véronique Cheminade, la présidente de Net et Clair. Cette entreprise de nettoyage, basée dans l'Hérault, a connu une courbe de croissance explosive dès sa deuxième année d'activité: après avoir quasiment doublé en 2003, son chiffre d'affaires a crû de 38% en 2004. Son secret? Avoir réussi à se démarquer des mastodontes du nettoyage par un service artisanal. «Nous sommes beaucoup plus proches de nos clients», analyse Véronique Cheminade. «Par exemple, je démarche moi-même les prospects et leur assure un service sur mesure que peuvent difficilement leur apporter de grandes sociétés de nettoyage.» Sans compter que cette ancienne commerciale a su s'associer à un ancien cadre d'une grande entreprise de nettoyage, dont le carnet d'adresses lui a été précieux. Résultat: en quatre ans, sa petite affaire de 32 salariés a happé et fidélisé plus d'une centaine de clients. Son statut de gazelle 2005? La dirigeante n'en est pas peu fière. «C'est une vraie satisfaction d'avoir été reconnue au plan national», confie-t-elle. «C'est la preuve que nos efforts pour se développer n'ont pas été vains. Cette nouvelle reconnaissance nous incite à continuer à prendre de l'essor.»

Tout savoir sur le statut de gazelle

La loi de finances 2007 a donné naissance à un nouveau statut, celui de PME de croissance, joliment baptisée «gazelle» L'objectif? Apporter à ces entreprises des aides fiscales et sociales, afin de faciliter la poursuite de leur croissance.

- Qui peut en bénéficier?

La sélection des PME se fait sur des critères objectifs. L'effectif de la PME de croissance doit ainsi être compris entre 20 et 250 salariés. Les dépenses de personnel doivent, elles, croître d'au moins 15% par exercice, au cours de deux exercices consécutifs. Cette croissance de la masse salariale traduit alors le développement de l'emploi. Enfin, l'entreprise doit être assujettie à l'impôt sur les sociétés.

- Quels avantages?

- Une réduction du montant de l'impôt sur les sociétés

Le principe? Un gel de l'augmentation de l'impôt sur les sociétés au cours de la période de croissance. Les économies réalisées pourront ainsi servir à financer de nouveaux investissements et de nouvelles embauches. A noter: l'accès au statut de PME de croissance est apprécié sur la base des exercices comptables annuels, exemple: une PME bénéficiera de ce statut pour l'année fiscale 2006 si ses dépenses en personnel ont crû d'au moins 15% en 2004 et 2005,

- Un report d'une part des cotisations sociales et patronales

Le principe: reporter d'un an le différentiel des cotisations patronales entre deux années, lié à l'accroissement de la masse salariale. L'objectif: ne pas se voir imputer immédiatement le coût d'un nouveau recrutement, mais différer d'un an cette charge. Ainsi, la PME de croissance pourra comparer les cotisations patronales dues en 2007 à celles de 2006. Elle pourra alors reporter l'excédent de charges d'un an, pour ne le payer qu'en 2008.

- Le remboursement du crédit d'impôt recherche

Afin d'encourager les entreprises de croissance qui investissent dans l'innovation et la recherche et sont éligibles au crédit d'impôt recherche, un remboursement immédiat de leur créance est prévu. Elles bénéficieront ainsi d'un avantage de trésorerie important.


- Quelles démarches faut-il effectuer?
Aucune démarche n'est à accomplir. Les entreprises qui respectent les critères ci-dessus et pensent être éligibles au statut de la PME de croissance font directement le calcul de la réduction d'impôt ou du report des charges patronales sur leur feuille d'impôt et sur leur déclaration Urssaf. Néanmoins, sur le site www.gazelles.pme.gouv.fr, les entreprises peuvent télécharger un document permettant à une entreprise de savoir si elle respecte effectivement les critères d'éligibilité.

Des aides indispensables. Car la vie d'une gazelle n'a rien d'un long fleuve tranquille. Ces PME, dont la croissance est souvent fulgurante, ont besoin d'être épaulées. Sans quoi la chute risque d'être rapide et brutale. «Il est impératif d'aider les entreprises qui réussissent à se développer davantage», martèle Edith Henrion d'Aubert, de Croissance Plus. Le danger qui les guette? Le défaut de financement. «Ces entreprises, qui s'autofinancent, se heurtent souvent à des problèmes de trésorerie et hésitent à créer des emplois de peur de mettre en péril leur équilibre financier», renchérit la présidente de l'association, qui fédère 300 entreprises à forte croissance, parmi lesquelles figurent 10% de gazelles. Confrontées à une montée rapide de leurs charges, nombre de ces gazelles doivent puiser dans leur fonds de roulement pour faire face à la hausse de leur carnet de commandes. D'où ce paradoxe: parce que la croissance coûte cher, certaines entreprises, pour faire face à leurs charges, sont contraintes de freiner leur développement! Ce dont peut témoigner Véronique Cheminade, de Net et Clair. L'année où son affaire de nettoyage a vu doubler son business, la dirigeante a agité le chiffon rouge, «Il aurait été suicidaire de continuer à se développer, car l'entreprise était contrainte de s'endetter dans de nouveaux équipements et des embauches pour faire face aux nouvelles commandes.» Pour éviter une crise de croissance, la dirigeante de Net et Clair doit ronger son frein: elle rétrécit sa cible, en éliminant 20% de ses anciens prospects, et augmente ses tarifs de 15%. Résultat, un chiffre d'affaires quasiment divisé par trois, mais «une croissance maîtrisée», qui rassure sa dirigeante.

