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DossierScale-up : passer de PME à ETI sans accroc... Y a-t-il un pilote dans l'avion ?

Publié par Camille George le

1 - 6 étapes pour piloter le changement d'échelle

Être une scale-up, autrement dit opérer un changement de taille, et passer du statut de PME à celui d'ETI impose la construction d'un plan de transformation global, qu'il convient de déployer avec doigté.

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"La transformation d'une PME en ETI est un enjeu national. Si nous avions autant d'ETI en France qu'en Allemagne, cela permettrait de créer 1 million d'emplois !" déclare David Brault, directeur associé d'Objectif Cash et coauteur de Réussir son business plan et de Profession directeur financier. Une perspective qui a de quoi faire rêver. Mais opérer une telle évolution représente un chantier sensible. De par sa position, le Daf sera forcément sollicité pour accompagner ce "scale-up", terme anglo-saxon qui désigne un changement de taille lié à un développement rapide.

Cela implique toute une construction qui doit s'inscrire dans un plan de transformation, des outils bien sûr, mais aussi des hommes et des comportements. "Alors que dans une PME, vous pouvez avoir un profil de dirigeant self-made-man touche-à-tout, dans une ETI, il est nécessaire d'avoir des relais pour porter les nombreux projets", explique David Brault. Le Daf doit ainsi mener tambour battant une structuration à tous les niveaux, tout en conservant assez de hauteur pour canaliser et orienter les choix stratégiques.

Parce qu'elle est globale, une mutation de PME en ETI dure, en moyenne, cinq à dix ans. Une période qui se déroule selon une partition que le Daf a tout intérêt à respecter, au risque de faire détonner tout l'orchestre. Bien sûr, la priorisation des étapes peut varier sensiblement et dépend, entre autres, du secteur d'activité et du niveau de structuration de départ. "Il n'y a pas un seul modèle de croissance, souligne David Brault. C'est souvent un cocktail entre croissance externe, organique et développement international. Le premier devoir du Daf est d'évaluer si le modèle choisi est pertinent et cohérent avec les moyens de financement à disposition."

1. L'analyse de l'existant

La première étape consiste, donc, à analyser rapidement l'existant afin de faire ressortir, sans la moindre ambiguïté, les points forts, les points faibles et les points d'amélioration. L'enjeu, ici, est d'être objectif, même si cela remet en cause les choix du dirigeant. Le Daf devra tenir bon sur cette première étape et réobjectiver tous les points clés finance : les clients à marge et les autres, le chiffre d'affaires, la R & D utile et la R & D inutile... Utiliser la méthode SWOT (ou FFOM en français pour Forces, faiblesses, opportunités et menaces) est un moyen efficace pour parvenir à un diagnostic clair sans s'éparpiller.

Pour Clarisse Puharré, Daf de transition, membre du réseau Comatch, qui a oeuvré dans des entreprises qui vont de la grosse PME à la filiale de groupe important, "c'est l'occasion de mettre en place un suivi de trésorerie et d'optimiser le fonds de roulement". Cela donne une visibilité sur les liquidités, sur laquelle s'appuyer et mettre en place, ou pas, de nouveaux investisseurs. Ce qui conduit naturellement à la deuxième étape : être capable de formuler pour l'entreprise une vraie théorie de la valeur.

2. Élaborer le plan de rentabilité et de création de valeur

Cette étape doit permettre de formuler une thèse plausible, réaliste et documentée par des chiffres qui sera défendue par le Codir. "La question du Codir est sous-jacente et sa création constitue souvent l'étape 0 du processus de transformation", indique David Brault. Autrement dit, il s'agit de construire le business plan avec le directeur général et en accord avec le Codir. C'est peut-être au cours de cette période que le changement de paradigme s'opère de façon visible. En effet, pour le Daf, il s'agit de ne plus regarder dans le rétroviseur mais, au contraire, d'anticiper, d'être capable de projeter l'entreprise et l'activité à cinq ans en avant. "Mais attention, prévient David Brault, le business plan est tout sauf un tableau de chiffres. Il doit refléter la thèse de la création de valeur." Tout ceci va permettre de trouver et d'actionner les bons leviers de financement.

3. Financer la croissance, travailler sa communication

Trouver des financements est un sujet éminemment stratégique. Selon la nature de la croissance ou du mix de croissance, les leviers sont multiples. Une fusion, une acquisition, un développement de la production par l'innovation ou l'ouverture d'une filiale à l'étranger impliquent des logiques de finan­cement différentes : IPO, levée de fonds / investissements, R & D, embauches de commerciaux, BFR ... Les chemins sont variés et souvent complexes.

