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Entrepreneurs HPI : entre forces et faiblesses

Publié par Céline Tridon le - mis à jour à

Être entrepreneur et haut potentiel, c'est être en mesure de raisonner efficacement, mais c'est aussi rencontrer, parfois, quelques difficultés dans le management. Aussi, bien se connaître permet de mieux appréhender chaque situation.

130 et au-delà.

C'est le seuil minimum de QI (quotient intellectuel) à partir duquel un individu est considéré comme HPI (haut potentiel intellectuel). « On estime que les HPI représentent 2,5 % de la population française », mentionne Ida Gennari-El Hicheri, psychologue du travail. Mais de quoi parle-t-on exactement ? Déjà, il faut distinguer les HPI des HPE (haut potentiel émotionnel). Le HPE est en mesure de mieux comprendre et recevoir les émotions que la moyenne. Le HPI, lui, possède un fonctionnement cognitif différent, avec sa propre manière de résoudre les problèmes. « Cela joue sur quatre dimensions : l'aspect verbal, le raisonnement, la mémoire et la vitesse de traitement » précise Ida Gennari-El Hicheri. Ainsi, un HPI, c'est une personne qui possède une grande bibliothèque de connaissances dans son esprit, qu'il pourra solliciter à tout moment. De même, un haut potentiel a plus de mémoire, comme s'il avait un sac dans lequel il pouvait emmagasiner beaucoup plus d'informations. Cependant, il traitera cette information plus rapidement que les autres et trouvera des solutions inédites. « Pour un entrepreneur qui doit résoudre de la complexité, qui est face à des problématiques à chaque instant de sa journée et qui doit créer des choses, être HPI, c'est un atout », assure Ida Gennari-El Hicheri.

Automatismes.

Sonia Fiquet est auteure du livre « La Vie presque ordinaire d'une femme HPI et TSA » et fondatrice du programme "Kiffer sa vie". C'est à 52 ans qu'elle est diagnostiquée HPI et autiste. « 40 % des HPI seraient porteurs d'autisme puisque le TSA (trouble du spectre de l'autisme), c'est une mutation génétique qui affecte la manière de percevoir l'information et de l'analyser, commente-t-elle. Cela s'exprime à travers des problèmes de communication, notamment relationnelle. On peut être très pertinent au niveau de son business, mais dès qu'on sera en difficulté émotionnelle, on restera bloqué sur son second degré de cognitif. Il sera alors plus compliqué de prendre de la distance. » Reposant sur des données factuelles, le business d'un chef d'entreprise HPI TSA sera peu affecté. Il fonctionnera même très bien. En revanche, les choses se corsent en termes de management, notamment, avec un problème relationnel récurrent, à cause de ce fonctionnement neurophysiologique que le HPI TSA ne maîtrise pas. « L'autisme, c'est un handicap invisible que les autres ne comprennent pas (à cause d'un non-respect des codes sociaux par exemple) et dont nous ne nous rendons pas compte nous-mêmes », ajoute Sonia Fiquet. La clé selon les deux expertes ? Se connaître. Si la personne entreprend un large travail sur elle-même, elle se verra dysfonctionner, partir dans l'émotion : en prendre conscience lui permettra alors de prendre du recul. Elle doit aussi s'accorder plus de temps et s'interroger : « Est-ce le bon moment pour répondre ? Dois-je gérer tout de suite cette situation ? » Il s'agit de redescendre en termes sensoriels pour analyser la problématique de manière plus juste. « Le HPI passe son temps à observer les gens car, quand on ne rentre pas dans un cadre classique, on est très fort pour analyser l'attitude des autres. La problématique survient quand il est bloqué car saturé d'un point de vue sensoriel ou émotionnel : il n'a plus une vision claire des choses », ajoute Sonia Fiquet. Alors le haut potentiel interprète. Il projette sur l'autre des intentions qu'il pense deviner. « C'est pourquoi il lui faut demander les intentions de son interlocuteur, quand quelque chose le heurte », conseille l'auteur. De même, les hauts potentiels ne savent pas exactement, par exemple, comment ils passent d'un état de réflexion A à un résultat B, ni tout le chemin qui les mène d'un point à un autre. Pour eux, c'est quasiment automatique et inconscient. « Ils peuvent avoir cette fâcheuse tendance à aller trop vite sur certains sujets et ne pas expliquer les étapes intermédiaires, décrit Ida Gennari-El Hicheri . Donc, quand ils se rapprochent de leurs équipes pour leur dire "Nous allons faire ceci ou cela", parfois ils perdent leurs collaborateurs parce qu'ils n'ont pas expliqué les étapes intermédiaires. »

Conscience.

Être HPI n'est pas un étendard. C'est une caractéristique, similaire au fait d'avoir les yeux bleus ou de venir de tel milieu social. C'est quelque chose qu'il faut connaître, un fonctionnement psychologique à appréhender. « Le conseil que je donne : se regarder faire. Il faut avoir accès à sa pleine conscience et être lucide sur soi-même. Être HPI apporte de la confiance, mais pas forcément de l'estime, c'est-à-dire une juste appréhension de ce que l'on vaut ; cela, on ne peut pas l'avoir sans une vision lucide de son mode de fonctionnement, qui permet aussi de se lancer des défis. Si on sait comment on fonctionne, on est aligné. Et quand le stress de l'entreprise arrivera, on saura y faire face », développe Sonia Fiquet. Pour les entrepreneurs qui s'ignorent HPI ? La connaissance de soi est clé. Aussi, en cas de doute, il est possible de demander un bilan à un psychologue spécialisé, afin de suivre un test baptisé Wais 4 : ce sont des échelles de mesure des quatre dimensions (verbal, raisonnement, mémoire et vitesse de traitement). Elles sont reconnues scientifiquement et au niveau international.