Hawa Séméga : du quartier à l'impact national
Publié par Linda Labidi le - mis à jour à
De Sévran à l'Ordre national du Mérite, Hawa Séméga trace une trajectoire inspirante. Avec Time to Start, elle révèle les talents invisibles des quartiers populaires. Son moteur : agir, transmettre, faire grandir.
Hawa Séméga ne cherche pas la lumière. Elle la crée pour les autres. Depuis Sévran, où elle a grandi après avoir quitté son pays natal, jusqu'aux distinctions nationales - elle a reçu l'Ordre national du Mérite en juin 2024 - son parcours incarne la montée en puissance d'une génération d'entrepreneurs engagés, bien décidés à faire bouger les lignes.
Son premier déclic ? Un programme de prépa intégrée pour élèves de quartiers populaires. Il l'emmène jusqu'à l'ESCP Europe, l'une des meilleures écoles de commerce françaises. Là, elle mesure l'écart abyssal entre les ressources disponibles dans les grandes écoles et celles des universités de périphérie. Un choc qui la pousse à créer Time to Start, un programme d'accompagnement et de financement dédié aux entrepreneurs des quartiers.
Depuis 2015, 340 projets ont été accompagnés, avec un ADN fort : révéler les talents là où peu regardent. Pour cela, pas de critères de diplôme ou d'âge. Ce qui compte, c'est la motivation, la capacité à se remettre en question, et la volonté de s'impliquer dans un accompagnement sur la durée. Le programme combine coaching individuel, ateliers collectifs, microlearning et même un fonds de financement à taux zéro, sans garantie ni apport personnel.
Résister, agir, transmettre
Les débuts n'ont pourtant rien d'un conte de fées. « Je suis arrivée dans un écosystème très masculin. Femme, noire, issue des quartiers : il fallait prouver. » Hawa choisit alors de « surinvestir la méthode » pour gagner en légitimité. Mais très vite, elle réalise que ce n'est pas ce qui convainc. Ce qui change la donne, c'est l'assurance, les résultats concrets et l'entourage.
« Savoir s'entourer, c'est essentiel », insiste-t-elle. Son premier conseil : ne pas hésiter à prendre des décisions difficiles quand un collectif freine au lieu de porter. Elle-même a dû composer avec une rupture douloureuse avec son premier conseil d'administration, avant de rebondir. Aujourd'hui, son équipe est solide, portée par une mission commune.
Autre levier-clé : l'action. « Être en mouvement m'a toujours sauvée. Même quand c'était dur, j'ai avancé. » Cette philosophie lui permet d'élargir désormais ses actions à l'international, notamment en Afrique de l'Ouest, en lien avec les diasporas installées en France.
Ce qu'elle transmet aux porteurs de projets qu'elle accompagne, c'est avant tout une posture : croire en sa valeur, agir, s'exposer, assumer ses ambitions. « L'entrepreneuriat, c'est aussi décider du monde qu'on veut construire. Et pour cela, il faut des employeurs, des décideurs, des rôles modèles. »
Le message est clair : dans les quartiers comme ailleurs, les talents existent. Il ne manque que les conditions pour qu'ils s'expriment.