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Marseille veut devenir capitale

Publié par Céline Tridon le | Mis à jour le
Marseille veut devenir capitale

Entreprendre sous le soleil ? L'idée a de quoi faire rêver. Marseille et sa région profitent de l'exode des Parisiens à la recherche d'une meilleure qualité de vie pour faire valoir les atouts locaux. Le territoire est en pleine effervescence.

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La Bonne Mère, le petit pastis, le Vieux-Port, la bouillabaisse... Autant d'images d'Épinal qui concourent à décrire Marseille. Pourtant, la cité phocéenne vaut plus que cela et elle compte bien faire valoir son dynamisme, loin des idées poussiéreuses qui la décrivent habituellement. Elle est une terre économique dynamique et elle s'évertue à le démontrer. Comment ? Déjà par les chiffres.

Depuis le début de la crise sanitaire, ce n'est plus une surprise, les Parisiens désertent la capitale pour des villes en province, faisant le pari du vert ou de la mer. Et leur attrait pour Marseille est grandissant, d'après une étude réalisée par la plateforme de réservation de déménageurs en ligne Nextories, en décembre dernier. Plus de 9 % des Parisiens déménagent dans le département des Bouches-du-Rhône, ce qui en fait la première destination de départ hors Île-de-France. Pour l'année 2020, suivent la Gironde et la région lyonnaise pour respectivement 7,8 et 7 %. En 2019, ils étaient 10,5 % à partir vers Bordeaux, 9,2 % vers Lyon et seulement 8,6 % vers Marseille. Autrement dit, le jeu des cités est redistribué.

Atouts

Alors, à Marseille, que viennent chercher les actifs, et notamment les entrepreneurs ? " Il y a un sujet qui gagne en importance : celui de la qualité de vie. Aujourd'hui, la préoccupation principale n'est plus le poste ou la carrière ", promet Jean-Luc Chauvin, président de la CCI Aix-Marseille-Provence. Une attractivité que confirme Jean-Baptiste Maillant, le fondateur de Wing.

La start-up s'est spécialisée dans la logistique du dernier kilomètre. Créée en 2015, elle est incubée depuis deux ans à ZeBox, le start-up studio du groupe spécialiste du transport maritime CMA-CGM. Avec la crise, l'activité de la start-up a explosé à tel point que le fondateur relocalise son siège à Marseille, au plus près de l'incubateur. Comment convaincre les 50 collaborateurs de rejoindre la ville du Sud ? Pour le jeune dirigeant, la perspective d'un cadre de vie qualitatif a été décisive. " C'est devenu le critère numéro 1, Paris n'étant plus le centre des décisions, déclare-t-il. Le problème, c'est le conjoint ou la conjointe qui ne trouve pas d'emploi. C'est pourquoi il est impératif que Marseille développe plus d'industries... "

Un écueil qui, d'après la région, n'est que temporaire, d'autres atouts devant être mentionnés. " Bien sûr, nous vivons une crise inédite, mais nous continuons d'être combatifs pour envisager l'après, assure Martine Vassal, présidente de la Métropole Aix-Marseille-Provence et présidente du département des Bouches-du-Rhône. Marseille reste une destination stratégique pour la potentialité du foncier, le secteur de la jeunesse et la position géopolitique en bord de mer et entre l'Europe et l'Afrique. " Et d'avancer le chiffre de 65 investissements d'entreprise accueillis en 2020, pour un total de 1 350 emplois directs, près de la moitié de ces projets venant de l'étranger. " Ces chiffres sont légèrement en baisse par rapport à 2019, convient Martine Vassal. Mais ils prouvent quand même l'attractivité de notre territoire malgré la crise de la Covid. " En 2019, en effet, 80 implantations et 1 935 emplois avaient été comptabilisés.