PATRICK MOYNOT, président de Total Music

En tant que gazelle, j'attire les investisseurs

«Quand j'ai entendu parler du dispositif Gazelle, je me suis d'abord méfié», avoue Patrick Moynot, le patron de Total Music. Le dirigeant de ce distributeur d'accessoires et d'appareils de musique redoutait d'avoir à constituer un dossier administratif complexe. Mais il a révisé très vite sa position. «Une simple attestation déclarative sur l'évolution de la masse salariale a suffi», se souvient-il, encore surpris d'une telle simplicité. En mars dernier, son entreprise est donc estampillée PME de croissance. Il faut dire qu'entre 2005 et 2006, l'effectif de Total Music a bondi de 30% en raison d'une opération de croissance externe. Le chef d'entreprise se réjouit d'avoir obtenu cette distinction, Premier avantage, et non des moindres: le report des cotisations patronales pour les nouvelles recrues, «Cette mesure permet de diminuer la tension sur la trésorerie, confie Patrick Moynot, En un an, nous devrions pouvoir réinvestir 100 000 euros.» Mais pour le président de Total Music, le premier atout des gazelles est ailleurs, «Grâce à ce statut, nous avons été fortement médiatisés.» Et pour cause: Total Music a fait l'objet d'un article d'une demi-page dans le prestigieux quotidien Le Monde. Une nouvelle notoriété qui a attiré l'attention des investisseurs, à un moment où le dirigeant projetait d'ouvrir son capital. Depuis la remise du diplôme, Patrick Moynot a été contacté par cinq partenaires potentiels.

TOTAL MUSIC Repères

- ACTIVITE: Distribution de matériel hi-fi
- VILLE: Paris
- FORME JURIDIQUE: SAS
- DIRIGEANT: Patrick Moynot, 35 ans
- ANNEE DE CREATION: 2000
- EFFECTIF: 37 salariés
- CHIFFRE D'AFFAIRES 2006: 7,9 millions d'euros
- RESULTAT NET 2006: 1 million d'euros

SONIA RAMEAU, directrice générale de Notrefamille.com

Le statut de gazelle n'apporte pas seulement des avantages financiers. Il récompense un travail collectif et renforce la fierté d'appartenance à l'entreprise.

Un bol d'air dans la trésorerie. C'est justement pour remédier à cette situation que le nouveau statut de PME de croissance a vu le jour. Pour Renaud Dutreil, «l'objectif est d'aider les futurs champions de l'économie française à crever le plafond de verre qui les empêche de grandir». Concrètement, le dispositif inventé par le ministre des PME donne droit à toute une batterie d'avantages fiscaux et sociaux. Au premier rang desquels figure un gel de l'impôt sur les sociétés permettant de neutraliser la pression fiscale durant la période de croissance. «Cette mesure permet aux petites entreprises de réinvestir leurs économies fiscales en créant des emplois ou en modernisant leurs équipements», argumente Jean-Marc Durand, d'Osée.

EN CHIFFRES
Une majorité de jeunes entreprises

Le dispositif voulu par le ministère des PME ratisse large. Une enquête statistique, menée en 2006 par le ministère auprès des 4 000 premières gazelles, est riche d'enseignements. Premier constat: ces PME ont passé le stade de la jeune pousse puisque plus d'une sur deux est âgée de 2 à 10 ans. Selon la même étude, les principaux obstacles qui freinent leur développement sont - sans surprise - la recherche de collaborateurs qualifiés (36%) et la couverture de leurs besoins en trésorerie (24%)