À ce moment-là, l'entreprise entre dans une phase critique de sa transformation, qui consiste à confronter sa vision stratégique à la réalité, avec charge au Daf de piloter la trésorerie, d'optimiser le BFR et de trouver des financements. Celui-ci va devoir travailler sa communication auprès de futurs ou de nouveaux financeurs. "Il ne faut pas hésiter à ­rencontrer des fonds d'investissement et à leur soumettre le plan de transformation. Écouter leurs remarques permet d'apprendre peu à peu à parler leur langage, note David Brault. De même, un banquier finance toujours des projets raisonnables présentés par des managers raisonnables. Il importe donc de se concentrer sur des scénarios réalistes, voire nettoyés de l'optimisme du dirigeant."

4. Les indicateurs, les outils

"Produire des états financiers et clôturer en prévisionnel demande un gros travail d'anticipation. Le Daf doit être capable de proposer un bilan à mi-parcours afin de définir, avec le directeur général, les indicateurs de performance les plus pertinents", détaille Clarisse Puharré. Parmi les plus prisés, on compte bien sûr l'Ebitda, la marge opérationnelle, le BFR, le flux de trésorerie et le suivi des investissements. Mais en fonction de l'activité, d'autres indicateurs peuvent se révéler pertinents. Il est toutefois recommandé de ne pas dépasser cinq indicateurs. Pour David Brault, les trois incontournables sont le chiffre d'affaires, l'Ebitda et le cash. "Mais il peut être intéressant d'aller chercher d'autres KPI tels que la RSE, l'expérience salarié ou l'expérience fournisseur", remarque l'expert.

Soutenir une croissance forte implique d'être bien outillé. Or, si on pense assez facilement à mettre en place un ERP ou des outils de BI pour les métiers clés, on oublie parfois de se doter soi-même de bons dispositifs de gestion bancaire. "Avoir un banquier à la hauteur est crucial en phase de croissance, il ne faut donc pas hésiter à demander à changer de portefeuille, estime Frédéric Meunier, fondateur de Squareness, cabinet de conseil financier spécialisé dans la croissance externe de PME et ETI. Ce qui semble anecdotique de prime abord peut avoir de lourdes conséquences. Le simple fait de changer de portefeuille et de conseiller peut donner accès, par exemple, à d'autres outils de mutualisation de trésorerie que ceux que vous aviez auparavant."

5. Les hommes, la gestion des ressources

Être attentif aux équipes est capital dans un processus de transformation. Tout de suite après avoir dessiné le chemin stratégique, il convient d'y placer les hommes. "Dans une PME, 95 % de la qualité repose sur les hommes. L'avantage est qu'ils connaissent bien leur métier, l'inconvénient est qu'ils ont leurs limites. Il faut donc les aider à évoluer", analyse Frédéric Meunier. Accompagner les équipes, identifier rapidement les freins et les moteurs du changement, savoir recourir à des talents externes au bon moment... tout ceci demande un effort de pédagogie important de la part du Daf et impose de passer d'un fonctionnement vertical à un fonctionnement plus horizontal.

"Il est difficile de travailler en silos quand une entreprise grandit. La digitalisation est un bon outil de décloisonnement", juge Clarisse Puharré. L'ensemble du processus doit découler d'une gouvernance claire avec le déploiement d'une nouvelle culture d'entreprise. "La question de la gestion et de la détention du capital est clé", assure la consultante. Le passage d'une société à valeurs familiales à une société plus impersonnelle, dès lors que le capital est dilué, est un moment critique pour les équipes. "L'enjeu sera de bien cadencer le changement pour les ménager, car elles restent la cheville ouvrière de ­l'activité", rappelle Clarisse Puharré.

6. Gestion des risques et conformité réglementaire

Enfin, dernier aspect à ne pas négliger : le pan conformité réglementaire. Au cours d'une transformation de l'ampleur d'un scale-up, il est important de faire preuve d'exigence en matière de conformité fiscale. "Dans cette optique, l'ensemble du back-office doit s'aligner et construire (avec le DSI, le DPO, le Daf ou encore le RSSI) une réponse adaptée, conseille Clarisse Puharré. Bien sûr, ce n'est pas en lien direct avec le business et ça ne rapporte rien, mais cela peut coûter très cher en pénalité !" C'est donc un sujet dont il convient de s'occuper malgré tout. En résumé, il ne faut pas confondre un plan d'optimisation, qui ne mettra en oeuvre que des "quick wins", avec un plan de transformation qui nécessite, lui, une vision à long terme. Dans ce contexte, le Daf doit être le garant de l'orthodoxie financière, car il se retrouve à piloter un écosystème élargi.

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Rédactrice en chef de Daf Magazine, j’évolue dans la presse économique BtoB depuis plus de 15 ans. Ma passion ? L’économie des entreprises [...]...

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