Un phénomène que suit de près Provence Promotion, agence d'accompagnement des entreprises qui souhaitent s'installer dans la région. Son directeur général Philippe Stéfanini identifie trois profils d'entrepreneurs. " Nous voyons surtout des entreprises qui veulent créer un établissement supplémentaire, mais aussi des néo-entrepreneurs ou des repreneurs d'activité locale, énumère-t-il. Ces derniers, crise oblige, sont de plus en plus nombreux. "

Alors, loin de se décourager (en 2020, le recul de l'activité économique dans les Bouches-du-Rhône est estimé à 18 milliards d'euros de chiffres d'affaires par la Chambre de commerce), les défenseurs du territoire marseillais relèvent leurs manches et misent sur la résilience. Pour certains, elle est même déjà actée et se justifie par la pluralité des filières économiques : logistique, maritime, santé, aéronautique, pour ne citer qu'elles. " Là où des métropoles comme Toulouse ont fait le choix de se spécialiser, nous avons fait celui de la diversification ", commente Martine Vassal.

Hyperconnectivité

D'ailleurs, Marseille peut revendiquer le statut de neuvième métropole mondiale en matière de connectivité. Elle a ainsi été reconnue par Telegeography, un organisme d'études des télécommunications, qui la place juste après New York et devant Hong Kong. En tout, 14 câbles sous-marins y atterrissent, pour 160 opérateurs de télécommunications internationaux et nationaux, six points d'échange internet et 14 plateformes et réseaux de distribution de contenu hébergés.

Longtemps méconnue, cette " hyperconnectivité " fait de plus en plus parler d'elle. " Dans moins d'un an, nous serons cinquième métropole mondiale, projette Jean-Luc Chauvin. Dans un contexte d'accélération de la digitalisation, forcément, c'est un plus. Les industries bénéficieront d'un accès immédiat et plus efficace. " Parmi les atouts, en effet, la présence des câbles favorise l'implantation de data centers, mais n'assure pas spontanément le développement économique du territoire. Sous certaines conditions, elle peut créer un écosystème vertueux et créateur d'emplois en attirant activités numériques ou connexes (R&D, services financiers et commerce international...). Reste à ce que la mobilisation des acteurs publics pour soutenir la création d'un écosystème local où collaboreront data centers, entreprises numériques et entreprises hyperconnectées soit effective.

Témoignage

" De nombreux partenaires B to B sont présents "

Amine Ben Abdallah, président de Hexamobile

Le Sud fait partie de l'histoire d'Amine Ben Abdallah. Originaire de Tunisie, sa famille déménage à Nice en 2007. Il part ensuite sur Aix-en-Provence pour suivre des études supérieures : c'est là qu'il a l'idée de se lancer dans le commerce de smartphones reconditionnés. Il créera Hexamobile à Marseille. Pourquoi cette ville ? Pour des raisons économiques avant tout. " Je ne pouvais pas rester à Aix-en-Provence car la vie y est plus chère. Là où j'aurais dû payer pour 100 m2, j'ai quatre fois plus grand à Marseille. De plus, ce sont surtout des profils cadres qui y vivent. Or, pour la réparation des téléphones, nous recherchions surtout des profils techniciens que nous pourrions former ", explique le dirigeant. Quant à Paris ? " Je ne connais pas du tout la ville, alors difficile d'y songer ", avoue-t-il en riant. Et dans la capitale française, attention au risque d'être noyé dans la masse. " Il est vrai qu'ici nous avons vraiment le sentiment d'être bien aidés par les CCI, de bénéficier de différentes aides régionales grâce auxquelles j'ai pu conserver toutes les parts dans mon entreprise ", apprécie Amine Ben Abdallah.

En effet, l'activité Hexamobile a explosé en 2020, peut-être même trop car l'entreprise a dû se restructurer pour mieux absorber l'activité. Elle compte actuellement 10 collaborateurs, mais envisage désormais deux embauches par mois sur 2021. Son objectif ? Se démarquer des marketplaces où elle est actuellement présente (Amazon, Back Market...), pour renforcer la vente sur son propre site internet. Elle compte aussi sur le maillage B to B de Marseille pour y parvenir : " Grâce aux différents grossistes présents, il est facile de récupérer des pièces détachées, notamment pour les accessoires ", complète Amine Ben Abdallah. " Et à titre personnel j'aime la mer ", ajoute celui qui ne regrette pas son choix.