Depuis 2006, quelque 6 000 PME hexagonales ont pu profiter de ce coup de pouce fiscal. Parmi elles, l'agence de webmarketing Stockho. Avec une croissance annuelle de 70% depuis 2002, cette société de 100 salariés fait partie des premières gazelles à avoir été distinguées par le gouvernement. Face à l'ascension de l'entreprise, son patron, Bertrand Fredenucci, s'est alors rapproché des services du ministère des PME afin de bénéficier du statut de gazelle. Bien lui en a pris. Après avoir rempli sa feuille d'impôts, le patron de Stockho a pu économiser la bagatelle de 80 000 euros. Il s'en frotte les mains. «Nous allons enfin pouvoir accélérer notre croissance, au lieu de la freiner», confie-t-il, lui qui envisage d'anticiper le recrutement de deux salariés courant 2007. Comme lui, les chefs d'entreprise applaudissent ce bol d'air salutaire. Désignée PME de croissance cette année, Hopscotch, agence de communication parisienne de 80 salariés, va, elle aussi, réaliser de belles économies d'IS. «Au vu des premiers mois de l'année, ce gel fiscal devrait représenter plusieurs dizaines de milliers d'euros», anticipe Jérôme Lacombe, son dirigeant. Ce qui lui permet de voir l'avenir sous un soleil radieux. «Ce coup de pouce fiscal va améliorer notre trésorerie. Il va nous offrir la marge de manoeuvre nécessaire pour envisager de nouvelles embauches.» Cette année, le dirigeant envisage d'accroître son effectif de 15%.

Mais ce soutien financier n'est pas le seul avantage du dispositif gazelle. Celui-ci apporte, en outre, une belle reconnaissance à ses bénéficiaires et, surtout, à leur personnel. Le statut gazelle a ainsi mis du baume au coeur des 22 collaborateurs du site Notrefamille.com. Quand ses deux dirigeants, Toussaint Roze et Sonia Rameau, ont reçu le prix gazelle en mars dernier, ils n'ont pas hésité à sabler le Champagne en équipe. «Au-delà des avantages financiers, c'était la reconnaissance d'un travail collectif, témoigne Sonia Rameau, directrice générale de la PME parisienne. Indéniablement, cela a renforcé la cohésion et la fierté d'appartenance à la société.» Même si l'impact du statut de gazelle reste difficilement mesurable, il n'en est pas moins réel. Chez Stockho, l'enthousiasme du personnel n'est pas passé inaperçu. «Certains collaborateurs ont pris l'initiative de créer une vidéo afin d'informer nos clients et partenaires que l'entreprise avait été élue gazelle», se rappelle Bertrand Fredenucci, le patron de l'agence de webmarketing. Slogan, mise en scène d'une poignée de salariés... Le nouveau statut de la PME a permis de consolider la cohésion de l'équipe.

Des critères contestés. Reste que le statut de gazelle a déçu certains analystes. Si la philosophie de ce nouveau dispositif est unanimement saluée, des voix s'élèvent pour en critiquer certaines modalités. A commencer par le critère de sélection des gazelles: l'évolution de la masse salariale. Pour Jean-François Roubaud, président de la CGPME, «il ne prend pas en compte les sociétés qui ont peu recruté, mais qui, en revanche, ont réalisé d'importants investissements productifs pour se développer». Plutôt que l'indice de progression de la masse salariale, le représentant de la confédération des petites et moyennes entreprises aurait préféré que l'on tienne compte des investissements réalisés au cours des trois dernières années. En outre, le président de la CGPME redoute que ce nouveau statut n'ait (trop) la faveur des investisseurs. Ce qui pourrait pénaliser les autres PME, celles qui ne connaissent pas de progression forte de leur masse salariale mais ont tout autant besoin de financements. Pour Jean-François Roubaud, «le risque est d'opposer les entreprises labellisées aux autres».

Un autre reproche semble poindre, en provenance, cette fois, des petites entreprises elles-mêmes: le manque d'informations dont disposent les entreprises «élues». DBB, éditeur de logiciels varois de 30 salariés, est l'une des premières PME à avoir été élues gazelle, en 2006. Passée l'excitation des premières semaines, Frédéric Sastrel a vite déchanté. «Après que j'ai reçu mon diplôme, aucune information me détaillant des avantages auxquels je pouvais avoir droit ne m'a été communiquée, s'insurge le chef d'entreprise. Pour le moment, mon comptable ne sait pas comment, ni quand nous pourrons bénéficier des avantages fiscaux promis.» Un cas isolé? Sûrement pas. Quand Véronique Cheminade, la dirigeante de Net et Clair, s'est rapprochée de l'Urssaf pour bénéficier d'un report de charges patronales, personne, dans le département de l'Hérault où elle est installée, n'avait pas entendu parler du dispositif Gazelle. «Pour le moment, ce statut se résume à une belle promesse», tempête la chef d'entreprise. Comme elle, les dirigeants sont nombreux à attendre des informations sur la marche à suivre pour bénéficier de ce statut avantageux. En vain. Que s'est-il donc passé? Le projet du gouvernement s'est-il heurté à la lenteur de l'administration fiscale?

