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Primes discrétionnaires : êtes vous contre... ou contre ?

Publié par Primeum le | Mis à jour le

Le système de prime discrétionnaire est pratiqué, dans plus de 80% des entreprises françaises. Cette rémunération variable dépend exclusivement d’une décision managériale. Dans quelle mesure une prime peut-elle être considérée comme discrétionnaire ? Quels sont les avantages et les inconvénients de cette pratique ?

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Qu’est-ce qu’une prime discrétionnaire ?

« Prime discrétionnaire », « prime managériale », « prime de qualité », « prime à la discrétion du manager », « enveloppe bureau », la prime discrétionnaire peut être affichée sous différents noms au sein des entreprises mais se base toujours sur le même principe : son attribution et son montant repose sur la seule décision d'un manager.

Inequite_prime_discretionnaireBeaucoup de salariés y ont été confrontés qui souvent la rebaptisent sous les vocables de « prime subjective » ou de « prime à la tête du client» …

Au sein de certains secteurs d’activité, son mécanisme est parfois encore plus pernicieux lui valant le nom de « prime des pirates ». Le manager dispose d’une enveloppe, il préempte sa part pour ensuite réallouer le reste à ses équipes. Vous avez dit pirate ?

La prime discrétionnaire bénéficie d’un cadre juridique assez souple

D’après le site legavox.fr, « une rémunération variable discrétionnaire (octroi d’un bonus, de primes…) est une rémunération laissée à la libre appréciation de l’employeur dans ses modalités de calcul comme dans son versement. Elle peut être spontanée ou faire l’objet d’une clause informative dans le contrat de travail. »


Contrairement à la rémunération variable « classique », la prime discrétionnaire, également attribuée sous forme de bonus, est exclusivement déterminée par l’employeur, et plus généralement par le manager direct du salarié. Selon un arrêt de la Cour de cassation rendu en 2013, le montant de la prime discrétionnaire varie en fonction de l’appréciation directe des performances du salarié par sa hiérarchie. Laquelle, n’est pas tenue par la loi de justifier ni des critères d’attribution de ladite prime, ni de son mode de calcul. La prime discrétionnaire est donc un bonus non lié à la réalisation d’objectifs prédéterminés et laissé exclusivement à la discrétion de l’employeur. (Cass. soc. 14-11-2013 n° 12-15.765 : RJS 2/14 n° 13).
 

L’employeur doit néanmoins respecter le principe d’égalité de traitement

Bien que l’employeur ne soit pas dans l’obligation légale de communiquer les modalités d'attribution de la prime discrétionnaire, il est dans l’obligation d'après un arrêt rendu en 1998 par la Cour de cassation de se soumettre au principe d’égalité de traitement entre tous ses salariés.

« À travail égal, salaire égal »

Ce principe impose à l’employeur de verser le même salaire aux collaborateurs que rien ne distingue objectivement, c’est-à-dire occupant le même poste, avec la même ancienneté, diplômés de la même formation et possédant les mêmes qualifications. (Cass. soc. 15-12-1998 n° 95-43.630 : RJS 4/99 n° 513).

 

Quelles sont les raisons qui peuvent vous pousser à mettre en place une prime discrétionnaire ?

Pour afficher un salaire plus attractif en restant conforme au droit du travail

Pour convaincre une nouvelle recrue de vous rejoindre, afficher un salaire intéressant est un atout indéniable. Ainsi, certains employeurs sont tentés d’utiliser la souplesse juridique accordée par la prime discrétionnaire. En effet, elle représente un moyen pour l’employeur de mettre en avant une rémunération plus élevée tout en s’accordant le droit de ne pas la verser au salarié. Par conséquent, la possibilité de toucher la prime discrétionnaire peut figurer noir sur blanc dans le contrat de travail, celui-ci ne contraignant en rien l’employeur à réellement la verser. Il est plus simple d’attribuer une prime qui ne revêt aucun caractère obligatoire que d’augmenter un salaire fixe ou encore d’améliorer un système de rémunération variable transparent.