Hexamobile
Reconditionnement de smartphones
Marseille (10e)
Amine Ben Abdallah, président, 26 ans
Sasu
Création en 2015
10 collaborateurs
CA 2020 : NC


Car les projets ambitieux ne manquent pas, entre consortiums économiques et offre de plus en plus riche de lieux alternatifs... quitte à frapper à la porte de sa voisine, Aix-en-Provence. L'installation du campus Thecamp y a attiré plus d'une start-up qui voit dans la région provençale une sérieuse alternative à la capitale.

En centre-ville marseillais, éclosent des tiers-lieux qui facilitent le télétravail hors-domicile et les échanges entre professionnels. " Marseille est la métropole la plus étendue de France, en termes de surface. C'est pour cela que, grâce aux tiers-lieux, il est possible de créer des synergies entre les entreprises ", assure Jean-Luc Chauvin. Ainsi, les premiers coups de pioches sont donnés pour l'Équateur, une adresse qui comptera 44 postes de coworking distanciés, des bureaux fermés, des zones de réunion, une agora, un lieu événementiel, des espaces de détente, une salle de sport, un restaurant... Les créateurs l'imaginent comme un lieu festif et culturel où se tiendront soirées et expositions. Y seront hébergées des entreprises, mais aussi des artistes, des artisans, des avocats et, au rez-de-chaussée, des actions sociales et éducatives s'engageront au profit de différents publics du quartier.

De même, Babel Community, spécialiste du coworking et coliving, remodèle les anciennes Galeries Lafayette de Marseille. Le bâtiment mastodonte de 8 000 m² prépare sa mutation et accueillera 168 unités d'habitation et 1 300 m² de bureaux, soit un entre-deux idéal pour une société qui déménage et cherche des solutions de logement pour ses collaborateurs. À la liste des installations prévues s'ajoutent une salle de sport, un restaurant et un roof-top. Avec vue sur la Bonne Mère, parce qu'elle reste incontournable.

Témoignage

" Dire qu'il faut rester à Paris ? Un stéréotype "

Anaïs Prétot Cofondatrice de LiveMentor

LiveMentor propose des formations pour les entrepreneurs. Créée à Paris, la jeune pousse se rend compte que 80 % de ses élèves sont en-dehors des grandes villes. Un confinement plus tard, la décision est prise pour les dirigeants : il faut délocaliser l'entreprise en province. Avec un marché réparti sur toute la France, la nécessité d'être à Paris n'est plus nécessaire. " C'est un stéréotype que de dire qu'il faut absolument être à Paris, et il s'est déconstruit au fil de l'histoire de notre entreprise ", confirme la cofondatrice Anaïs Prétot. D'autant plus que l'entreprise évolue sur un modèle digital, facile à déployer partout, donc.

Dans un premier temps, il a tout de même fallu rassurer les investisseurs. " Ils pensaient que nous perdrions en attractivité, notamment auprès des talents, commente l'entrepreneure. Mais nous avions besoin surtout de commerciaux. Or, à Paris, ils sont en sur-compétition et demandent des packages salariaux que nous n'aurions pas pu offrir. "

L'entreprise déménage en septembre 2020 à Aix-en-Provence, non loin de Thecamp, mais conserve des locaux dans la capitale. " Nous ne croyons pas au remote total et il était difficile de décréter du jour au lendemain que les 40 salariés devaient déménager. " Elle a toutefois réduit sa surface de bureaux parisiens et, par la même occasion, cette dépense par deux. Même en louant des bureaux à Aix, l'opération reste gagnante pour la PME.

LiveMentor
Formations en ligne
Paris (8e)
Anaïs Prétot, cofondatrice, 32 ans ; Alexandre Dana, cofondateur, 33 ans
SA > Création en 2012 > 40 collaborateurs
CA 2020 : NC

 
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