JEROME LACOMBE, dirigeant de Hopscotch

Grâce à ce coup de pouce fiscal, je vais pouvoir embaucher 15% de personnel en plus.

Une mise en application timide. Le ministère des PME admet que les administrations prennent leur temps pour relayer le dispositif sur le terrain. «Un certain retard a été pris; le personnel de l'administration fiscale n'a pas encore été totalement formé à ce nouveau dispositif. Il faut être patient», admet-on au ministère des PME. Renaud Dutreil l'avoue lui-même. «J'avais souhaité que ce statut soit automatiquement appliqué par l'administration fiscale sans que les entreprises aient effectué la moindre démarche. Cela n'a pas été décidé pour ce projet», déclarait le ministre des PME, lors d'une soirée de remise des prix gazelles au mois de mars dernier. En attendant que l'administration relaie le dispositif, est-ce aux entreprises d'effectuer elles mêmes la démarche? Assurément. «Les sociétés qui pensent satisfaire aux critères doivent déduire elles-mêmes, sur leur feuille d'impôts, les montants d'économies auxquels elles ont droit», explique-t-on au ministère des PME. Renaud Dutreil a d'ailleurs bien conscience de ces dysfonctionnements: pour permettre aux petites structures de s'assurer qu'elles répondent aux critères d'éligibilité, il a lancé un site dédié aux gazelles et créé de toutes pièces un document permettant de faire le calcul de ce nouveau statut, ainsi qu'un guide téléchargeable qui reprend, point par point, les critères d'éligibilité et les avantages du statut de PME de croissance, assorti de détails et d'exemples. De quoi mener, pas à pas, le travail de pédagogie et d'information tant attendu.

JEAN-MARC DURAND, directeur du développement d'Oséo

Si le statut de gazelle ne change pas le quotidien des entreprises, il leur apporte une bouffée d'oxygène.

Reste que le statut de gazelle n'a rien de décisif. «Un tel dispositif est, certes, une vraie bouffée d'oxygène pour les petites et moyennes entreprises, mais cela ne va pas changer le quotidien d'une société», nuance Jean-Marc Durand, directeur du développement d'Oséo. Pour l'expert, le dispositif mis en place par Renaud Dutreil n'est qu'une aide, parmi tant d'autres, visant à faciliter la gestion d'une société. Un sentiment que partagent les chefs d'entreprise. Car, une fois passée l'effervescence de la remise du diplôme de gazelle, les dirigeants ont bien conscience que l'essentiel est ailleurs. «Indéniablement, c'est la reconnaissance de notre travail, témoigne Véronique Cheminade, la dirigeante de Net et Clair. Mais le plus important, pour nous, est de continuer à satisfaire nos clients et de capter des parts de marché.» Pour continuer à caracoler... Comme toute gazelle qui se respecte.

PASCAL CRUCHET, président de CMMS


Les gazelles? Je n'en avais jamais entendu parler!

Quand Pascal Cruchet ouvre son courrier, un matin de mai 2006, il écarquille les yeux: le ministère des PME vient de distinguer son entreprise comme l'une des 2000 PME ayant connu la plus forte croissance en 2003 et 2004. «Je me suis demandé s'il ne s'agissait pas d'une plaisanterie», avoue le gérant de l'entreprise de menuiserie. Pourtant, c'était bien vrai: cette PME de 30 collaborateurs a multiplié par deux son effectif en l'espace de trois ans. Son chiffre d'affaires, lui, a suivi une spectaculaire ascension: depuis 2003, il double chaque année. Pour autant, le dirigeant ignorait que cette belle ascension lui donnerait droit à un statut à part. «Quand j'ai reçu mon diplôme, je me suis moi-même documenté, en lisant les journaux, pour savoir en quoi cela consistait», se souvient le dirigeant. Lorsqu'il se renseigne sur le délai des avantages fiscaux et sociaux dont son entreprise pourrait bénéficier, il se heurte à un mur. «Dans notre département, les organismes fiscaux et sociaux n'étaient pas au courant du dispositif», explique le chef d'entreprise. De même, les 200 clients de CMMS, pour la plupart, n'ont jamais entendu parler des gazelles. «Mon expert-comptable m'a dit que je pourrais bénéficier d'économies fiscales, mais j'attends toujours des informations sur la procédure.»

CMMS - Repères

- ACTIVITE: Menuiserie
- VILLE: Mayet(Sarthe)
- FORME JURIDIQUE: SARL
- DIRIGEANT: Pascal Cruchet. 52 ans
- ANNEE DE CREATION: 1999
- EFFECTIF: 30 salariés
- CHIFFRE D'AFFAIRES: 4,1 millions d'euros
- RESULTAT NET 2006: 160 000 euros

 
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Stéphanie Fontana-Bérard

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