Lorsque la mesure de la performance est impossible

Dans certains cas de figures, il est difficile de mesurer la performance et de la factualiser. Et pour cause, si nous prenons l’exemple des fonctions supports, il est parfois difficile, voire impossible de mesurer précisément la performance d’un collaborateur. Comment la mesurer l'on ne dispose pas d’éléments mesurables factuels permettant d’évaluer concrètement son activité ? Dans ce cas précis, un employeur peut voir en l’instauration d’une prime discrétionnaire le moyen d’évaluer une performance sans pour autant disposer de tous les indicateurs permettant sa mesure objective.

Il est à noter que ce genre de primes est souvent mise en place pour pallier à l'insuffisance d'augmentation des salaires fixes sensés récompenser une montée en compétences des salariés.

 

Pourquoi ne faut-il pas la mettre en place ?

Elle ne laisse pas au salarié la possibilité de s’auto-évaluer

Accroître la motivation par la rémunération variable chez un individu résulte de la « mise en tension du dispositif de rémunération ». Celle-ci provient essentiellement de la possibilité d’obtenir un gain élevé combinée au risque de perdre.
Pour que le système soit efficace, le collaborateur doit pouvoir se projeter dans la réalisation de sa performance individuelle. Il doit savoir précisément quels seront les résultats en fonction de la nature des efforts produits et leur traduction en termes d’atteintes d’objectifs fixés puis de montant de prime. Or, dans un système de prime discrétionnaire, le salarié va être amené à produire des efforts sans savoir si ces derniers seront rémunérés, ce qui est contre-productif et peu motivant.

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La subjectivité mais surtout les écarts de niveaux d'exigence entre les managers ne peuvent garantir un système juste et équitable

L’attribution de la prime dépendant exclusivement de la volonté et de l’appréciation du manager, les salariés peuvent ressentir l'obligation d’entretenir des relations strictement consensuelles avec leur supérieur hiérarchique pour espérer l’obtenir. Cette "obligation" n'est pas toujours la garantie d'une meilleure efficacité au sein de l'entreprise.

Une récente étude réalisée par une entreprise de fournitures de bureau et relayée par LCI posait aux salariés français la question de savoir quels étaient leurs pires collègues de travail. Ils sont 21% à dénoncer l’attitude de « faux-gentils », 20% les profils de « faux-travailleurs » et plus de 12% les profils de « lèche-bottes ». « Les bonnes manières de façade de ces collègues agacent et mettent un frein à des relations professionnelles saines » conclue l’étude.

Par ailleurs, il est légitime de se poser la question du degré de subjectivité dans les décisions prises par le manager. 
La prime discrétionnaire est-elle équitable ? Comment savoir si le manager l’attribue de manière juste et équilibrée à chacun de ses salariés, dans la mesure où ce dernier n’a pas d’éléments d’explication à fournir quant à son attribution ?

Manager par l’attribution d’une prime discrétionnaire est inefficace, voire contre-productif

La volonté de gagner plus fait partie des leviers de motivation puissants. Néanmoins, un manager qui baserait uniquement son management sur l’attribution de cette prime, prendrait un risque considérable de démotiver ses équipes.

Au cours des centaines de missions conduites sur les 25 dernières années, Primeum a pu observer que de nombreux managers restent défavorables à la suppression de ces primes discrétionnaires. Pourquoi ? Quelle source de pouvoir en tirent-ils ? Comment sont-elles utilisées comme moyen de pression sur les équipes ? Pourquoi est-ce un levier parfois utilisé pour susciter l’allégeance de leurs collaborateurs ?

C'est d’adhésion à des objectifs partagés, et non d'allégeance à leur personne, dont ils ont pourtant besoin. C'est de sens et d'exigence dont les équipes peuvent tirer profit pour rechercher l'excellence et la rétribution de la réalisation d'objectifs explicites. Aux managers de s’inscrire dans une démarche d’accompagnement vers la réussite en montrant le chemin de la performance à leurs équipes.

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