Et si l'ambition était un joli défaut ?
Publié par Linda Labidi le - mis à jour à
En France, le mot ambition supporte encore une image négative : quand on dit de quelqu'un : c'est un ambitieux ou une ambitieuse, il y a un parfum de petite critique sournoise ... mais quand on dit de quelqu'un « il n'a aucune ambition ou elle n'a aucune ambition » alors on est ici face à une critique affichée !
Pourquoi ce terme pâtit-il encore de cette image négative ou tout du moins peu qualitative ?
AMBITION BASHING : est-ce encore le cas en France ?
Dans d'autres pays, ce terme est utilisé comme un compliment, une qualité, un trait de personnalité appréciable et apprécié, un motif de recrutement et d'évolution de carrière ou encore de décision d'investissement dans le projet d'un entrepreneur.
Nous avons, avec une de mes amies entrepreneure : Evelyne platnic Cohen, co-écrit un ouvrage sur ce constat, afin de redonner à ce mot sa force et son moteur décisionnel, inspirationnel et aspirationnel.
En tant qu'entrepreneure, et fréquentant de nombreux entrepreneurs et entrepreneures, j'ai pu constater que l'ambition est un ADN souvent partagé dans cet écosystème et qu'il est un ingrédient de réussite, un carburant à l'action. Dans cet écosystème, le mot AMBITION est positif et il est même plébiscité. Cette image commence à s'étendre dans d'autres univers métiers mais il faut persévérer et déclarer son ambition avec fierté, l'assumer et la rendre contagieuse à son entourage .
AMBITION PRO OU PERSO : les 2 mon général !
Chacun(e) a son ambition, et chaque forme et taille d'ambition sont légitimes ; Ce qui est important est de la visionner sur un plan 360° c'est-à-dire sur un plan personnel tout autant que professionnel. En effet, ces 2 univers sont non seulement liés mais ils sont complémentaires et ils équilibrent le fameux « worklife balance » équilibre vie professionnelle vie personnelle.
On est ambitieux pour son métier, son statut, son activité, son entreprise, sa fonction, ses objectifs, ses équipes, sa position de leader et c'est souvent cette vision-là qui est associée au terme d'ambition. Mais il y a aussi un univers personnel, privé qui est tout aussi utile et légitime, voire même indispensable pour tenir dans la durée ses ambitions.
En effet, on peut être ambitieux pour sa famille, ses enfants, ses amis, ses passions, son sport, ses associations, ses activités personnelles et ce sont déjà des preuves tangibles d'ambition respectable. Les chefs d'entreprise, fondateurs, créateurs ont souvent ce moteur chevillé au corps : cela leur donne le courage de créer, de démarrer un projet, de le déployer avec une vision et surtout de ne pas se décourager car ils ont l'ambition de réussir.
AMBITION OUI mais y mettre les MOYENS : encore mieux !
Dire qu'on veut être le leader dans son secteur, être le 1er acteur dans sa catégorie, être le champion dans son écosystème ou encore le meilleur parent ou l'ami le plus reconnu et demandé ...c'est facile à dire , plus difficile à faire. Il est donc important de se donner les moyens de son ambition.
Quand j'ai créé mon entreprise en 2000 : CANALCE (devenue Kalidea) j'avais la vision de devenir leader dans le marché des comités d'entreprise. J'ai donc mis les moyens nécessaires tant sur le plan financier (investissement personnel, levées de fonds) que sur le plan humain (recrutement de 30 personnes sur l'année 1) puis techno (création d'un site transactionnel), la mise en place d'un process de vente (commerciaux new business, commerciaux gestionnaires, plateau prise de RDV..) , la mise en place d'une stratégie de communication médias pour gagner en notoriété (j'ai fait beaucoup de réseau ! ), et pour finir, une stratégie d'acquisition... car j'ai racheté ma 1ère société à J+ 6 mois de la création.. puis j'en ai réalisé 12 autres sur les 15 ans de la société.
Résultat en moins de 15 ans, j'ai généré 70M€ de Chiffre d'affaires avec une équipe de 200 collaborateurs et 5000 clients BTOB. L'ambition est une aventure qui démarre de façon individuelle (tel un sportif, on fait défiler dans sa tête la course pour arriver au sommet) mais qui se déroule de façon collective (on passe à l'action avec une équipe, des efforts, du travail en écosystème interne mais aussi externe : banque, investisseurs, business angels, fédérations, clubs, réseaux, prescripteurs, partenaires, fournisseurs.
Réussir est une mission collective. En effet, nous sommes dans l'ère du CO : le fameux Collectif, et les quelques expressions qui suivent nous le démontrent bien : COvoiturage (avec Blablacar qui a lancé et revisité ce terme ancien) , COhabitation (avec AirBnB qui a complètement libéré et changé l'état d'esprit du partage d'habitation) , COconstruction (règle numéro 1 en management ou en formation) , COdirection (les créations d'entreprises sont souvent le fait de 2 ou 3 associés à présent) etc..
Bonne ou mauvaise AMBITION ? : comme le cholestérol, il y a le bon et le mauvais cholestérol !
On connaît tous cette expression : les ambitieux sont ceux qui ont les dents qui « rayent le parquet ». Cela n'a pas totalement disparu, bien évidemment, mais nous sommes aujourd'hui dans une acceptation et une recherche de ce mot qui en dit long.
L'ambition est vu comme une qualité si elle est associée à des comportements nobles et respectables. Par exemple, un patron doit respecter les règles de loyauté dans le business, avoir une parole, jouer avec les règles qui sont données, développer la juste place de ses collaborateurs et leur octroyer une évolution méritée, rechercher des partenaires-fournisseurs pour collaborer avec une ambition commune pour servir ses clients, sélectionner des prestataires et leur donner toutes les chances de bien délivrer leurs prestations, construire des alliances stratégiques gagnantes/gagnantes, honorer ses engagements dans son écosystème réseau...
Je me permets d'insister sur ce dernier point car je suis experte du sujet « networking-réseau » et je forme des dirigeants, des chefs d'entreprise et de nombreuses autres personnes en leur démontrant systématiquement que le jeu de la réciprocité (je donne /je reçois) , le jeu de l'accompagnement, du partage et de la fidélité sont les ingrédients de la réussite.
Ambition à la vie, à la mort ?
Une ambition peu et doit évoluer avec le temps, avec les tranches de vies ; Nous n'avons pas la même à 20, 30 ou 60 ans. Il faut la définir, la faire progresser, savoir la mettre en stand-by si besoin (par exemple dans ce tunnel 30/45 ans où on doit gérer conjoint, enfants, carrière, déplacements, vie sociale.. ) et la reprendre après, y apporter des étapes ou des aménagements. L'essentiel est de ne pas perdre de vue sa vision du bonheur, du bien-être et de son équilibre de vie car après tout, c'est ça l'ambition de nos vie.
Sandra Le Grand est experte en Networking business . Elle a été tour à tour intrapreneure pendant 11 ans chez Coca-Cola, puis avec Canalce-Kalidea, puis Yapuka.org. Elle a également été administratrice indépendante au conseil d'administration : AXA France, Groupe Olympique Lyonnais, Surys, Adux ; Air France et la Fondation Nationale des IUT. Elle est également l'auteure de 2 ouvrages : "Entreprendre, un peu, beaucoup, passionnément" et "Ambition : si l'ambition était un joli défaut ?"